Le « Green Deal » — ou « Pacte vert », initié par Ursula von der Leyen, a été un marqueur de son mandat avec des réformes dans les domaines du transport, de l’énergie, de l’industrie et de l’agriculture. Cependant, l’ambitieux Pacte vert plombe la compétitivité européenne et pourrait nuire à la candidature de Mme von der Leyen à sa propre succession à la tête de la Commission européenne.
Il ne faudrait donc pas que le rapport Draghi, dont les conclusions semblent confirmer une baisse de l’activité industrielle européenne, ne soit divulgué avant les élections européennes. Il ne faudrait pas non plus remettre en question le plan d’investissements de 500 milliards d’euros déjà prévu après les élections européennes pour relancer une industrie verte moribonde, avec un prêt colossal qui piochera une nouvelle fois dans l’argent public et qui pourrait avoir la nouveauté de mobiliser l’épargne privée d’une façon encore jamais vue auparavant.
Cachez ce rapport que je ne saurais voir
Selon un article du Point, le rapport Draghi sur la compétitivité européenne ne sera publié qu’après les élections européennes. Pour Pieter Omtzigt, chef de file du NSC (Nouveau Contrat social, conservateur néerlandais), cet agenda « inacceptable » a été choisi pour éviter que les décisions importantes concernant le Green Deal ne soient débattues avant les élections.
« Le Green Deal a montré qu’une proposition politique post-électorale, qui ne faisait pas partie du débat public avant les élections, manque de légitimité démocratique et est relativement facilement annulé », a-t-il écrit dans une lettre adressée à Ursula von der Leyen. « Les fondements démocratiques de l’Union sont déjà faibles et le seront encore davantage si des propositions aussi ambitieuses ne sont avancées qu’après les élections. Nous devons plutôt donner aux citoyens davantage de voix dans l’orientation politique de l’Union européenne (UE) », a-t-il ajouté.
Mario Draghi, ancien patron de la Banque centrale européenne et ancien chef du gouvernement italien, prépare un rapport sur la compétitivité de l’Union européenne sur la demande de la présidente de la Commission européenne. La publication de ce rapport, dont le but est de formuler des propositions visant à revitaliser l’économie européenne notamment face aux appétits géants de la Chine et des États-Unis, a été choisie pour la fin juin — juste après les élections européennes.
Les conclusions de ce rapport ne font plus de mystères, Mario Draghi s’est adressé aux ministres de l’Économie et des Finances à Gand le 24 février, en ces termes : « L’Union européenne doit trouver une énorme quantité d’argent en relativement peu de temps », chiffrant le mur d’investissements à 500 milliards d’euros, en plus des 750 milliards d’euros déjà empruntés aux Vingt-Sept au titre du plan de relance après la période Covid.
Selon Mario Draghi, l’Europe va devoir investir « massivement » et mobiliser de nouveaux financements publics et privés. Selon lui, l’UE doit réfléchir à « la façon de financer ces besoins d’investissement » en mobilisant « pas seulement de l’argent public, mais aussi l’épargne privée de façon beaucoup plus importante que par le passé ».
La compétitivité européenne en question
L’économie européenne connaît un ralentissement économique lui faisant échapper de peu à la récession en fin d’année dernière, avec une croissance de 0,5% sur l’ensemble de 2023. « L’économie de la zone euro stagne globalement depuis la fin de l’année 2022 et a perdu beaucoup de terrain par rapport aux États-Unis ces dernières années », estime Bert Colijn, économiste pour la banque ING. L’Europe est entrée, selon lui, « dans une phase de faiblesse prolongée ».
Pour Pieter Omtzigt, la dégradation de la compétitivité européenne est la conséquence d’une « pression réglementaire que l’UE a exercée sur l’économie européenne » au cours du mandat d’Ursula von der Leyen. En cause, le Green Deal qui a pesé davantage sur la compétitivité, dans un contexte international de guerre entre l’Ukraine et la Russie.
« Nous pensons toujours qu’il s’agit d’une loi mal rédigée (…) On met en place des règles bureaucratiques supplémentaires pour nos agriculteurs » au moment où la production alimentaire est sous pression, s’était alarmé fin février l’Allemand Manfred Weber, président du groupe PPE au Parlement européen, au moment d’un nouveau vote pour le Pacte vert.
Le pari risqué du Green Deal européen
La Commission européenne a dévoilé début février ses recommandations pour l’objectif climatique 2040 de l’UE, feuille de route pour la poursuite du Pacte vert. Les Vingt-Sept s’étaient déjà fixé comme objectif de réduire de 55% leurs émissions de gaz à effet de serre d’ici à 2030 par rapport à 1990, visant la neutralité carbone en 2050.
En un temps record durant le mandat d’Ursula von der Leyen, les Vingt-Sept ont adopté trente-deux législations – de la fin du moteur thermique en 2035 à la mise en place d’une taxe carbone aux frontières, alors qu’il en reste encore une quarantaine concernant l’environnement et la biodiversité.
La prochaine Commission, constituée à l’automne après les élections européennes, devra soumettre une proposition législative à l’ensemble des États et eurodéputés, pour débattre avant la COP30 de 2025 de la nouvelle réglementation sur les transports, les énergies renouvelables et le marché du carbone. Bruxelles évoque déjà des besoins totaux d’investissement avoisinant 1.530 milliards d’euros annuels sur la période 2031-2050.
Dans le cadre du Pacte vert actuel, la nouvelle Politique agricole commune (PAC), adoptée en 2021 et premier poste du budget de l’UE, s’applique depuis janvier 2023. Elle conditionne le paiement des aides directes aux exploitations au respect de normes environnementales. À peine quelques mois plus tard, nombre d’agriculteurs se sont plaints de paiements en retard, car suspendus à des contrôles jugés tatillons sur le terrain. La législation imposant une réglementation de restauration des écosystèmes abîmés, texte-clé du Pacte vert européen, qui est inapplicable sur le terrain.
Trop de normes, moins de productivité
Le Pacte vert, projet initialement fédérateur, polarise maintenant les contestations : craintes sur l’impact socio-économique, colère agricole et appels à une « pause » réglementaire des pays membres.
« Le Pacte vert est notre nouvelle stratégie de croissance », lançait en 2019 Ursula von der Leyen. Cinq ans plus tard, le ton a changé : industriels et agriculteurs dénoncent le « fardeau » normatif.
« C’est facile de fixer des cibles, plus ardu de concrétiser la transition : l’UE ne doit ne pas inventer des instruments faisant des agriculteurs des ennemis du climat, et personne ne s’occupe des familles à faibles revenus qui travaillent dur et ont une vieille voiture », a tancé l’eurodéputé allemand PPE Peter Liese en mars 2024 à l’adresse de la présidente de la Commission.
« Bruxelles doit abandonner sa position extrémiste et idéologique : l’industrie et l’agriculture ne peuvent être pénalisées par des objectifs environnementaux inatteignables », a martelé le vice-Premier ministre conservateur italien Antonio Tajani.
Devant ses difficultés, Ursula von der Leyen a appelé à une nouvelle phase du Pacte vert axée sur la compétitivité, sans toutefois remettre en question les objectifs du Pacte vert et la pression réglementaire insoutenable qu’ils impliquent.
L’importance des élections européennes et d’un nouveau « pacte industriel »
Ce que reproche Pieter Omtzigt à la Commission européenne est de ne pas considérer que les élections européennes ont un rôle majeur à jouer dans le choix de la politique européenne lors du prochain mandat. Pour un sujet aussi important, les conclusions du rapport Draghi ne seront connues qu’après les élections alors qu’elles vont impliquer un plan d’investissement massif qui va impacter directement la vie des Européens.
Mais le nouvel environnement économique, impliquant une hausse des taux d’intérêt, le retour de l’inflation et le ralentissement de l’activité qui touchent déjà durement la vie quotidienne des citoyens et des entreprises, est moins propice à une volonté de poursuite du Pacte vert. À côté de ce Green Deal, un « Pacte industriel » a été réclamé par environ 600 entreprises signataires de la « déclaration d’Anvers » en février 2024, demandant des « mesures correctives » dans les réglementations pour « éliminer les incohérences, les complexités inutiles », en vue « de laisser les entrepreneurs prospérer pour trouver les meilleures solutions ».
Ce serait le signe d’une bonne santé démocratique que de laisser le choix aux électeurs de choisir entre une politique européenne basée sur plus de réglementations ou au contraire une politique européenne moins normatives favorisant le développement industriel et la croissance qui pourraient être ensuite mis au service de l’environnement.
Les opinions exprimées dans cet article sont celles de l’auteur et ne reflètent pas nécessairement celles d’Epoch Times.
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