Le long et complexe chantier de l’accessibilité pour les personnes handicapées à Paris est mis sur le devant de la scène avec les Jeux paralympiques, la question du métro en tête.
Les dédales de couloirs et escaliers dans des stations le plus souvent dépourvues d’ascenseur, ainsi que les quais non ajustés à la hauteur des trains font du réseau métropolitain un point noir de la mobilité pour les personnes en situation de handicap.
La présidente de la région et de l’autorité organisatrice des transports Île de France Mobilités (IDFM), Valérie Pécresse, en a fait début août le « prochain défi » décennal, et la Ville s’est engagée à plaider en faveur du chantier après les Jeux. « On ne pourra pas mettre le réseau 100% accessible » du fait de contraintes historiques, prévient Pierre Deniziot, conseiller régional et administrateur d’IDFM, mais « là où on peut, il faut le faire ». Près d’un million de Franciliens et parmi eux 8% des 2,1 millions de Parisiens sont en situation de handicap.
À l’approche des Jeux paralympiques (28 août-8 septembre), seules 29 stations de métro sur deux lignes (11 et 14) sont accessibles. Les lignes de tramway et de bus le sont en revanche « à 100% », selon la mairie et IDFM. Sur le réseau francilien (RER, Intercités, TER), quatre stations sur cinq, accueillant 95% du trafic, ont été aménagées pour les Jeux, assure IDFM.
« Nous n’avons le droit à aucune spontanéité »
Pour autant Nicolas Mérille, conseiller national accessibilité chez APF France handicap, dénonce « une ségrégation qui ne dit pas son nom: les personnes en situation de handicap n’ont pas du tout la même vie quotidienne ». « Nous n’avons le droit à aucune spontanéité », avec « toujours partout des ruptures dans nos déplacements », des obstacles dans la rue ou pour accéder aux établissements recevant du public, mais aussi dans les transports, fait-il valoir. Les lignes RER nécessitent des réservations ou de se présenter à un guichet pour être accompagné par des agents.
Le soir « c’est beaucoup plus compliqué », souligne Karim Mimouni, trésorier du Comité régional Île-de-France handisport : « aller boire un verre » ou même « travailler tard » nécessite d’avoir son véhicule ou de faire appel à un taxi aménagé, dont le nombre est passé de 200 à 1000 avec les Jeux. Le service public de transport à la demande PAM peut être réservé 48 heures à l’avance mais manque de personnel, reconnaît IDFM.
Fin septembre, tous les établissements recevant du public (ERP) devront s’être mis en conformité. Mais au niveau national seuls 900.000 sur 2 millions d’ERP ont débuté les démarches, indique le cabinet de la ministre déléguée aux Personnes handicapées démissionnaire Fadila Khattabi. À Paris, ils sont près de 40.000, selon la préfecture de police.
« Plein de lieux ne sont pas accessibles »
La ville a rendu accessible 91% de ses établissements, inaugurant début juillet 17 « quartiers d’accessibilité augmentée » (QAA), avec des parcours spécifiques vers des équipements sportifs, de santé, culturels ou scolaires. S’il salue ce travail, Nicolas Mérille déplore qu’« on n’a qu’à sortir dans son quartier pour voir que plein de lieux ne sont pas accessibles ».
Dans ce contexte, quelles suites aux Jeux olympiques et paralympiques ? Côté sports, « le grand défi qu’on va avoir dans l’héritage de ces Jeux ce sont les horaires », déjà insuffisants pour tous les cours, estime Vincent Lassalle, président du comité départemental handisport de Paris. Plusieurs acteurs espèrent que les Jeux entraînent l’afflux de nouveaux adhérents, valides ou en situation de handicap.
« Pour que ça marche, il ne faudra pas rater le coche »
Paris comptera à la rentrée 50 clubs « para-accueillants », avec une section dédiée, et 3400 licenciés de parasport, indique l’adjoint à la maire en charge du sport et des Jeux Pierre Rabadan. Mais les deux fédérations de handisport (handicap physique ou sensoriel) et sport adapté (handicap mental ou psychique) sont confrontées au défi de l’accompagnement. « Dans l’eau, c’est du un (accompagnant) pour un » sportif qu’il faut mobiliser, décrit M. Lassalle, qui donne des cours de natation dans le XVe arrondissement. Il espère que les Jeux paralympiques « vont donner envie aux gens de s’impliquer ». Et met en garde pouvoirs publics et associations: « Pour que ça marche, il ne faudra pas rater le coche ».
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