Un ancien employé des pompes funèbres Roc Eclerc de Mérignac, en banlieue bordelaise, a décidé de témoigner des horreurs qu’il a vues et de celles qu’on lui a racontées pendant les années où il travaillait pour cette entreprise. Actuellement en procédure devant les prud’hommes, il raconte à France 3.
« On nous a fait signer une charte sur l’empathie, sur le respect, sur la dignité, tout ça. C’est des salades, ils en ont rien à cirer », assure Jonathan, qui dénonce des pratiques « obscènes », monnaie courante dans l’entreprise où il était employé. « J’ai vu malmener des corps. »
Des exemples ? Entre ceux qu’il a lui-même vécus et ceux que ses collègues lui ont racontés, dont il a noté les détails et collecté les documents pour les remettre à la justice, ils témoignent tous d’un manque total de respect pour les défunts ainsi que pour les salariés, de la part de son employeur.
Une ou deux personnes maximum faisaient les mises en bière, ce qui est insuffisant pour le faire dans de bonnes conditions. « Parfois, quand il faut sortir les corps du frigo, quand c’est hors gabarit, c’est trop compliqué donc ça claque. On entend des bruits », explique celui qui est hanté par ces souvenirs de claquements de fragments d’os.
Dans un autre cas, on lui a demandé de faire rentrer « quoi qu’il en soit » un corps d’1 m 90 dans un cercueil d’1 m 80. « On m’a dit de couper un tendon ou de casser un os », se souvient Jonathan, qui assure ne rien avoir cassé.
Parmi les témoignages qu’il a recueillis, il y a celui d’une inversion de corps, réalisé par un collègue, qui « a encore du mal à dormir », sous la pression de sa hiérarchie. « Les familles se sont recueillies au crématorium alors que c’était pas le bon corps », s’indigne Jonathan.
Ce que raconte l’ex-employé des pompes funèbres fait écho à un véritable malaise dans le domaine. Ainsi, un maître de cérémonie qui a voulu rester anonyme assure que le témoignage de Jonathan, qui l’a touché, « est vrai ». Il dénonce des conditions de travail avec « des cadences infernales, appelés de jour comme de nuit ».
« Plus personne ne veut faire ce travail pour être payé 1 180 euros pour un porteur », assure le maître de cérémonie, qui parle de sous-effectifs en cette période de crise sanitaire. « On s’est retrouvés de 15 à 4 personnes, parfois c’étaient les familles qui portaient les cercueils », remarque-t-il.
Les révélations de Jonathan rappellent aussi celles d’une ancienne employée et d’un autre encore en poste, en octobre dernier aux Pompes funèbres de Toulouse, qui avaient dénoncé des pratiques « scandaleuses », en entrevue à La Dépêche. L’une des deux personnes a ainsi vu un « thanatopracteur casser le bras [d’une] personne » qui ne rentrait pas dans le cercueil, et d’autres défunts se faire couper la langue pour simplifier la suture.
Michel Kawnik, fondateur et président de l’Association française d’information funéraire (AFIF), confirme lui aussi qu’ « iI y a des entreprises qui intègrent dans leur stratégie le manque d’éthique et de respect dû au défunt ». Il dénonce depuis 30 ans un « lobby énorme du funéraire ». Son association fournit gratuitement informations et conseils et reçoit les plaintes des familles des défunts au 05-46-43-44-12.
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