Parallèlement, des combats suivis de négociations, les Kurdes ont accepté de céder aux forces irakiennes le poste-frontière stratégique de Fichkhabour, situé aux confins des territoires turc, syrien et irakien et par où passe l’oléoduc acheminant le pétrole vers le terminal turc de Ceyhan. Ce poste-frontière se trouve pourtant dans les limites du Kurdistan irakien.
Dans un climat d’extrême tension, les députés kurdes réunis à huis-clos à Erbil ont pris connaissance de la lettre que M. Barzani leur a adressée annonçant qu’il ne serait plus président.
« Après le 1er novembre, je n’exercerai plus mes fonctions et je refuse que mon mandat soit prolongé », affirme l’architecte du référendum d’indépendance du 25 septembre dans cette missive dont l’AFP a obtenu une copie.
Le Parlement kurde avait récemment gelé les prérogatives de M. Barzani à la suite de ce référendum qui a déclenché une crise sans précédent entre Erbil et Bagdad.
Aussitôt après les résultats, le gouvernement central irakien avait envoyé ses troupes reprendre le contrôle de toutes les zones situées hors de la région autonome et dont les combattants kurdes avaient pris le contrôle depuis 2003.
En quelques jours, la quasi-totalité de ces territoires sont repassées aux mains du pouvoir central.
Pire encore, en reprenant les puits de pétrole de Kirkouk (nord), qui représentaient quasiment la moitié des revenus de la région autonome déjà fortement endettée, Bagdad portait un coup fatal à la viabilité économique du rêve kurde, vieux d’un siècle, de créer un État.
Un rêve déçu
M. Barzani avait cru pouvoir imposer son rêve d’indépendance, malgré le refus de la communauté internationale, à l’exception d’Israël.
À 71 ans, le leader kurde toujours revêtu de l’habit kaki des combattants kurdes (peshmergas), a toutefois affirmé qu’il va « rester un peshmerga » et « défendre les acquis du peuple du Kurdistan ».
Après la lecture de cette lettre, le Parlement a effectué une répartition provisoire de ses pouvoirs d’ici à l’élection présidentielle, dont la date n’est pas encore fixée.
Alors que les parlementaires étaient réunis dans l’assemblée en soirée, des dizaines d’hommes brandissant des bâtons et des pierres se sont précipités vers le bâtiment, frappant des journalistes présents devant, ont rapporté médias et parlementaires.
Les forces de l’ordre ont tiré en l’air pour disperser ces assaillants, a constaté un correspondant de l’AFP.
L’opposition, notamment le parti Goran qui veut un « gouvernement de salut national » à la place de M. Barzani, s’oppose à la répartition proposée par les grands partis kurdes, le Parti démocratique du Kurdistan (PDK) de M. Barzani et son rival de l’Union patriotique kurde (UPK), ont indiqué des députés.
Massoud Barzani « symbolise l’échec de la politique kurde et la seule chose qui lui reste à faire est de s’excuser publiquement », a lancé avant l’ouverture de la session Raboun Maarouf, député de Goran. Des partisans du président kurde l’ont aussitôt pris à parti.
Le mandat du premier président kurde élu, qui avait expiré en 2013, avait été prolongé de deux ans par le Parlement. Il s’est poursuivi sans élection ni décision formelle face au chaos engendré par l’offensive du groupe terroriste État islamique (EI).
Massoud Barzani, descendant d’une illustre famille de combattants pour l’indépendance part sans gloire alors qu’il y a un mois encore, il haranguait les foules en leur promettant l’indépendance.
Il a mis sur le compte d’une « haute trahison » la perte de la quasi-totalité des territoires disputés avec Bagdad, faisant référence sans les nommer aux dirigeants du parti rival UPK dont les combattants s’étaient retirés, le 16 octobre, sans combat de la province pétrolière de Kirkouk, face à l’armée fédérale.
Selon des diplomates, lors de ses fréquentes visites à Erbil avant le référendum, Qassem Souleimani, chargé des opérations extérieures des Gardiens de la révolution, l’armée d’élite de l’Iran voisin, lui avait prédit qu’il serait contraint au départ s’il maintenait son référendum.
Son pari, il l’a lancé « avec le soutien d’une petite poignée de conseillers, pas à l’issue d’une opération démocratique », expliquait récemment à l’AFP Kirk Sowell, expert de la politique irakienne.
Il n’a pas pris au sérieux les mises en garde des pays occidentaux et notamment de son meilleur allié les États-Unis. Mais il n’a pas non plus mesuré à quel point l’Irak avait changé après les nombreuses victoires contre l’EI ni compris que le sentiment national était heurté par sa décision.
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