La guerre cognitive menée contre Taïwan par le Parti communiste chinois (PCC) s’articule autour d’un récit central : la théorie du « scepticisme américain ».
Le PCC utilise la théorie du scepticisme américain pour saper la confiance dans les engagements des États-Unis envers Taïwan, en présentant Washington comme un allié peu fiable qui pourrait abandonner la nation insulaire en cas de crise.
Récemment, en raison des défis fondamentaux entourant la position du président Donald Trump sur la guerre russo-ukrainienne et certaines de ses nominations de personnel clé, la théorie du scepticisme américain a fait l’objet d’un battage médiatique important. C’est devenu tellement évident que le 12 mars, Raymond Greene, directeur de l’Institut américain à Taïwan, a accordé une interview exclusive à l’agence de presse taïwanaise SET News pour la réfuter.
M. Greene a fait les remarques suivantes :
• M. Trump est attaché à la paix dans le monde et espère mettre fin à la guerre entre la Russie et l’Ukraine dès que possible. Dans la région indo-pacifique, le président souhaite renforcer la dissuasion afin d’éviter les conflits.
• Il n’y a aucune raison de douter de l’engagement des États-Unis à l’égard de Taïwan et de la région indo-pacifique. La politique américaine à l’égard de Taïwan reste inchangée et Washington s’oppose à toute action unilatérale qui modifierait le statu quo.
• M. Trump a déclaré à plusieurs reprises que les États-Unis ne souhaitaient pas qu’un conflit éclate dans le détroit de Taïwan et pensent qu’une guerre ne se produira pas. Si une guerre devait éclater dans le détroit, elle entraînerait une perte de plus de 10 % du PIB mondial, avec des conséquences encore plus graves que celles de la Seconde Guerre mondiale.
Au cours du premier mandat de M. Trump, le soutien des États-Unis à Taïwan a été le plus fort depuis la visite du président Richard Nixon en Chine en 1972. Par exemple, M. Trump a approuvé 11 ventes d’armes à Taïwan, pour un montant total de plus de 18 milliards de dollars. Ces contrats comprenaient des systèmes d’armes avancés que Taïwan n’avait pas pu acquérir pendant des décennies, ce qui a considérablement renforcé ses capacités de défense.
Aujourd’hui, deux mois seulement après le début de son second mandat à la Maison-Blanche, M. Trump a déjà pris une série de mesures qui ont provoqué une onde de choc dans le monde entier. Les déclarations de M. Greene sont exactes et crédibles : la théorie du scepticisme américain n’a pas sa place.
Prenons par exemple l’approche de M. Trump vis-à-vis de la guerre entre la Russie et l’Ukraine. Il a ajusté sa politique à l’égard de la Russie, ce qui a poussé l’Union européenne à lancer le plan ReArm Europe, d’une valeur de près de 1000 milliards de dollars, en transférant le fardeau de la défense de l’OTAN des États-Unis vers les nations européennes. Ce transfert permet aux États-Unis de réorienter davantage de ressources et de puissance militaire vers l’Indo-Pacifique, renforçant ainsi la dissuasion face à leur plus grand adversaire, le PCC.
D’un point de vue stratégique, Taïwan en bénéficie grandement. La stratégie de M. Trump à l’égard de la Chine ne consiste pas à trouver un moyen d’aider Taïwan après le déclenchement d’une guerre, mais à empêcher le PCC d’envisager une attaque en premier lieu. Selon L’art de la guerre de Sun Tzu, la meilleure forme de guerre consiste à vaincre la stratégie de l’ennemi avant le début de la bataille ; c’est un mouvement stratégique sur l’échiquier.
Quiconque utilise la médiation de M. Trump dans la guerre entre la Russie et l’Ukraine pour promouvoir la théorie du scepticisme américain est soit partial, soit animé d’arrière-pensées.
Les partisans de la théorie du scepticisme américain citent souvent une affirmation tirée de « The Room Where It Happened », (La pièce où ça s’est passé), un mémoire publié en 2020 par l’ancien conseiller à la sécurité nationale de M. Trump, John Bolton. Selon M. Bolton, M. Trump, sous l’influence des financiers de Wall Street qui tiraient profit de leurs investissements en Chine, était « particulièrement dyspeptique » à l’égard de Taïwan. M. Bolton a écrit que M. Trump comparait souvent Taïwan à la pointe de son stylo et la Chine à son bureau.
Mais cette affirmation doit être examinée de près.
Premièrement, le mandat de M. Bolton en tant que conseiller à la sécurité nationale a été bref (d’avril 2018 à septembre 2019), et les deux hommes ont eu une relation houleuse. Deuxièmement, même si M. Trump a effectivement fait la remarque d’assimiler Taïwan à la pointe de son stylo, cela ne signifiait pas qu’il abandonnerait Taïwan. Certains l’interprètent différemment – comme le dit le proverbe, « la plume est plus puissante que l’épée ». Taïwan est peut-être petit, mais sa valeur stratégique n’en est pas moins importante pour les États-Unis. Taïwan joue en effet un rôle essentiel dans la région indo-pacifique.
C’est ainsi que M. Greene a déclaré à la chaîne taïwanaise SET News que « les États-Unis ne peuvent pas maintenir seuls la paix dans la région indo-pacifique ». « Nous avons besoin que nos alliés et partenaires, dont Taïwan, participent activement à cet effort », a-t-il souligné.
Considérez ceci : la politique à l’égard de Taïwan est une question de grande importance et les décisions prises par le gouvernement américain à ce sujet sont entourées de la plus grande prudence. Comment une simple affirmation non vérifiée peut-elle soudainement inciter les gens à rejoindre le camp du scepticisme américain ? N’est-ce pas là un exemple classique de manipulation ? Ne devrions-nous pas adhérer à un ancien dicton chinois concernant l’administration Trump : « Regardez ce qu’ils font, pas seulement ce qu’ils disent » ?
Certains tentent également de promouvoir la théorie du scepticisme américain en pointant du doigt les remarques faites par les personnes nommées par M. Trump.
C’est le cas de Darren Beattie, qui a été nommé le 4 février dernier sous-secrétaire d’État par intérim à la diplomatie publique. En mai 2024, Darren Beattie a publié des remarques controversées sur la plateforme de médias sociaux X, mais ces propos ont été tenus avant qu’il ne soit nommé à son poste actuel.
« Taïwan appartiendra inévitablement à la Chine, ce n’est qu’une question de temps », avait-il écrit. « Inutile de dépenser des capitaux pour l’empêcher. Un homme d’État visionnaire le reconnaîtra et passera un accord – en échange de la reconnaissance de cette réalité fondamentale, il obtiendra de sérieuses concessions sur l’Afrique et l’Antarctique [sic]. »
Une autre nomination importante est celle d’Allison Hooker, que M. Trump a nommée au poste de sous-secrétaire d’État aux Affaires politiques, la troisième fonction la plus élevée au sein du département d’État. Mme Hooker s’est rendue à Taïwan en avril dernier et a rencontré la présidente de l’époque, Tsai Ing-wen. Sa nomination suggère-t-elle que l’administration Trump soutient l’indépendance de Taïwan ?
Il y a ensuite Austin Dahmer, qui a été nommé sous-secrétaire adjoint à la Défense pour la politique. Les médias d’État chinois et certains médias taïwanais ont fait circuler le message de M. Dahmer sur les réseaux sociaux, dans lequel il a écrit : « Les Américains pourront continuer à être en sécurité, à prospérer et à être libres si/quand Taïwan tombe(ra) ». Ils suggèrent que ce message représente la position de l’administration Trump. Mais est-ce bien le cas ?
L’Asia Fact Check Lab (AFCL) de Radio Free Asia a enquêté et découvert que M. Dahmer avait fait ces remarques en août de l’année dernière, avant même d’être nommé fonctionnaire de la défense, ce qui signifie qu’elles ne représentent pas la position officielle de l’administration. En outre, cette déclaration faisait partie d’une série de messages invitant Taïwan à assumer une plus grande responsabilité pour sa propre défense, ce qui a été déformé dans les rapports chinois et taïwanais. L’AFCL a conclu que « présenter les anciennes remarques en ligne de M. Dahmer, faites avant qu’il ne devienne fonctionnaire de la défense, comme un ‘signal’ de la nouvelle administration pourrait induire le public en erreur ».
La réalité est que le cabinet actuel du président Trump est rempli de faucons anti-Chine qui adoptent une position dure à l’égard du PCC ; leur position est claire. Même si certains individus ont des points de vue différents, c’est un aspect normal de la gouvernance, qui ne change pas la stratégie globale de l’administration. La diversité des perspectives peut rendre les décisions politiques plus rationnelles et plus pratiques.
En bref, qu’il s’agisse de la médiation de M. Trump dans la guerre entre la Russie et l’Ukraine, de ses commentaires sur Taïwan ou de ses nominations, rien ne vient étayer la théorie du scepticisme américain. Ceux qui défendent cette thèse sans preuves solides ni analyse rationnelle, et avec une rhétorique excessive – que ce soit intentionnel ou non – contribuent effectivement à la guerre cognitive du PCC contre Taïwan.
Les opinions exprimées dans cet article sont celles de l’auteur et ne reflètent pas nécessairement celles d’Epoch Times.
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