Coup de tonnerre politique au Japon: le Premier ministre nationaliste Shinzo Abe, en poste depuis fin 2012, s’apprête à démissionner pour raisons de santé, ont déclaré vendredi des élus de la majorité, alors qu’il n’a pas de successeur évident.
M. Abe a annoncé sa décision lors d’une réunion d’urgence de son Parti libéral-démocrate (PLD), a déclaré aux journalistes Tomomi Inada, cadre du parti au pouvoir et proche alliée du Premier ministre.
« Je ne m’attendais absolument pas » à cette annonce soudaine, et « honnêtement je suis stupéfaite », a-t-elle ajouté. D’autres élus ont confirmé l’information, qui avait fuité peu avant dans la presse.
L’annonce est intervenue quelques heures à peine avant une conférence de presse de M. Abe, toujours prévue à 17H00 heure locale (08H00 GMT), au cours de laquelle le dirigeant avait prévu de s’exprimer sur son état de santé.
Rattrapé par une maladie chronique
Selon la chaîne de télévision publique NHK, le chef du gouvernement a été rattrapé par son ancienne maladie chronique intestinale, la rectocolite hémorragique, l’une des raisons qui avaient précipité la fin de son premier mandat en 2006-2007.
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— Atlantide (@Atlantide4world) August 28, 2020
M. Abe devrait rester en poste le temps qu’un successeur soit désigné, très probablement par un vote au sein du PLD, a précisé Mme Inada.
Il occupait la fonction de manière ininterrompue depuis fin 2012, un record de longévité pour un Premier ministre japonais.
Ces derniers jours, le porte-parole du gouvernement Yoshihide Suga avait tenté de balayer les spéculations sur un départ précipité, après deux visites à l’hôpital de M. Abe ces deux dernières semaines.
Ce fidèle du Premier ministre avait encore répété vendredi matin s’attendre à ce qu’il annonce au contraire son intention de « travailler dur » tout en se soignant.
Les observateurs s’attendaient par conséquent à ce que M. Abe reste à son poste jusqu’au terme de son troisième et dernier mandat de président du PLD prévu en septembre 2021.
« C’est une énorme surprise », a déclaré à l’AFP Shinichi Nishikawa, professeur de sciences politiques à l’université de Meiji de Tokyo.
Des défis importants
« Sa démission survient à un moment où le Japon fait face à des défis importants », dont la gestion de la pandémie de coronavirus, a-t-il rappelé.
« Il pourrait y avoir une situation politique confuse. Sa démission va avoir un grand impact » sur la politique japonaise, a encore estimé cet expert.
L’indice vedette Nikkei de la Bourse de Tokyo a brièvement décroché de plus de 2,6% après ces informations de presse, pour clôturer finalement la séance en retrait de 1,41%. Le yen s’est quant à lui sensiblement apprécié face au dollar.
La popularité de M. Abe a fondu ces derniers mois avec la pandémie de coronavirus, son gouvernement étant critiqué pour la lenteur de sa réaction à la crise, ses multiples revirements et maladresses, y compris du Premier ministre lui-même.
Quelque 1.200 décès
L’archipel nippon a été relativement moins touché par la maladie Covid-19 que de nombreuses autres zones du monde, avec environ 65.600 cas d’infections dans le pays depuis le début de la crise sanitaire pour quelque 1.200 décès.
Mais le nombre de cas locaux est fortement reparti à la hausse depuis début juillet, en dépit d’un état d’urgence mis en place par le gouvernement entre début avril et fin mai.
Le gouvernement a lancé ces derniers mois des plans d’aide record représentant un total de près de 1.900 milliards d’euros pour soutenir les entreprises et les particuliers, mais cela ne devrait pas éviter au pays une profonde récession cette année.
Succès partiels balayés par la crise du coronavirus
Le bilan de la politique de relance économique que M. Abe a initiée à partir de fin 2012, surnommée « Abenomics », est aussi très mitigé, faute de ne pas avoir mis en oeuvre des réformes structurelles de grande ampleur, et ses succès partiels ont été en grande partie balayés par la crise du coronavirus.
Depuis son retour au pouvoir fin 2012 M. Abe avait profité de l’absence d’un rival sérieux au sein du PLD et de la faiblesse de l’opposition, incapable de tirer parti des nombreux scandales qui ont touché le Premier ministre de près ou de loin ces dernières années.
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