Les Îles de la Madeleine, un petit paradis québécois

8 mai 2016 08:31 Mis à jour: 8 mai 2016 08:31

Voyager aux îles de la Madeleine, c’est s’offrir un dépaysement total : horizon toujours dégagé, longues dunes dorées, plages à l’infini, falaises de grès rouges léchées par une mer frémissante, collines verdoyantes et une kyrielle de maisonnettes colorées. C’est aussi la rencontre fascinante avec une culture originale qui fait la fierté des Madelinots, descendants d’Acadiens.

Pour d’aucuns, cet archipel d’une douzaine d’îles et d’îlots a la forme d’un hameçon comme pour mieux appâter le voyageur, d’autres y voient un croissant pour aiguiser la gourmandise. Sept d’entre elles sont habitées, six sont reliées par des cordons dunaires enserrant des lagunes, et toutes sont autant de perles précieuses d’un chapelet flottant au large du golfe du Saint-Laurent. Chacune est un monde avec sa personnalité et de partout on voit la mer et on l’entend chanter.

Un bout du monde

Les Madelinots tiennent à leur autonomie, il faut vouloir aller jusque chez eux. Depuis Montréal, le vol est aisé même s’il se fait à sauts de puce en passant par Québec puis Gaspé. Rien de tel pour plonger dans l’ambiance bavarde des îliens, nombreux à voyager entre le continent et leur terre. De quoi s’immerger d’emblée dans cet accent décapant qui donne à leur langage une tonalité unique à laquelle il faut s’habituer pour en saisir toutes les nuances ! Même le fuseau horaire est différent, ils vivent à l’heure de l’Atlantique, décalés du continent. D’ailleurs un Madelinot est d’abord un Acadien, ensuite un Québécois, accessoirement un Canadien et dans la plupart des jardins flotte un drapeau acadien tricolore aux couleurs de la France mais piqué d’une étoile jaune.

Comme son nom l’indique, Havre-aux-Maisons regorge de maisons traditionnelles plus colorées les unes que les autres, ce qui renforce son caractère champêtre. (Charles Mahaux)

Ce sont les Acadiens, chassés de leur patrie en 1755, qui se réfugièrent aux îles de la Madeleine et y jetèrent les bases d’un peuplement permanent. D’autres nationalités y ont contribué également, autant de réfugiés en quête de terre, chassés de chez eux par la révolution écossaise, la révolution américaine, la famine de la patate irlandaise, la révolution française. Dix ans plus tard, un amiral britannique de triste mémoire obtient les îles en concession à perpétuité. Il soumet les insulaires à un régime féodal, exigeant le paiement d’un loyer annuel sous la forme de deux quintaux de morue. À cette sujétion s’ajoute celle exercée par les marchands jersiais, britanniques et canadiens auprès de qui les pêcheurs s’approvisionnaient et s’endettaient sur le produit de leur pêche. Il faudra attendre 1895 pour que les Madelinots puissent enfin racheter les lots de terres qu’ils avaient défrichés. Ils n’en restent pas moins très attachés à leur histoire et à leurs coutumes rythmées par les saisons de la pêche, aujourd’hui très réglementée. Les quotas sont draconiens, il faut sauver les espèces et l’assurance chômage compense les mois d’inactivité durant les longs mois d’hiver.

Les îles ne se reposent jamais

Aux îles, le vent du large fait partie du paysage. Omniprésent, il ébouriffe les visages, balaye l’archipel et accompagne l’inlassable ressac des vagues qui grignotent inexorablement les falaises pour les transformer en langues de sable. L’Atlantique ne cesse de faire et de défaire le paysage, redessinant des champs de dunes qui cèdent au vent jusqu’à alimenter d’autres plages où l’ammophile, une herbe qui ne craint ni les embruns, ni l’ensablement va peu à peu fixer les dunes et les coloniser. Les couleurs contrastées du grès rouge et du sable blond font toute la beauté des plages où les familles aiment à se protéger des ardeurs du soleil à l’ombre des étranges cavernes creusées dans les falaises par la mer.

Le vent fait aussi le bonheur de tous les fans de jeux aéro-tractés : cerf-volant, kitesurf, voile, etc. et offre de beaux défis aux plus audacieux. Sans doute n’est-ce pas Hawaï mais avec ses 300 km de plages de sable, toutes les conditions sont réunies pour que kiteux ou autres véliplanchistes débarquent dans les villages. La rencontre improbable entre ces sportifs basanés et les vieux pêcheurs pour échanger sur la force des vents n’en a que plus de charme.

Sur les buttes verdoyantes s’éparpillent des maisons de bardeaux de cèdre peints de rouge vif, de bleu pervenche ou de vert anis. Leurs couleurs chatoyantes rappellent qu’elles étaient jadis un repère visuel pour les marins. Les récifs, les bancs de sable et les vents violents ont causé naguère de nombreux naufrages faisant des îles le second cimetière marin en Amérique du Nord avec quelque 300 épaves gisant encore sur les fonds marins.

La Grave est une mince bande de terre s’avançant dans la mer refermant le havre naturel où sont le port de Havre Aubert, sa marina et la dune du Sandy Hook. (Charles Mahaux)

Un réservoir d’artistes

Une route unique, la 199, parcourt le chapelet d’îles sur toute sa longueur, à peine 85 km de part en part. L’occasion de longer les étroites dunes qui tracent les liens entre les îles et d’observer les phoques et les oiseaux aquatiques. Des routes secondaires permettent de découvrir des vues panoramiques à couper le souffle entre le bleu de la mer, les côtes déchiquetées et les collines verdoyantes piquées de maisonnettes multicolores.

À chaque île son décor et ses habitudes. À Havre-Aubert, on y vient pour son site historique de la Grave, une plage de galets dotée d’un petit port de plaisance et bordée d’échoppes artisanales installées dans d’anciennes maisonnettes de pêcheurs. À l’entrée du village, la boutique des Artisans du Sable propose des réalisations originales grâce à une technique de compactage qui rend le sable dur comme de la pierre, de quoi le sculpter ou le tourner pour créer des jolis souvenirs abstraits ou figuratifs à ramener des îles. À Havre-aux-Maisons, une ancienne école reconvertie en atelier donne à découvrir des souffleurs de verre au travail. Plus loin, le Fumoir d’Antan est l’ultime rescapé de la crise de la surpêche des années 1970. On y fume comme jadis le hareng mais aussi des crabes, des pétoncles, du saumon, du fromage et même du malt pour alimenter la microbrasserie de Cap-Aux-Meules qui porte le nom évocateur de À l’Abri de la Tempête, un lieu qui concentre le meilleur de l’archipel avec des bières en bouteille ou en fûts.

On s’étonne de tant de créativité mise au service du Bon Goût Frais des Iles, un label qui assure une production biologique et authentiquement madelinienne avec toujours le parfum du grand large dans l’assiette ou dans le verre. Ailleurs ce sont les artistes de tout poil qui exposent leurs diverses créations. Une manière de s’évader au-delà de l’horizon dans une petite île entourée d’immensité. L’hiver, la vie s’arrête, la circulation fige chacun dans son île en attendant le retour de la saison du homard ou du tourisme qui apporte le plaisir de voir de nouvelles « faces » comme on dit par ici.

Christiane Goor, journaliste. Charles Mahaux, photographe. Un couple, deux expressions complémentaires, ils fixent l’instant et le racontent. Leur passion, ils la mettent au service du voyage, de la rencontre avec l’autre.

 

INFOS PRATIQUES

Infos : www.quebecmaritime.ca comprend les 4 régions touristiques de l’Est du Québec : le Bas-Saint-Laurent, la Gaspésie, la Côte-Nord et les îles de la Madeleine.

www.quebecoriginal.com couvre tout le Québec.

Y aller : Pour ceux qui aiment l’indépendance, le plus simple est d’y aller en avion et d’y vivre au moins 4 jours en louant à l’aéroport un véhicule pour flâner d’une île à l’autre. Une autre formule de découverte est proposée à bord du CTMA www.croisierectma.ca soit huit jours de croisière thématique pour un aller-retour au départ de Montréal, avec des escales à Chandler avec forfait découverte de Percé et à Québec. Trois journées sont consacrées à la découverte de l’archipel. Attention les cabines sont très petites et n’offrent pas le confort des croisières fluviales européennes. Par contre l’équipage de Madelinots se met en quatre pour vous faire partager leur passion pour leur archipel et tous les produits des îles sont à l’honneur. Si vous voyagez au Québec en voiture, vous pouvez aussi joindre les îles en 6h par Souris avec le traversier, voyage très confortable et qui vous donne l’occasion de circuler à votre guise aux îles www.traversierctma.ca

Y loger : Rien de tel que de multiplier les expériences entre le nord et le sud de l’archipel. Incontournable dans l’île de Grande Entrée qui abrite le plus grand port de pêche au homard du Québec, La Salicorne www.salicorne.ca, une auberge champêtre ouverte à l’année et campée sur une butte les yeux rivés sur le grand bleu. L’ambiance y est conviviale, la table excellente et le programme d’activités variées entre randonnées guidées, visite des communautés et excursion nautique en compagnie d’un pêcheur du cru. On y trouve aussi un centre d’interprétation du phoque, une visite essentielle pour mieux appréhender la vie des Madelinots. Une autre étape idéale pour se ressourcer sur l’île de Havre-Aubert, plus précisément à l’Anse-à-la-cabane, à Havre sur Mer www.havresurmer.com, une adresse au charme discret avec une vue panoramique sur la mer et un accès direct à la plage.

Y manger : les adresses sont nombreuses pour découvrir le fameux bon goût frais des îles. À retenir toutefois la boutique de Johanne Vigneau Gourmande de Nature dans le chemin de l’Étang du Nord dans l’île de Cap-aux-Meules www.gourmandedenature.com, une adressé dédiée aux plaisirs culinaires et à la gourmandise, d’autant que la propriétaire est aussi celle qui préside aux fourneaux de La Table des Roy www.restaurantlatabledesroy.com, une table gastronomique d’exception au service du terroir. Réservation conseillée ! À Havre-Aubert, dans un cadre d’auberge à l’ancienne dans une jolie maison jaune pissenlit, Auberge chez Denis à François

www.aubergechezdenis.ca.

Attention : pour préserver les écosystèmes, veillez à trier les déchets, économiser l’eau et évitez de piétiner les dunes en dehors des sentiers.

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