L’incapacité du Kosovo de se doter d’un nouveau gouvernement deux mois après les élections risque de ralentir le processus de sa reconnaissance dans les instances internationales et de freiner l’injection des fonds dont ce jeune État des Balkans a besoin.
Une coalition dominée par le Parti démocratique du Kosovo (PDK) du président kosovar Hashim Thaçi est arrivée en tête des législatives anticipées du 11 juin, mais elle ne dispose pas d’une majorité absolue qui lui permettrait de gouverner seule.
Avant de tenter de former un gouvernement, cette coalition des anciens chefs rebelles devra d’abord faire élire le président du parlement. Mais faute d’une majorité nécessaire, elle s’est bornée à boycotter les travaux de l’Assemblée, en essayant d’attirer d’autres élus dans son camp, et assurer ainsi la continuité de son pouvoir.
Quatre tentatives visant à élire le chef du parlement ont déjà échoué.
« La classe politique au pouvoir ne veut pas l’abandonner », estime Agron Bajrami, rédacteur en chef du quotidien Koha Ditore.
Le Kosovo a proclamé en 2008 son indépendance, reconnue par plus de 110 pays, dont les États-Unis et la majorité des pays de l’UE. Il n’est pas reconnu par la Serbie et son principal allié international, la Russie.
Le chef de la mission des Nations au Kosovo, Zahir Tanin, a mis en garde mercredi contre des effets dévastateurs de la crise politique sur le plan économique et social de ce jeune pays de 1,8 million d’habitants, un des plus pauvre d’Europe, en citant des annulations ou des reports d’aide financière ou d’investissements.
« Le climat d’incertitude politique au cours des trois derniers mois est lié sans conteste avec ces faits », selon lui.
« Le Kosovo risque de perdre (ces) fonds »
Candidat potentiel à l’adhésion à l’Union européenne, le Kosovo risque de perdre en raison de cette crise des fonds de pré-adhésion pour 2017, une enveloppe de 78 millions d’euros, a prévenu le bureau de l’UE à Pristina.
« Le programme (d’aide) doit être ratifié par le parlement d’ici à décembre 2017. Autrement, le Kosovo risque de perdre (ces) fonds », précise-t-on dans un communiqué.
Le Fonds monétaire international (FMI) a de son côté stoppé en juillet le paiement d’une tranche de crédit de 16 millions d’euros, faute d’adoption par le parlement d’amendements de la législation régulant les droits des anciens combattants, a rapporté la presse locale.
« Le montant n’est pas énorme mais c’est un mauvais message sur la situation au Kosovo pour les potentiels investisseurs étrangers », commente l’analyste économique Naim Gashi.
La crise est probablement influencée aussi par la mise en place à La Haye d’un tribunal spécial qui doit juger pour crimes de guerre des anciens membres de la rébellion kosovare, pendant le conflit contre les forces serbes (1998-99).
Les spéculations abondent sur de possibles procédures contre Hashim Thaçi, ancien chef de la guérilla indépendantiste kosovare albanaise (UCK).
Selon Agron Bajrami, la volonté du PDK de s’accrocher au pouvoir est une « tactique », car « être au pouvoir vous offre des conditions plus favorables pour négocier l’immunité ».
Une crise prolongée diminue aussi les chances du Kosovo de poursuivre son calendrier d’adhésions aux institutions internationales, notamment celles à l’Unesco et à Interpol fixées pour cette année.
Normaliser les relations avec la Serbie
Vigoureusement opposée à ces intégrations du Kosovo, la Serbie n’aura peut-être pas besoin dans ces circonstances de déployer des efforts pour les prévenir.
Selon le ministre kosovar des Affaires étrangères en exercice, Emanuel Demaj, le Kosovo n’a toujours pas déposé une nouvelle demande d’adhésion à l’Unesco – après l’échec de la précédente en 2015 –, alors que la conférence générale de l’Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture aura lieu dans deux mois.
Pour formuler une nouvelle demande d’adhésion, le Kosovo doit amender ses lois sur les libertés religieuses et l’héritage culturel. Faute d’un parlement qui fonctionne, c’est une mission impossible.
Quant à Interpol, M. Demaj n’est pas apparu très optimiste à l’approche de l’assemblée générale de l’organisation, prévue fin septembre à Pékin. « Il va y avoir des difficultés », a-t-il reconnu.
La normalisation des relations avec la Serbie, qui est la condition principale imposée par Bruxelles pour le déroulement du processus d’adhésion de Belgrade et de Pristina à l’UE, souffre elle-aussi de l’impasse politique. Les analystes notent que les deux parties ne se sont pas rencontrées depuis un an.
« Le dialogue est cliniquement mort », selon le professeur de droit international Vigan Qorrolli.
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