Israël « créé par une décision de l’ONU » : une « méconnaissance de l’histoire » d’Emmanuel Macron ?

Par Ludovic Genin
17 octobre 2024 12:51 Mis à jour: 17 octobre 2024 17:44

Selon des propos rapportés par des participants au Conseil des ministres du 15 octobre, Emmanuel Macron a estimé que le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu ne devait pas « s’affranchir des décisions de l’ONU », en soulignant que c’est une « décision de l’ONU » qui a « créé » l’État d’Israël.

« Ce n’est pas la résolution de l’ONU qui a établi l’État d’Israël, mais plutôt la victoire obtenue dans la guerre d’indépendance avec le sang de combattants héroïques, dont beaucoup étaient des survivants de l’Holocauste – notamment du régime de Vichy en France », lui a répondu Benjamin Netanyahu dans un communiqué.

« Laisser penser que la création de l’État d’Israël est le fruit d’une décision politique de l’ONU, c’est méconnaître à la fois l’histoire centenaire du sionisme » et « le sacrifice de milliers d’entre eux pour établir l’État d’Israël », a répondu également le président du Crif.

Une déclaration du président français dont peu comprennent la raison, mais qui est critiquée jusque dans le camp présidentiel.

La sortie polémique du président français

« M. Netanyahu ne doit pas oublier que son pays a été créé par une décision de l’ONU », aurait déclaré Emmanuel Macron le 15 octobre, selon des participants au Conseil des ministres.  Le Président faisait allusion au vote en novembre 1947 par l’Assemblée générale des Nations unies du plan de partage de la Palestine en un État juif et un État arabe. « Et par conséquent ce n’est pas le moment de s’affranchir des décisions de l’ONU », a-t-il poursuivi.

Cette déclaration intervient dans le contexte d’interventions d’Israël contre l’organisation terroriste Hezbollah dans le sud du Liban, dans un territoire normalement surveillé par la Finul.

Une résolution du Conseil de sécurité des Nations unies n’autorise que l’armée libanaise et la mission de paix de l’ONU (Finul) à être déployées dans le sud du Liban, alors que le Hezbollah utilise « les installations et les positions de la Finul comme couverture afin de mener ses attaques », selon Israël.

Des images de tunnels et de caches d’armes à quelques centaines de mètres d’un poste de la mission de l’ONU et menaçant le territoire israélien, tendent à accréditer cette thèse.

Benjamin Netanyahu piqué au vif 

Benjamin Netanyahu a visiblement été piqué au vif par ces déclarations et l’a fait savoir par une réponse tonitruante.

« Un rappel au président de la France: ce n’est pas la résolution de l’ONU qui a établi l’État d’Israël, mais plutôt la victoire obtenue dans la guerre d’indépendance avec le sang de combattants héroïques, dont beaucoup étaient des survivants de l’Holocauste – notamment du régime de Vichy en France », a réagi le chef du gouvernement israélien dans un communiqué.

La résolution 181, adoptée en novembre 1947 par l’ONU, prévoyait le partage de la Palestine en un État juif et un État arabe.  Le premier, Israël, a vu le jour en 1948. Ce plan de partage rejeté par les Palestiniens et les pays arabes, et la proclamation de l’État d’Israël, sont les déclencheurs de la guerre israélo-arabe de 1948-1949. Le second, l’État palestinien, n’a, lui, jamais encore existé.

Cette passe d’armes entre les deux présidents en a suivi une autre. Le 5 octobre, le président français avait appelé à « cesser de fournir les armes pour mener les combats à Gaza », dans un message adressé essentiellement aux États-Unis. « La France n’en livre pas », avait-il souligné.

« Honte ! », s’était exclamé dans une vidéo le Premier ministre israélien, estimant que « tous les pays civilisés devraient se tenir fermement aux côtés d’Israël » qui « combat les forces de la barbarie dirigées par l’Iran ». Les deux hommes avaient fini par s’appeler, pour « assumer leurs différences », soulignant en même temps « l’engagement indéfectible » de la France pour la sécurité d’Israël.

Le Crif s’émeut des propos d’Emmanuel Macron 

Le président du Conseil représentatif des institutions juives de France (Crif) s’est ému des propos attribués au président. « Les propos attribués au président de la République, s’ils sont confirmés, sont une faute à la fois historique et politique », a écrit Yonathan Arfi, dans un message sur X.

« À l’heure où l’antisémitisme se nourrit de l’antisionisme, ces propos renforcent dangereusement le camp de ceux qui contestent la légitimité du droit à l’existence d’Israël », a ajouté M. Arfi, en souhaitant que, « au-delà de ces propos regrettables, l’amitié entre la France et Israël continuera, je l’espère, à l’emporter ».

Des remous à Renaissance

Les propos du président de la République ont suscité de vives réactions au sein du groupe des députés Renaissance. « Il y a des discussions un peu houleuses entre les uns et les autres », a affirmé l’ancien président du groupe, Sylvain Maillard.

Caroline Yadan, la députée de la 8è circonscription des Français établis hors de France, incluant Israël, a fustigé sur X une phrase « indigne ». « Le lien du peuple juif à la terre d’Israël n’a pas eu besoin de l’ONU pour exister, le sionisme est un rêve plusieurs fois millénaire et réduire Israël à une seule décision de l’ONU c’est nier l’histoire du peuple juif et son lien légitime et historique à cette terre », a-t-elle affirmé.

Sans vouloir commenter des propos qui n’étaient « pas officiels », le député François Cormier-Bouligeon, intervenu dans la boucle des députés, a estimé que l’existence de l’État d’Israël ne pouvait « être remise en cause de quelque manière que ce soit » et que l’ONU s’était « détournée de ses missions originelles ».

Lionel Causse, également intervenu dans cette dispute interne, n’a pas voulu non plus disserter sur « des propos qui n’ont pas été confirmés par le président de la République », mais a estimé que « l’ONU est une instance internationale », et que « de ce fait tout député doit défendre le rôle de l’ONU quelles que soient les circonstances ».

Une « méconnaissance de l’histoire de la naissance d’Israël », selon Gérard Larcher 

« Mettre en doute l’existence d’Israël touche pour moi à des questions fondamentales », a déclaré le président du Sénat Gérard Larcher, indigné par les propos attribués au chef de l’État sur la naissance d’Israël. Sur Europe 1 et CNews, le troisième personnage de l’État s’est emporté, ciblant frontalement le président de la République en l’accusant d’une « méconnaissance de l’histoire de la naissance d’Israël ».

« J’ai été stupéfait que ces propos puissent être tenus », s’est-il indigné. Selon le président du Sénat, la naissance d’Israël « n’est pas venue comme un acte notarié uniquement constaté par l’ONU ».

« Est-ce qu’Emmanuel Macron s’est souvenu de la déclaration Balfour ? Est-ce qu’il a pris conscience de ce qui s’est passé pendant la Shoah et après la Shoah ? », s’est-il emporté, affirmant qu’il y avait « comme un doute » sur le fait que le chef de l’État puisse remettre en question la légitimité de l’existence d’Israël.

« Je ne le soupçonne de rien, je dis que le droit à l’existence d’Israël n’est pas discutable ni négociable », a-t-il encore ajouté.

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