Il détient le record de longévité politique en Asie, avec 33 ans au pouvoir: le Premier ministre cambodgien Hun Sen, ex-combattant khmer rouge, se voit en patriarche d’une dynastie, qu’il compte bien installer un peu plus grâce aux législatives de dimanche. Habitué des déclarations fracassantes, l’homme fort du Cambodge a promis « l’enfer » à ses opposants, les invitant à « préparer leurs cercueils » en cas de contestation et assurant vouloir se maintenir au pouvoir « encore pour les deux prochains mandats ».
Devenu Premier ministre en 1985, à seulement 32 ans, il a jusqu’à présent réussi à s’adapter aux vents politiques changeants qui ont secoué le royaume depuis la Guerre froide. « La force d’Hun Sen, je dirais même son génie, est d’avoir survécu à tous les bouleversements », commente pour l’AFP Sam Rainsy, ex-dirigeant de l’opposition en exil en France.
Pour se maintenir au pouvoir, Hun Sen n’a pas hésité à encore davantage museler le pays ces derniers mois, de la presse à l’opposition. Son entourage a fait main basse depuis des années sur de larges pans de l’économie, les autres tombant sous la coupe du puissant voisin chinois. Hun Sen, qui aime parler de lui à la troisième personne, a aussi construit une véritable dynastie: ses trois fils occupent des postes clé au sein du parti au pouvoir et de l’armée et s’investissent à ses côtés dans la campagne électorale.
« La galaxie des Hun Sen, ce que nous appelons l’élite dirigeante du Cambodge qui se compose des forces de sécurité, du parti au pouvoir et de la famille et des proches de Hun Sen, contrôle l’ensemble des institutions cambodgiennes et de larges secteurs de l’économie”, analyse Andrea Girogetta, responsable Asie de la Fédération internationale des droits de l’homme (Fidh).
Enrôlé comme soldat dans l’armée des Khmers rouges
Né le 5 août 1952 dans une famille de paysans du centre du Cambodge, il n’a jamais terminé l’école. A douze ans, il s’installe à Phnom Penh alors que la guerre fait rage au Vietnam. Quatre ans plus tard, il commence à flirter avec le militantisme politique et, lorsqu’en 1970 le Cambodge sombre dans la guerre civile, il est enrôlé comme soldat dans ce qui deviendra l’armée des Khmers rouges, coupable par la suite d’un génocide ayant fait près de deux millions de morts.
Hun Sen a affirmé s’être opposé au régime dès 1975, l’année de la prise de Phnom Penh par les Khmers rouges. Mais il est resté ancré dans le mouvement ultra-maoïste, perdant un œil lors de combats dans leurs rangs et accédant au poste de commandant régional adjoint. En 1976, il épouse une infirmière, Bun Rany. Et, craignant de faire partie d’une prochaine purge, fuit, un an plus tard, vers le Vietnam.
Il revient au pays en 1978, intègre le gouvernement mis en place par Hanoï, gravit rapidement les échelons du pouvoir, puis abandonne le dogme communiste de ses parrains vietnamiens pour embrasser l’économie de marché. En 1993, son parti perd les premières élections du pays organisées par l’ONU. Mais ce fin politique réussit à se maintenir, en étant nommé second Premier ministre au côté du prince Norodom Ranariddh, leader des royalistes qui ont remporté le scrutin.
En 1997, il met fin brutalement à ce partage du pouvoir et écarte Ranariddh. Il ne perdra plus une élection. Hun Sen « fait montre d’une capacité remarquable à dénicher et exploiter les faiblesses de ses adversaires politiques », souligne Sebastian Strangio, expert du Cambodge. « Il joue sur les peurs d’un retour au massacre et à la guerre civile », ajoute-t-il.
« J’ai un message pour ceux qui seraient tentés de s’inspirer des émeutes tunisiennes. Je fermerai les frontières et j’écraserai les chiens », lance Hun Sen au moment des printemps arabes. Chef d’une puissante formation, le Parti du peuple cambodgien (PPC), qui a réussi à étendre son influence dans les zones les plus reculées du pays, il distribue régulièrement des billets de banque aux ouvrières enceintes à la fin de ses meetings, se faisant appeler « oncle ».
DC avec AFP
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