Ismaïl Kadaré, le géant albanais de la littérature et opposant à la dictature communiste, est mort

Par Epoch Times
1 juillet 2024 16:50 Mis à jour: 1 juillet 2024 16:53

Avec la mort d’Ismaïl Kadaré, géant albanais de la littérature qui avait fait de sa plume une arme contre les dictatures, une « voix monumentale » s’éteint. Mais son oeuvre puissante et libre survit, saluent d’une seule voix femmes et hommes politiques, éditeurs, et citoyens albanais.

« Je viens d’apprendre la triste nouvelle du départ du plus grand monument de la culture albanaise », a salué sur Facebook le Premier ministre albanais Edi Rama. « Il est désormais sur le piédestal de l’éternité, et aucun mot ne me vient. »

Puis de reprendre le message publié pour l’anniversaire de celui qui s’est éteint sans avoir reçu le Nobel de littérature, pour lequel il avait pourtant si souvent été envisagé : « Je le remercie pour le plaisir extraordinaire [qu’il nous a offert] de voyager dans un monde d’événements, de personnages, d’émotions, qu’il a fait vivre avec l’aisance d’un magicien. Et pour l’amertume qu’il a provoquée chez les médiocres et les jaloux avec son succès retentissant. »

« Un des plus grands écrivains de notre temps »

Publié dans des dizaines de langues, Ismaïl Kadaré a connu le succès dès les années 1970, et a placé l’Albanie sur la carte littéraire mondiale.

« C’est l’auteur qui a redimensionné la littérature et toute la société albanaise, grâce à ses œuvres publiées au milieu des ténèbres, et aussi après. Mais il a beau avoir quitté ce monde, sa mission ne s’arrête pas », explique Persida Asllani, responsable du département de littérature à l’Université de Tirana.

Parmi les réactions à son décès, la présidente du Kosovo, Vjosa Osmani, a pleuré « la perte d’une voix monumentale, un trésor qui n’existe qu’une fois par génération » – ajoutant qu’Ismaïl Kadaré, par son œuvre « avait défendu sans crainte la langue et la culture albanaises ».

« Ismail Kadaré est considéré depuis quelques années comme l’un des plus grands écrivains de notre temps. C’est un honneur d’avoir eu le privilège de publier son œuvre », a écrit la maison d’édition française Fayard sur X.

Cette œuvre, riche d’une cinquantaine d’ouvrages – romans, essais, nouvelles, poèmes, théâtre – traduits dans 40 langues, a été en partie écrite sous la dictature d’Enver Hoxha, qui, jusqu’à sa mort en 1985, a dirigé sans pitié un pays hermétiquement clos. Ismail Kadaré aura dénoncé sans relâche la dictature communiste d’Enver Hoxha.

Les mots d’Ismaïl Kadaré avaient eux, réussi, à passer les frontières.

La vérité sur ce qui s’est passé durant le communisme

« Avec son style brillant, il a fait vivre l’Histoire, il a pu dire la vérité sur ce qui s’est passé durant le communisme – mais pas seulement. Et pas seulement en Albanie car il était aussi un fin connaisseur de la région et des Balkans », dit dans les rues de la capitale albanaise, Tirana, Katerina Hysenllari, une étudiante de 24 ans.

« Ce qui est écrit sur le Panthéon à Paris : Aux grands hommes, la patrie reconnaissante, vaut également pour Kadaré », abonde Shezai Rrokaj,professeur de langue à l’Université de Tirana. « Ce grand génie nous a appris à connaître notre littérature et à apprécier l’art d’écrire. »

Figure de ce petit pays de 2,5 millions d’habitants connu pour ses eaux cristallines, ses sites antiques et la réputation sulfureuse de certains de ses cartel, Ismaïl Kadaré était devenu en 2005 le premier vainqueur du International Booker Prize pour l’ensemble de son œuvre, a rappelé l’organisation sur X.

Sa mort « est une perte pour la littérature albanaise et pour la littérature mondiale. Mais les écrivains sont soumis à d’autres lois : un écrivain ne nous quitte que physiquement, son œuvre reste pour des siècles », assure Zylyftar Bregu,  41 ans et passionné  de littérature.

L’homme politique français Renaud Muselier, président de la région Provence-Alpes-Côte-d’Azur (Paca), lié à l’Albanie par sa mère, a salué « un homme de lettres passionné ». « Il nous laisse l’héritage de ses ouvrages puissants » a écrit sur X M. Muselier. « Sa plume aura été inlassablement alimentée par son engagement pour la liberté : ses mots résonnent ce matin. »

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