Non seulement notre « matière à réflexion » a été fournie par le Parti, mais même notre façon de penser a également été programmée par le PCC.
Jennifer Zeng
Le discours de Yang Shuping sur « l’air pur » qui est devenu aujourd’hui célèbre, avait suscité tant de colère de ses compatriotes chinois, que Yang a été forcée de présenter publiquement ses excuses. Yang, une étudiante chinoise, a prononcé son discours lors de la cérémonie de remise des diplômes à l’Université du Maryland aux États-Unis, le 21 mai dernier.
Dans son discours, Yang a loué l’air pur aux États-Unis, en le comparant à la mauvaise qualité de l’air souvent pollué en Chine. Elle a également fait une comparaison similaire par rapport à la liberté d’expression dans la communauté universitaire. Yang a déclaré qu’elle n’avait jamais pensé qu’il était possible de discuter ouvertement de problèmes tels que le racisme, le sexisme et la politique, parce qu’en Chine « seules les autorités tissent le narratif ». Son discours a été chaleureusement applaudi.
Cependant, le lendemain, le discours de huit minutes de Yang a été lu en ligne plus de 50 millions de fois et a provoqué des centaines de milliers de commentaires critiques de la part des internautes chinois. Un post sur les réseaux sociaux du Global Times, contrôlé par l’État chinois, a été inondé par plus de 140 000 commentaires. Le Global Times a traité ce discours « d’anti-chinois ».
Bien que je n’aie pas été surprise par une telle réaction, j’ai été étonnée et attristée par un commentaire particulier cité par Storm Media Group à Taiwan : « Tout le monde en Chine doit un préservatif à ton père ». « Ton père » se réfère, évidemment, au père de Yang Shuping.
Ces mots ont été suivis par beaucoup d’autres remarques insultantes et obscènes adressées à cette pauvre jeune fille. Son compte Weibo serait également inondé par des messages haineux et des attaques personnelles virulentes. Tous ces commentaires montrent jusqu’où peuvent aller les Chinois « patriotes ». Avec des cerveaux lavés par la propagande, ils insultent et critiquent tous ceux qui, selon eux, ont osé critiquer la Chine communiste. À leurs yeux, critiquer la Chine équivaut à trahir le pays.
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En pensant à cet incident, je me suis rappelée un autre incident que j’avais vécu lors de mes études à l’Université de Pékin en 1987. C’était juste un exemple opposé à un tel « patriotisme » extrême. Nous avions un professeur d’anglais originaire d’Angleterre. Un jour, un étudiant lui a demandé : « Vous êtes un Anglais. Alors pourquoi êtes-vous venu travailler en Chine ? »
« Être né en Angleterre n’était que le fait du hasard biologique. Je suis tout d’abord un être humain. À titre personnel, je peux aller partout où je veux », a répondu l’enseignant.
J’ai été assez choquée par la mention du « fait du hasard biologique ». En Chine, dès notre naissance, il nous est inculqué que nous appartenons à la Chine (corps et âme), que nous devons être fiers de la Chine, qui est gouvernée par le grand Parti communiste chinois (PCC), que nous ne devons jamais oublier que nous sommes Chinois, etc. Personne n’oserait même imaginer que l’identité nationale ne soit qu’un simple fait du hasard biologique !
Même si je ne pouvais pas très bien comprendre le point de vue de cet enseignant anglais, j’ai au moins appris qu’il y avait une autre façon de voir l’identité nationale et que ce n’était pas un crime si on ne pensait pas appartenir à un pays particulier.
Cependant, ce n’est que lorsque j’ai lu les « Neuf commentaires sur le Parti communiste chinois » en 2004, après avoir déménagé en Australie, que j’ai vraiment compris à quel point le peuple chinois était empoisonné par la soi-disant « culture du PCC ». Non seulement, notre « matière à réflexion » a été fournie par le Parti, mais même notre façon de penser a également été programmée par le PCC. Nos esprits avaient été préréglés de telle sorte que, lorsque les boutons étaient appuyés, les « résultats » seraient exactement ce que le PCC voulait de nous et avait prévu pour nous. C’est juste pour cette raison que le discours de Yang Shuping a provoqué une réaction aussi virulente.
Après avoir compris cela, j’ai essayé, pendant des années, de me débarrasser de la culture du PCC qui m’avait été inculquée. Peu à peu, j’ai appris comment les gens dans une société normale pensent et réagissent. La façon de penser et d’agir du PCC a fini par disparaître, mais cela a pris beaucoup de temps.
C’est la raison pour laquelle j’ai été si choquée par les commentaires insultants sur le discours de Yang Shuping et que je me suis senti obligée d’écrire cet article et exprimer mes préoccupations. Je voudrais dire au monde entier : ne sous-estimez jamais le « soft power » du Parti communiste chinois, ne vous laissez jamais endormir et croire que le Parti pourrait devenir un membre du monde civilisé, et ne jamais, jamais le considérez comme tel.
Jennifer Zeng est l’auteure du livre « Witnessing History: One Chinese Woman’s Fight for Freedom and Falun Gong ». Avant d’être persécutée en Chine pour sa croyance, elle était chercheure et consultante dans le Centre de recherches sur le développement du Conseil d’État. Son histoire est racontée dans le film documentaire primé « Free China : The Courage to Believe », coproduction de NTD Television et World2Be Productions.
Version anglaise : Why are Chinese netizens angry about a graduate’s speech on ‘fresh air’
Les opinions exprimées dans cet article sont celles de l’auteur et ne reflètent pas nécessairement celles d’Epoch Times.
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