Jean-Pierre Colombies a exercé le métier de policier pendant plus de trente ans. Pendant sa carrière, il a notamment travaillé à la brigade criminelle et à la brigade des stupéfiants du SRPJ de Marseille.
Une expérience qui lui permet de porter un regard acéré sur la situation sécuritaire du pays, alors que ces dernières semaines ont été marquées par plusieurs fusillades liées au trafic de drogue, mais aussi par le meurtre de Philippine, une étudiante de 19 ans dont le corps a été retrouvé dans le bois de Boulogne fin septembre.
Du meurtre de Lola à celui de Philippine : l’exécution des OQTF en question
Taha Oualidat, le suspect du meurtre de la jeune femme, est un Marocain de 22 ans déjà condamné pour viol et sous le coup d’une Obligation de quitter le territoire français (OQTF) au moment des faits.
« Nous l’avons laissé libre, ce qui est une aberration totale. Jamais on n’aurait dû laisser ce type dehors. Le premier réflexe qu’il a n’est pas une démarche d’assimilation au territoire français, à la nation française, à la société française, c’est au contraire d’agresser », souligne Jean-Pierre Colombies.
« Nous sommes dans l’aberration la plus absolue, la révolte la plus viscérale qui soit car cette jeune fille, qui ne faisait de mal à personne, qui était au contraire, d’après tous les témoignages que l’on a, la bonté même, croise le chemin d’une bête sauvage et perd la vie », ajoute-t-il.
« Il y a quelque chose d’assez cynique dans ce système qui ne protège pas notre propre société, nos ressortissants et nos ressortissantes en l’occurrence, parce que nous avons beaucoup de viols, et malheureusement beaucoup de cas d’étrangers, de migrants, de types en situation irrégulière. Ne voyez pas de connotation raciste dans ce que je vous dis, c’est seulement factuel », poursuit l’ancien policier.
Si le meurtre de Philippine – survenu près de deux ans après celui de Lola, une adolescente de douze ans dont le corps avait été retrouvé dans une malle à Paris en octobre 2022 et dont la meurtrière présumée, Dahbia Benkired, est une ressortissante algérienne visée par une OQTF au moment des faits – a relancé le débat sur le taux d’exécution des OQTF, qui atteignait à peine 7% en 2022, Jean-Pierre Colombies fustige « un système totalement kafkaïen » et estime que les étrangers en situation irrégulière « dont le seul objectif est d’être des parasites et des délinquants, voire des criminels sur notre territoire » doivent être expulsés sans délai.
« La France n’a pas une propension naturelle à conserver tous les pervers de la planète. Et s’ils peuvent aller exercer leur perversité ailleurs, ce ne serait pas plus mal », affirme l’ancien commandant de police.
« Cela dit, il n’y a pas que des étrangers qui sont des pervers sexuels. Il faut remettre les pendules à l’heure. Mais nous en avons déjà suffisamment qui sont bien de chez nous, entre guillemets, pour accepter des pervers de tous les horizons. »
Selon lui, le sujet des OQTF et du contrôle des frontières mériterait d’ailleurs « un débat apaisé avec des gens sensés, des gens intelligents », hors des postures idéologiques incarnées par certains membres de la classe politique.
« Nous avons des politiciens qui n’ont pas de courage et des politiciens totalement démagogiques qui ne veulent pas aborder le sujet de manière concrète et pragmatique », regrette ainsi l’ancien officier de police judiciaire.
Une hausse des crimes et des agressions préoccupante
Au cours de notre entretien, Jean-Pierre Colombies est également revenu de façon globale sur la situation sécuritaire en France, dénonçant une société qui ressemble désormais selon lui trait pour trait au film Orange mécanique.
L’ancien commandant de police s’alarme en effet de la dégradation de la situation sécuritaire en France ces dernières années, une détérioration loin d’être de l’ordre fantasme ou du sentiment, comme l’attestent les données enregistrées par la police et la gendarmerie qui font état d’une hausse de 75% des tentatives d’homicides entre 2017 (2284 tentatives) et 2023 (4015 tentatives), d’une augmentation de 20% des homicides sur la même période (826 homicides en 2017 contre 996 en 2023), ainsi que d’une hausse des violences physiques hors cadre familial de près de 20% (171 900 victimes en 2017, 205 900 en 2023).
« Nous assistons à une multiplication des violences, des crimes et des délits commis sur la voie publique. […] Nous le voyons dans toutes les communes tous les jours. Il n’y a pas une journée où il n’y a pas un fait divers particulièrement marquant qui se produit en France », explique-t-il.
Des multirécidivistes qui échappent régulièrement à la prison
Et l’ancien policier de pointer du doigt l’impunité dont jouissent bon nombre de délinquants, faute de places de prison suffisantes notamment.
« Vous avez des délinquants qui ont été interpellés et mis en garde à vue des dizaines de fois, qui sont passés devant des magistrats qui les ont condamnés, mais ils ne font pas un jour de prison. […] Donc, il n’y a pas de perception de la peine chez les délinquants qui multiplient pour certains les condamnations. »
« Ils sont laissés libres, parfois mis en examen quand les crimes ou les délits sont caractérisés, suffisamment importants et le justifient. On les condamne parfois à du sursis, mais on sait très bien qu’en dessous d’un certain seuil, on n’incarcère pas en France », poursuit Jean-Pierre Colombies.
« Je suis en contact avec des collègues de terrain qui me disent leur désespoir, quasiment quotidien, d’arrêter toujours les mêmes et de voir que ces types-là commettent des agressions très dures et qu’ils sont relâchés, simplement avec un rappel à la loi. »
Une absence de sanction qui encourage les coupables à récidiver et à commettre « des agressions et des infractions de plus en graves », jusqu’à devenir parfois des criminels endurcis.
Et Jean-Pierre Colombies de conclure : « Nous avons une guerre sur notre territoire. Ce que nous vivons aujourd’hui est une guerre civile larvée. Ce n’est plus de de la projection. Ce n’est pas un débat, ce n’est pas une vue de l’esprit. C’est une guerre civile, vraiment. Quand vous avez des gangs équipés d’armes de guerre qui tuent des victimes innocentes, vous avez un devoir de réaction. Il faut arrêter les marches blanches, les bouquets de fleurs, les petits nounours en peluche. Il faut s’armer et pas simplement de mots. Il faut aller au contact, il faut faire la guerre. Il n’y a pas d’autres solutions. »