Le 30 août 2003, un peu plus de 700 coureurs s’élançaient de Chamonix à l’assaut d’un invraisemblable tour du Mont-Blanc en solitaire. Au cœur de la nuit savoyarde, ils participaient au premier Ultra-trail du Mont Blanc (UTMB), aventure épique ayant marqué l’histoire de la course en montagne.
« Cela commençait mal, la météo était très mauvaise. Je suis parti en me disant que j’abandonnerai rapidement car je n’étais déjà plus tout jeune », se souvient René Bachelard, l’un des fondateurs de l’UTMB, désormais âgé de 91 ans.
À quatre heures du matin, sous un ciel couvert et une pluie battante, cet ancien général de l’Armée française, président du club de trail de Chamonix, démarre sa foulée devant une poignée de curieux venus assister au départ de l’événement, imaginé initialement comme une « petite course familiale ».
« C’était comme ça, à la bonne franquette… il n’y avait pas de musique, pas de GPS pour suivre les coureurs à la trace et, en tant que bénévoles, on s’étaient occupés du balisage des 150 km du parcours nous-mêmes », raconte-t-il.
Un short court et un simple t-shirt
Malgré la neige qui tombe sur les parties les plus hautes du parcours à 2000 mètres d’altitude, la plupart des athlètes sont venus sur la ligne vêtus d’un short court et d’un simple t-shirt. Nombreux n’ont jamais couru une telle distance. Certains ne connaissent même pas la région, mais l’envie de découverte est trop forte dans le groupe de 722 partants.
« Je n’ai pas trop réfléchi. C’était plus le fait de partir à l’aventure, plutôt que de faire du trail », explique désormais le Népalais Dawa Sherpa, premier vainqueur de l’UTMB à l’âge de 33 ans. « À l’époque personne ne connaissait vraiment ses capacités sur une telle distance, ni celle des autres d’ailleurs. On était quand même plusieurs à avoir des capes de pluie, mais ça ne protégeait pas de la grêle », relève cet ancien guide de haute montagne, installé en Suisse depuis le milieu des années 1990.
Désorientés par l’obscurité, lâchés par leur unique lampe frontale, frigorifiés par 10 degrés de moins en altitude ou usés par les dénivelés important, des coureurs lâchent prise : plus de 300 d’entre eux décident de s’arrêter dans la ville italienne de Courmayeur, à la moitié du parcours. « J’étais étonné d’être arrivé jusque-là. J’avais mal partout pendant la nuit, mais j’ai continué d’avancer jusqu’à Courmayeur. Le paysage était si beau dans la descente », affirme René Bachelard, qui fait partie de ces derniers.
« Je me sentais plutôt bien »
À Champex, à une trentaine de kilomètres de l’arrivée et alors qu’une deuxième nuit sans sommeil se profile pour les plus lents, 152 autres coureurs exténué jettent l’éponge… mais pas Dawa Sherpa. « Je considérais chaque montée l’une après l’autre et je me sentais plutôt bien… À Champex, j’ai réussi à avaler des pâtes et j’ai repris mon chemin, surtout inquiet pour les autres à cause de la météo », avance-t-il. Il franchit la ligne en 20 heures, 5 minutes et 39 secondes aux alentours de minuit à Chamonix « accompagné des enfants du village » qui couraient avec lui, « un souvenir inoubliable ».
Michel Poletti, fondateur de la course et futur directeur de l’événement, fait également partie des 67 finishers de cette première édition, tandis que la traileuse américaine Krissy Moehl remporte la catégorie femmes en 29 heures, 38 minutes et 24 secondes.
Après cette épopée, la popularité de la course explose rapidement et les organisateurs reçoivent 1400 demandes de participation l’année suivante. « C’était dans l’ère du temps, les sportifs voulaient redécouvrir la montagne, mais on n’avait jamais imaginé que cela allait devenir l’équivalent de la Coupe du monde du trail », dit René Bachelard. Et pourtant. Vingt ans plus tard, des milliers de personnes s’apprêtent à leur tour à partir à la conquête de cette course de l’extrême, devenue le graal d’une discipline toujours plus populaire.
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