Victime de la guerre commerciale lancée par Donald Trump, le constructeur emblématique de motos américaines Harley Davidson a annoncé lundi délocaliser une partie de sa production pour échapper aux tarifs douaniers instaurés par Bruxelles en représailles à ceux de Washington.
La célèbre marque de motos, née il y a 117 ans, a déploré que les taxes douanières européennes soient passées de 6% à 31% sur ses produits entrant sur le marché européen, ce qui renchérit le prix au détail de chaque véhicule de 2.200 dollars.
Depuis le 22 juin, Bruxelles a en effet frappé une série de produits typiquement américains de droits de douane de 25%, des mesures de rétorsion après les taxes infligées par l’administration Trump sur l’acier (25%) et l’aluminium (10%) européens. Ainsi les célèbres motos mais aussi les jeans, le bourbon ou encore le beurre de cacahuètes sont dans le collimateur de Bruxelles.
Certains de ces produits semblent être savamment ciblés par l’UE parce qu’ils sont fabriqués dans des Etats politiquement proches de Donald Trump. C’est le cas de Harley-Davidson dont le siège est à Milwaukee (Wisconsin), l’Etat de Paul Ryan, le chef des républicains à la Chambre des représentants Paul Ryan.
« Voilà une nouvelle preuve des dommages entraînés par l’application unilatérale de taxes. La meilleure façon d’aider les travailleurs et manufacturiers américains est de leur ouvrir de nouveaux marchés et pas d’imposer de nouvelles barrières sur leurs propres marchés », a M. Ryan.
Donald Trump a réagi dans un tweet se disant « surpris » que, « de toutes les compagnies américaines », Harley-Davidson qui soit « la première à agiter le drapeau blanc« . « J’ai bataillé dur pour eux et au bout du compte ils ne paieront pas de droits de douane vers l’Europe, Les taxes douanières ne sont qu’un prétexte. Soyez patients », a affirmé le président.
Harley-Davidson qui ne veut pas répercuter l’augmentation des droits de douane sur ses clients au risque de faire plonger ses ventes européennes et de « menacer la viabilité des concessionnaires » a donc annoncé qu’il allait déplacer une partie de sa production. Les motos destinées à l’exportation seront désormais fabriquées dans ses usines internationales hors du territoire américain.
Le groupe, qui vend quelque 40.000 motos par an en Europe, son 2e marché après les Etats-Unis, n’a pas spécifié dans quelles usines il allait transférer sa production ni si cela allait entraîner des réductions d’emplois sur le sol américain. Harley-Davidson a des usines au Brésil, en Inde, en Australie et une en cours de construction en Thaïlande.
La compagnie prévoit que le coût immédiat des tarifs ainsi que les investissements liés au transfert de production affectent les comptes de l’entreprise à hauteur de 30 à 45 millions de dollars pour la fin de l’année 2018. Sur un exercice entier, le coût se chiffrera entre 90 et 100 millions de dollars. Non seulement le constructeur est touché par les taxes sur ses motos mais les droits qui frappent les échanges d’acier renchérissent aussi le coût de cette matière première, avait déjà prévenu en avril le directeur financier du groupe.
Si la marque de motos mythique apparaît comme une victime collatérale de la confrontation commerciale lancée par Donald Trump, l’essoufflement de ses ventes n’est pas nouveau. Elles souffrent d’un vieillissement de la clientèle et de la concurrence des véhicules japonais. Le groupe compte donc beaucoup sur ses exportations pour tenir sa production à flots alors que dans l’ensemble ses ventes ont chuté de 6,7% l’an dernier, dont 8,5% pour les seuls Etats-Unis, son principal marché.
En 2017, Harley-Davidson a vendu 242.788 motos dans le monde, contre 260.289 l’année précédente, et ne prévoit d’en vendre que 231.000 à 236.000 cette année. Au 1er trimestre, ses ventes ont dégringolé de 12% sur les Etats-Unis seuls alors qu’elles ont avancé de 7% sur les marchés européens, du Moyen-Orient et d’Afrique. La compagnie a déjà annoncé au début de l’année la fermeture d’un site à Kansas City (Missouri)et une restructuration de son unité de York en Pennsylvanie.
Le nouveau transfert de sa production à l’étranger devrait prendre de 9 à 18 mois. Ironiquement, Harley-Davidson avait été l’un des premiers groupes manufacturiers à visiter la Maison Blanche en février 2017 pour illustrer la stratégie industrielle de « l’Amérique d’abord » du président Trump, tout juste élu. Le président avait salué « ce fleuron américain » et exprimé sa confiance dans le fait que la compagnie allait augmenter sa capacité industrielle sur le territoire américain.
DC avec AFP
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