L’Iran a annoncé samedi avoir exécuté un jeune lutteur, Navid Afkari, pour le meurtre selon les autorités d’un fonctionnaire lors de manifestations contre le gouvernement en 2018, une décision dénoncée sur les réseaux sociaux et à l’étranger.
La sentence du « qesas », c’est-à-dire la « loi du talion », une peine de « rétribution », a été exécutée ce matin dans une prison de Chiraz (sud), a indiqué à la télévision le procureur général de la province de Fars, Kazem Mousavi. La peine capitale a été appliquée « face à l’insistance de la famille de la victime », Navid Afkari a-t-il ajouté.
Mais selon l’avocat de M. Afkari, Me Hassan Younessi, une rencontre avec la famille de la victime aurait dû avoir lieu dimanche pour « demander pardon » et ainsi éviter l’application de la peine capitale.
#Iran | Exécution de #Navid_Afkari
La France condamne l’exécution de Navid Afkari en Iran le 12 septembre 2020.
Elle réitère son opposition constante à la peine de mort, en tous lieux et en toutes circonstances.Lire le communiqué ➡️ https://t.co/0Zvc1wXPKR pic.twitter.com/02bikY46lx
— France Diplomatie?? (@francediplo) September 13, 2020
M. Younessi s’était insurgé sur Twitter: « Etiez-vous si pressés que vous avez refusé à Navid son droit à une dernière visite », comme le prévoit le code pénal selon lui.
Le Comité international olympique (CIO) s’est déclaré « choqué » par l’exécution, jugeant « profondément regrettable » que les demandes d’athlètes et d’organisations à travers le monde pour empêcher l’exécution du lutteur n’aient pas été entendues.
« Nos pensées sont avec la famille et les amis de Navid Afkari », a réagi le CIO dans un communiqué.
Global Athlete, association de sportifs de haut niveau souvent critique envers les instances sportives, a demandé au CIO et à la Fédération internationale de lutte des sanctions immédiates pour exclure l’Iran.
Samedi, « les autorités iraniennes ont exécuté Navid Afkari, qui a avoué des crimes sous la torture (…) Cet acte cruel, en dépit des protestations internationales… montre le total mépris des autorités pour les normes les plus fondamentales des droits humains ». https://t.co/y0AD68Mv9E
— Bénédicte Jeannerod (@BenJeannerod) September 14, 2020
Après cette « exécution odieuse », « ce gouvernement ne mérite plus le privilège de participer aux compétitions internationales de sport », a estimé Global Athlete. Une association mondiale représentant 85.000 athlètes, World Players United, avait appelé l’Iran à épargner le sportif.
Selon Amnesty international, le dernier contact entre M. Afkari et sa famille a eu lieu le 6 septembre par téléphone. L’organisation de défense des droits humains a dénoncé dans un communiqué l’exécution « secrète » de Navid Afkari, la qualifiant de « parodie de justice » après un procès « manifestement inéquitable ».
#NavidAfkari was a young man with a promising future ahead of him. Carrying out his death sentence with such utter disregard for the basic principles of justice further demonstrates the cruelty of the death penalty. https://t.co/M4qErn19Op
— Amnesty International (@amnesty) September 13, 2020
Selon l’Autorité judiciaire, M. Afkari aurait été reconnu coupable d' »homicide volontaire » sur un fonctionnaire de la régie publique de l’eau à Chiraz (sud), poignardé le 2 août 2018.
#Navid Afkari, 27 ans, avait affirmé qu’il a confessé l’accident, sous la torture#Iran
Lisez ici: https://t.co/pEN3yCfonE pic.twitter.com/I1yoX5qfds
— AlAin Français (@AlainFrNews) September 13, 2020
Comme plusieurs autres villes d’Iran, Chiraz avait été le théâtre ce jour-là de manifestations hostiles au pouvoir et dénonçant la situation économique et sociale du pays.
Le verdict, annoncé début septembre, avait fait polémique et les soutiens avaient afflué en Iran comme à l’étranger après la publication d’informations affirmant que M. Afkari, 27 ans, avait été condamné sur la base d’aveux extorqués sous la torture.
Le régime iranien a procédé à 253 exécutions capitales en 2018 et 251 en 2019. Il poursuit son « oeuvre » de mort en 2020. Samedi, Navid Afkari, champion de lutte de 27 ans, a été exécuté pour un meurtre qu’il niait. Les mollahs font même exécuter des mineurs en secret #Abomination pic.twitter.com/EUK7mjHSh6
— Olivier Biffaud (@bif_o) September 13, 2020
Le chef de la diplomatie américaine Mike Pompeo a dénoncé cette exécution « cruelle ». « C’est une attaque scandaleuse contre la dignité humaine, même selon les critères ignobles de ce régime », a-t-il tweeté.
Le président américain Donald Trump avait appelé l’Iran à « épargner » la vie d’une « grande star de la lutte (…) qui n’a fait que participer à une manifestation antigouvernementale ».
Le hashtag en persan #Navid_Afkari a été largement partagé sur Twitter pour soutenir le jeune homme et s’opposer à son exécution.
The Iranian regime’s execution of Navid Afkari is a vicious and cruel act. We condemn it in the strongest terms. It is an outrageous assault on human dignity, even by the despicable standards of this regime. The voices of the Iranian people will not be silenced. #نویدمان_را_کشتند
— Secretary Pompeo (@SecPompeo) September 12, 2020
A Londres, un groupe de manifestants a protesté samedi devant l’ambassade d’Iran contre l’exécution, brandissant des portraits du guide suprême et du président iraniens barrés d’une croix.
Sur Twitter, la ministre suédoise des Affaires étrangères, Ann Linde, s’est dite « consternée par l’annonce de l’exécution du lutteur iranien Navid Afkari ». L’exécution de M. Afkari est « un grand péché » et l’Autorité judiciaire aurait dû essayer de convaincre la famille de l’homme tué de pardonner le lutteur, a tweeté le militant iranien des droits humains Emaddein Baghi.
L’avocat Babak Paknia a également critiqué « la hâte » de l’Autorité judiciaire à exécuter la sentence. « Même si le meurtre a bien eu lieu, n’est-il pas le rôle de l’Autorité judiciaire de tout faire pour que (le condamné) soit pardonné? » a-t-il relevé sur Twitter.
Avec au moins 251 exécutions en 2019, l’Iran est, après la Chine, le pays qui a le plus recours à la peine capitale, selon le dernier rapport mondial sur la peine de mort publié par Amnesty.
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