Lors d’une greffe d’organe, à partir du moment où le prélèvement a eu lieu sur un donneur, une « course contre la montre » s’engage jusqu’à la transplantation. Un exploit rendu possible grâce à la chaîne humaine qui va se déployer durant quelques heures.
Tout commence à Saint-Denis, au nord de Paris, au siège de l’Agence de biomédecine. « C’est ici que se fait la répartition des greffons prélevés » sur des personnes en état de mort encéphalique, environ 1% des décès, explique à l’AFP Géraldine Malaquin, responsable du Pôle national de répartition des greffons (PNRG).
Ce pôle vérifie d’abord que le défunt, qui ne doit pas présenter de contre-indications à une greffe, ne s’était pas inscrit de son vivant au registre national de refus des dons. Une équipe médicale s’assure auprès de ses proches qu’il n’était pas opposé au don de ses organes.
La répartition des organes commence alors. Elle tient compte de l’urgence de la greffe, des caractéristiques biologiques et médicales du malade et des délais de transport auxquels seront soumis les greffons.
10.800 patients en attente
Certains patients sur la liste nationale d’attente sont prioritaires, comme les enfants ou les receveurs dont la vie est menacée à très court terme. Actuellement, quelque 10.800 patients sont en attente active de greffe.
Ce matin-là à l’Agence, cinq organes d’une femme de 45 ans ont été proposés : « son cœur et son poumon ont été pris pour un receveur dont la vie était menacée à court terme », relate à l’AFP Liliane Letaillandier, infirmière de répartition, qui se relaye avec les membres de l’équipe pour que le centre soit opérationnel 24h/24 et 7j/7. « Le lobe gauche de son foie a été accepté pour une urgence pédiatrique, et le droit pour un autre receveur », poursuit-elle.
? Le chiffre est en hausse de 4% , mais le niveau d’avant la crise du Covid n’a pas encore été atteint.
Au 1er janvier 2023, il y avait 10 810 patients en attente. pic.twitter.com/NKJkb6ekA9
— Agence de la biomédecine (@ag_biomedecine) February 7, 2023
Les équipes médicales ont un temps limité pour accepter ou non les organes.
Objectif : réduire au maximum le temps entre le prélèvement et la greffe pour optimiser les chances de réussite de l’opération. Les équipes médicales ont un temps limité pour accepter ou non les organes.
Édouard Sage, chef de service de l’équipe chirurgie thoracique l’hôpital Foch (Hauts-de-Seine) fait partie des chirurgiens transplanteurs de poumons. « Quand je reçois un appel de l’Agence de biomédecine, je regarde si je peux accepter l’organe en fonction de ses caractéristiques connues », dit-il.
Si c’est positif, il envoie une équipe là où se trouve le donneur. Chaque organe est susceptible d’être attribué à un patient qui peut se trouver n’importe où en France.
Reste alors à juger sur pièce. « Quand on arrive sur place, on évalue le greffon, il faut le toucher et le voir ventiler pour être certain que les conditions permettent une transplantation », raconte Thomas Charrier, 29 ans, médecin au service de chirurgie thoracique de Foch, spécialisé dans le prélèvement des poumons.
« Chaque minute est précieuse »
Ce n’est qu’au moment où il donne, au téléphone, le « go » à son responsable, que débute véritablement la greffe.
Le poumon est prélevé. À peu près en même temps, parfois à des centaines de kilomètres, le receveur rentre en salle d’opération pour être endormi.
« À partir du moment où le prélèvement a eu lieu, une course contre la montre débute », décrit Édouard Sage. Suivant l’organe, l’urgence est plus ou moins grande (4 à 5 heures maximum pour un cœur, 6 à 8 pour un poumon, 12 à 18 pour un foie, 18 à 24 pour un rein).
Une fois prélevés, les greffons sont placés dans des glacières hermétiques où la température ne dépasse pas 4°C.
En fonction de la distance à parcourir, le moyen de transport le plus efficace est utilisé : ambulance, train, avion…
« Pour aller plus vite, on fait appel à une escorte policière, chaque minute est précieuse », assure Thomas Charrier.
Le plus souvent, les greffes ont lieu la nuit, quand toutes les équipes sont mobilisables et les blocs opératoires disponibles. Des heures de « tension extrême ». Mais, confie Thomas Charrier, « voir les poumons qu’on a prélevés se reventiler, se recolorer, ça a quelque chose de magique ».
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