La ministre de la Justice, Nicole Belloubet, a évoqué samedi l’hypothèse d’un rapatriement des jihadistes français détenus par les Kurdes en Syrie, son entourage réfutant toutefois une rupture avec la position de Paris sur ce dossier sensible.
« Jusqu’aux récentes évolutions, nous pensions à la possibilité de mettre en place avec d’autres Etats européens un tribunal mixte en Irak » pour juger les jihadistes étrangers que leurs pays ne veulent pas reprendre, notamment français, un tribunal « que nous aurions appuyé », a expliqué la ministre dans les colonnes de Libération.
« S’il n’est plus possible de les juger sur place, je ne vois pas d’autre solution que de rapatrier ces gens en France »
« On ne peut prendre le risque d’une dispersion dans la nature », souligne N.Belloubet.
Ce qui revient au même mais dans quelques années…https://t.co/oRMrTrF4PW— Barbara78 (@dragonduclos) January 11, 2020
Mais « la donne a changé », a-t-elle souligné sans plus de détails. « Dans ce cas là, s’il n’est plus possible de les juger sur place, je ne vois pas d’autre solution que de rapatrier ces gens en France. Tout combattant terroriste qui serait rapatrié serait judiciarisé comme nous l’avons toujours fait. »
« On ne peut prendre le risque d’une dispersion dans la nature », a souligné Mme Belloubet. « On ne va pas avoir cinquante solutions: soit on va les rapatrier car on considère qu’il vaut mieux qu’ils soient sous contrôle français, soit ils s’évaporeront… Avec les risques que cela suscite ».
Si si il y aurait une autre solution …. moins coûteuse, plus juste pour nous citoyens français: la déchéance de nationalité. https://t.co/PjuPhiFc79
— Hélène Laporte (@HeleneLaporteRN) January 11, 2020
Samedi midi, l’entourage de la ministre a néanmoins assuré que sa ligne n’a pas changé.
« Notre position est constante, nous considérons que les jihadistes doivent être jugés dans les endroits où ils ont commis leurs exactions. C’est pourquoi nous appuyons, avec d’autres Etats européens, le principe de leur jugement en Irak avec l’ensemble des garanties qui s’imposent », a indiqué son entourage à l’AFP.
Pour Jean-Yves Le Drian, ils doivent être jugés sur le théâtre où ils ont combattu
Mi-décembre, le ministre des Affaires étrangères Jean-Yves Le Drian avait reconnu que la question d’un jugement en Irak n’était « pas réalisable à court terme », en raison notamment de la révolte qui secoue ce pays. Depuis, l’Irak est également devenu un théâtre de l’affrontement entre l’Iran et les Etats-Unis.
Le chef de la diplomatie avait déclaré qu’en l’absence de procès réalisables en Irak à court terme, le sort des jihadistes étrangers détenus par les Kurdes relèvera du processus de règlement politique en Syrie sous l’égide de l’ONU.
Il avait rappelé la position intangible de la France concernant le sort de ses ressortissants membres du groupe Etat islamique (EI) – leur jugement sur le théâtre où ils ont combattu – et souligné qu’elle était partagée par nombre de pays européens.
Contacté par l’AFP, le Quai d’Orsay n’avait pas réagi dans l’immédiat.
Nicole Belloubet juge par ailleurs dans Libération qu’il n’est « pas acceptable » que de très jeunes enfants de jihadistes français soient retenus dans des camps au Kurdistan.
Elle met toutefois en avant des questions « juridique » – la nécessité d’obtenir l’accord de la mère pour le rapatriement de l’enfant -, « factuelle » – la situation sur place « ne permet plus » d’aller chercher ces enfants – et « politique », « l’acceptabilité du retour de ces enfants pour nos concitoyens ».
Jusqu’ici, le gouvernement français n’a accepté de rapatrier des enfants de ces camps qu’au « cas par cas ». Après des mois de tergiversations dans un contexte de forte hostilité de l’opinion, Paris a ainsi, en juin 2019, rapatrié 12 enfants, dont la majorité étaient des orphelins, après cinq rapatriements en mars 2019.
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