OPINIONS

Infiltrer les esprits : l’avenir de la guerre cognitive

Pékin s'est donné pour mission centrale de conquérir le domaine cognitif sur son territoire et dans le monde entier.
octobre 20, 2023 1:58, Last Updated: octobre 22, 2023 11:23
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Comme le dit James Giordano, expert en biosécurité, « le cerveau est le champ de bataille de l’avenir », et selon lui, aucun gouvernement n’est aussi déterminé à contrôler l’esprit des gens que le Parti communiste chinois (PCC).

Si l’on en croit certains rapports récents et tout à fait crédibles, Pékin s’est donné pour mission principale de conquérir le domaine cognitif, non seulement dans son pays, mais aussi dans le monde entier. Après tout, la société n’est rien d’autre qu’un ensemble d’esprits. Contrôler les esprits, c’est, à bien des égards, contrôler le récit global.

Selon le professeur de neurologie et directeur du programme de neuroéthique au centre médical de l’université de Georgetown, la guerre cognitive a deux dimensions principales.

La première, note-t-il, consiste à accéder aux « systèmes et mécanismes neurologiques qui ont été identifiés comme étant opérationnels et fonctionnellement participatifs dans les processus cognitifs individuels et collectifs ». En d’autres termes, il s’agit d’accéder aux parties du cerveau qui régissent la prise de décision et les modèles de comportement.

Le second domaine « fait appel à une approche plus indirecte ou implicite qui utilise une variété d’approches environnementales pour affecter les perceptions, les croyances, les attitudes, les valeurs et les comportements individuels et collectifs », explique-t-il.

Il suggère que cela pourrait impliquer la manipulation de « divers signes et symboles, contenus, constructions et contextes narratifs, et même la manipulation directe de l’environnement et de l’écologie ».

Prenons l’exemple des réseaux sociaux, qui ne sont guère plus qu’une collection de symboles (emojis, etc.), de contenus (vidéos, photos, etc.), de constructions (problèmes encadrés, solutions, etc.) et de « contextes narratifs » (subjectifs, objectifs, etc.). Les campagnes d’influence pro-Chine ont déjà infiltré les plateformes de médias sociaux et divers sites d’information, et M. Giordano s’attend à ce que cette agression s’intensifie par nature, surtout à 12 mois de l’élection présidentielle américaine.

Ces deux dimensions, souligne-t-il, « ne s’excluent pas mutuellement ». Une attaque efficace, ajoute-t-il, implique l’utilisation « à la fois du premier concept (engagement neurocognitif) et du second (engagement cognitif socioculturel) ».

Selon lui, les gens doivent se préparer à une combinaison d’opérations psychologiques avancées et à une manipulation plus poussée de TikTok, une application extrêmement populaire utilisée des millions de gens.

« TikTok, ainsi que certaines formes plus sophistiquées d’intelligence psychologique collective, d’évaluation et d’engagement, sont et seront de plus en plus utilisés pour exercer une influence sur les récits », prédit-il.

Bien que les méthodes utilisées par le PCC pour manipuler nos esprits soient de plus en plus innovantes, cela fait des siècles que les théoriciens chinois discutent de l’importance de la guerre cognitive. Sun Tzu est sans doute le plus grand stratège militaire de tous les temps. Il a parlé en détail de la nécessité de conquérir l’esprit des ennemis à distance, sans jamais faire couler de sang.

Plus récemment, en 2003, l’Armée populaire de libération (APL), principale force militaire du PCC, a identifié « trois batailles » à gagner. La première bataille consiste à façonner l’opinion publique. Pékin veut influencer les débats nationaux et internationaux et dicter le cours de récits très spécifiques (Taïwan, Inde, relations avec les États-Unis, etc.). Le deuxième aspect concerne la guerre psychologique : la nécessité d’appliquer les leçons de Sun Tzu, non seulement à l’intérieur du pays, mais aussi à l’étranger. Le troisième aspect concerne l’utilisation de la guerre juridique : signature de traités avec des pays alliés, influence sur des organisations critiques telles que l’ONU, l’OMS et l’OTAN, etc.

Récemment, grâce aux progrès rapides de la technologie, Pékin a consacré plus de temps à la deuxième des trois batailles : la guerre psychologique. En effet, comme indiqué au début de cet article, l’esprit est désormais considéré comme un champ de bataille vital, peut-être le plus vital de tous.

En 2020, manifestement inspiré par les travaux de Sun Tzu, un universitaire chinois du nom de Guo Yunfei a rédigé un article détaillé décrivant les moyens par lesquels Pékin pourrait conquérir l’ennemi sans jamais avoir à se battre. Le ciblage du cerveau, selon l’universitaire, devrait être considéré comme l’objectif principal de l’armée. Coïncidence ou non, la suggestion de Guo est arrivée à peu près au même moment où Pékin a commencé à se concentrer sur la guerre « intelligentisée », une forme d’attaque en évolution rapide qui combine des formes plus traditionnelles de guerre cognitive avec le domaine émergent de l’IA. À l’heure où j’écris ces lignes, c’est la Chine, et non les États-Unis, qui mène la course à l’IA.

M. Giordano, l’un des universitaires américains les plus qualifiés pour s’exprimer sur l’avenir de la guerre, considère la Chine comme le principal acteur de la bataille pour les esprits américains.

« À l’heure actuelle, note-t-il, la Chine consacre beaucoup d’efforts aux sciences neurocognitives, avec une orientation explicite et implicite vers des utilisations perturbatrices de la science et de la technologie, de diverses manières qui tirent parti des capacités chinoises et de l’hégémonie – sur le plan économique et environnemental, ainsi que dans les scénarios militaires et de renseignement qui permettent au pays d’exercer son pouvoir sur la scène internationale.

L’ascension scientifique et technologique continue de la Chine devrait préoccuper les décideurs politiques aux États-Unis et ailleurs, estime-t-il.

Bien sûr, il a raison. Les guerres de demain ne seront pas gagnées par les pays possédant les plus gros fusils ou les chars les plus coûteux ; elles seront gagnées par les nations disposant des meilleurs outils pour débloquer, modeler et manipuler l’esprit humain. Le PCC a l’intention de gagner cette guerre.

Les opinions exprimées dans cet article sont celles de l’auteur et ne reflètent pas nécessairement celles d’Epoch Times.

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