SOCIéTé CHINE

Kevin Rudd prévoit une Chine « centriste », ce qui est jugé irréaliste par un dissident chinois

L'ancien Premier ministre australien Kevin Rudd a laissé entendre que la Chine reviendrait à un centre politique après le départ de l'actuel dirigeant du PCC, Xi Jinping
octobre 19, 2024 19:58, Last Updated: octobre 19, 2024 19:58
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Dans son nouveau livre intitulé « On Xi Jinping », l’ancien Premier ministre travailliste australien Kevin Rudd affirme que le monde doit simplement attendre la fin du mandat de Xi, après quoi la Chine reprendra une orientation plus centriste.

L’actuel ambassadeur aux États-Unis affirme que ce revirement pourrait se produire lorsque l’adhésion stricte du dirigeant du Parti communiste chinois (PCC) à l’idéologie marxiste fera des ravages dans l’économie.

L’objectif de Xi est de « changer l’ordre international lui-même, en s’appuyant sur une Chine de plus en plus puissante, nouveau pivot géopolitique et géoéconomique de cet ordre », affirme M. Rudd.

Selon lui, le dirigeant communiste, âgé de 71 ans, a fait évoluer la politique de Pékin vers la « gauche léniniste » en réaffirmant le pouvoir du dirigeant, tout en faisant évoluer la politique économique vers la « gauche marxiste » en donnant la priorité à la planification de l’État au détriment des forces du marché.

Dans le même temps, il a fait évoluer la politique étrangère vers la « droite nationaliste » en encourageant les griefs à l’égard de l’occupation et de l’endiguement de la Chine par l’Occident, et en mettant l’accent sur la place centrale de la civilisation chinoise.

Même si Xi « a bien compris ce que ses prédécesseurs cherchaient à faire en laissant la porte de la démocratie ouverte pour la génération suivante », il a au contraire décidé de la « fermer hermétiquement ».

L’ancien Premier ministre australien Kevin Rudd s’exprime lors d’un événement à l’auditorium Jack Morton de l’université George Washington le 26 mai 2022 à Washington, DC. (Alex Wong/Getty Images)

Son leadership « correspond probablement à la période de danger maximal quant à la possibilité d’une guerre concernant Taïwan », affirme M. Rudd, mais les tensions s’apaiseront lorsqu’il sera remplacé.

« À moins que Xi ne tienne le coup pendant encore 20 ans ou plus, il est peu probable que la Chine devienne plus extrémiste sur le plan idéologique une fois qu’il sera parti. »

Dès lors, la Chine « accueillerait favorablement un retour au centre ».

L’attitude et l’approche de Xi ne pourraient prévaloir que s’il était capable de « se maintenir au pouvoir jusqu’à 90 ans afin de nommer suffisamment de jeunes cadres idéologiquement fiables pour permettre à sa stratégie politique à long terme de s’enraciner », affirme M. Rudd.

La prédiction de M. Rudd est irréaliste, assure un dissident chinois

Cependant, la prédiction de l’ambassadeur quant à la renaissance de Pékin après Xi a été rejetée par un dissident chinois d’Australie, qui a déclaré qu’elle était irréaliste et témoignait d’une méconnaissance de l’histoire de la Chine.

Le président australien de la Fédération pour une Chine démocratique, Chin Jin, a déclaré à Epoch Times que M. Rudd « ne voyait qu’un côté de la médaille, tandis que l’autre côté lui échappait ou qu’il avait choisi de l’ignorer ».

Certes, Xi s’est montré le dirigeant le plus agressif depuis Mao, mais la cause profonde des problèmes que connaît la Chine tient à la « dictature autocratique » du régime, explique M. Chin.

« Il s’agit là d’un important angle mort politique dont souffrent les personnalités occidentales, qui se concentrent sur les arbres sans voir la forêt. »

« La domination sur le monde a toujours été l’objectif fondamental du PCC, une ambition qu’il nourrit depuis sa fondation en 1949. »

La seule raison pour laquelle Pékin a été moins expansionniste sous les dirigeants précédents comme Deng Xiaoping, Jiang Zemin, Hu Jintao et même Mao lui-même, c’est qu’il ne disposait pas de la force nécessaire pour poursuivre ses ambitions internationales, a-t-il souligné.

Deng Xiaoping a introduit la stratégie consistant à « cacher sa force et attendre le bon moment » pour endormir l’Occident dans sa complaisance. C’est une combinaison de la force du pays et de la détermination de Xi dont le monde est aujourd’hui témoin et qui ne changera pas simplement avec de nouveaux dirigeants, ajoute M. Chin.

« Kevin Rudd considère Xi Jinping comme une menace pour le monde, mais il ne s’agit pas seulement de Xi, mais de l’ensemble du régime autoritaire du PCC. L’Occident en a-t-il pris conscience ? Kevin Rudd l’a-t-il compris ? »

De 1979 à 1989, la Chine a apparemment connu sa décennie la plus libérale sur le plan politique – après les échecs du Grand Bond en avant – au cours de laquelle elle a eu l’opportunité de réaliser des changements politiques similaires à ceux de Taïwan, explique M. Chin, mais le massacre de la place Tiananmen, en 1989, a marqué la fin de cette période.

Par la suite, la Chine s’est concentrée uniquement sur le développement économique, sans procéder à d’autres réformes politiques.

Dix ans plus tard, la répression à l’intérieur du pays s’est nettement aggravée lorsque Jiang Zemin a lancé la persécution du Falun Gong, une pratique de méditation spirituelle, incluant le prélèvement d’organes parmi ses membres – une politique qui a depuis été étendue à la minorité musulmane des Ouïghours et à d’autres cibles.

Cheng Peiming, un pratiquant de Falun Gong qui a survécu à un prélèvement forcé d’organes imposé par le Parti communiste chinois en Chine, montre sa cicatrice lors d’une conférence de presse à Washington le 3 juillet 2024. (Madalina Vasiliu/Epoch Times)

Ces actions précèdent d’une décennie l’ascension de Xi et montrent que c’est sur le Parti, et pas seulement sur celui qui le dirige, que l’Occident devrait se concentrer, soutient M. Chin.

Mais il ne s’agit pas de nier l’influence de Xi.

« Xi Jinping a transformé la structure du pouvoir politique chinois par sa propre idéologie et sa dictature personnelle, en absorbant le parti communiste chinois et en transférant les rênes du pouvoir du Parti à la famille Xi », a-t-il déclaré.

« Il s’est ainsi transformé en un empereur sans couronne. Au milieu des clameurs constantes autour de lui de ‘l’Est qui monte et de l’Ouest qui décline’, Xi, trop sûr de lui, vise à remodeler l’ordre international, la force croissante de la Chine servant de nouveau pivot géopolitique et géoéconomique [pour provoquer ce changement]. »

L’ancien ministre des Affaires étrangères et l’ancien ambassadeur soutiennent le point de vue de M. Rudd

De son côté, l’ancien ministre australien des Affaires étrangères du gouvernement libéral, Alexander Downer, a qualifié le livre de M. Rudd de « bon travail ».

« Après avoir lu des résumés dans les journaux sur le contenu du livre, il me semble qu’il est tout à fait juste », a déclaré M. Downer à Sky News.

« En se concentrant sur le fait que Xi Jinping est un dirigeant très différent de ses prédécesseurs, beaucoup plus marxiste-léniniste, plus maoïste si vous voulez, que ses prédécesseurs immédiats, qui a fait basculer le pays vers la gauche sur le plan économique et qui est devenu un nationaliste très agressif, je pense que toutes ces analyses sont tout à fait justes. »

L’ancien politicien libéral australien Arthur Sinodinos, qui a été ambassadeur à Washington jusqu’à ce qu’il soit remplacé par M. Rudd, a estimé que la description de M. Xi par l’ancien Premier ministre comme un nationaliste ambitieux et agressif, déterminé à faire jouer à Pékin un rôle majeur dans l’élaboration d’un nouvel ordre mondial, correspondait au point de vue de Washington.

« Je pense que les Chinois verraient sans aucun doute Kevin comme assez bien ancré dans la vision du monde de Washington », a souligné M. Sinodinos.

Un ancien général de l’armée de l’air juge peu probable un mouvement vers le « centre »

Toutefois, au moins un Républicain américain ne partage pas l’optimisme de M. Rudd quant à l’émergence d’une Chine moins menaçante après Xi. Don Bacon, représentant du Nebraska et ancien général de brigade de l’armée de l’air, a déclaré qu’il n’y avait aucune preuve de ce changement.

« Je ne vois aucune indication pour l’instant laissant penser que la Chine essaie de revenir au centre. Rien n’indique qu’elle tente de se modérer. Elle veut prendre Taïwan en 2027. [Mais] je ne pense pas non plus que nous devons chercher la bagarre. Nous devons avoir une alliance forte et un budget militaire capable de les dissuader », a-t-il assuré.

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