La Chine utilise des drones pour surveiller les journalistes étrangers afin de restreindre la liberté de la presse

Cela "témoigne d'une atmosphère de plus en plus hostile pour les journalistes qui s'expriment sur l'état de la liberté de la presse en Chine", constate un rapport

Par Frank Fang
10 avril 2024 16:56 Mis à jour: 10 avril 2024 17:05

Selon un nouveau rapport, le Parti communiste chinois (PCC) a trouvé de nouveaux moyens pour harceler les journalistes étrangers travaillant en Chine, tout en continuant à utiliser d’anciennes tactiques pour étouffer la liberté de la presse.

Le 8 avril, le Club des correspondants étrangers de Chine (FCCC) a publié son enquête annuelle auprès de ses membres. Ce rapport, intitulé Masks Off, Barriers Remain (Les masques tombent, les barrières demeurent), indique que si la politique chinoise du « zéro Covid » appartient désormais au passé, le paysage médiatique du pays reste difficile pour les journalistes étrangers. Ces derniers doivent faire face aux « réponses musclées » des autorités chinoises à l’égard des reportages indépendants.

Selon le rapport, en 2023, la Chine a déployé des drones pour surveiller les journalistes étrangers.

« Lors d’un récent voyage dans deux provinces différentes pour couvrir le lien entre le changement climatique et les phénomènes météorologiques extrêmes, nous avons été suivis par plusieurs voitures remplies de policiers en civil », a confié à la FCCC un journaliste anonyme d’un média européen.

« Des drones ont été envoyés pour nous suivre et nous observer lorsque nous sortions de notre voiture pour filmer/prendre des interviews. Lorsque nous nous rendions à pied à un endroit, nous étions suivis par les drones. »

Ce journaliste anonyme est l’un des 101 journalistes membres du FCCC qui ont répondu à l’enquête menée au cours des deux premiers mois de cette année. Les personnes interrogées représentent des organes de presse d’Asie, d’Europe, d’Amérique latine et d’Amérique du Nord.

Bien que plusieurs journalistes anonymes aient été cités dans le rapport, le FCCC a noté que la « grande majorité des personnes interrogées » ne souhaitaient pas être citées « par crainte de représailles potentielles à leur encontre ou à l’encontre de leur publication ».

« Il s’agit d’un phénomène relativement récent qui témoigne d’une atmosphère de plus en plus hostile pour les journalistes qui s’expriment sur l’état de la liberté de la presse en Chine », peut-on lire dans le rapport.

Les drones ne sont pas les seuls outils numériques utilisés par l’État-parti pour surveiller les journalistes étrangers. Selon le rapport, la majorité des journalistes interrogés pensent que les autorités chinoises ont « probablement ou certainement compromis » leurs communications : 81% d’entre eux se sont référés à l’application de médias sociaux chinois WeChat, 72% à leurs appels téléphoniques et 55% ont estimé que leur domicile ou leur bureau avait été mis sur écoute.

En outre, selon le rapport, 11% des journalistes interrogés ont déclaré avoir reçu des « messages textes suspects contenant des codes de vérification ou de connexion qu’ils n’avaient pas demandés ».

« Quatre personnes interrogées ont déclaré que les représentants du gouvernement avaient fait référence à des informations qu’ils ne pouvaient connaître que s’ils pouvaient accéder à un compte ou à un appareil privé », constate le rapport.

Un jeu du chat et de la souris sans fin

Un journaliste anonyme d’un journal européen a décrit les relations entre les responsables chinois et les journalistes étrangers comme un « jeu du chat et de la souris sans fin ».

Le rapport cite ce journaliste : « Quelle que soit la stratégie que vous adoptez, le système de surveillance et de sécurité chinois s’adapte et comble l’écart. Quelles que soient les stratégies que vous utilisez, l’espace pour faire un reportage devient de plus en plus réduit. »

Le PCC ne tolère pas la liberté de la presse et, depuis des années, la Chine est l’un des pays qui emprisonne le plus de journalistes au monde.

Environ 99% des journalistes interrogés par le FCCC ont déclaré que les conditions de reportage en Chine « répondaient rarement ou jamais aux normes internationales de reportage ».

Par ailleurs, 81% d’entre eux ont annoncé avoir été l’objet d’ingérence, de harcèlement ou de violence lors de leur travail en Chine.

« Plus de la moitié (54%) des personnes interrogées ont déclaré avoir été entravées au moins une fois par la police ou d’autres fonctionnaires. De nombreuses personnes interrogées ont déclaré avoir été empêchées de filmer, de prendre des photos, de faire des interviews, ou avoir été détenues », note le rapport.

De nombreux Chinois ont tout simplement refusé de parler aux journalistes étrangers. Selon le rapport, 82% des journalistes interrogés ont reçu un refus de la part des gens « qui ont déclaré ne pas être autorisés à parler aux médias étrangers ou qu’ils avaient besoin d’une autorisation ».

Le rapport indique également que Pékin considère désormais davantage de régions comme « politiquement sensibles », en les ajoutant aux régions déjà connues telles que le Xinjiang et le Tibet. En 2023, ces « zones sensibles » incluaient également des régions limitrophes de la Mongolie, de la Russie et de l’Asie du Sud-Est.

Au Xinjiang, plus d’un million d’Ouïghours et d’autres minorités musulmanes sont détenus dans des camps d’internement où ils sont soumis aux travaux forcés, à la torture, aux abus sexuels, à l’endoctrinement politique, à l’avortement et à la stérilisation forcés.

D’après le rapport, 79% des journalistes ont « rencontré des problèmes » en essayant de faire des reportages dans la région limitrophe de la Russie, tandis que 43% ont rencontré des problèmes pour faire des reportages à la frontière entre la Chine et les pays d’Asie du Sud-Est.

Les médias étrangers ont eu des difficultés à obtenir des visas de journaliste et des permis de séjour pour leurs correspondants, tandis que 32% de ces médias ont indiqué que leur bureau manquait de personnel.

« Ce problème est particulièrement aigu pour les médias américains, dont un seul a réussi à obtenir une accréditation en 2023 – et ce, en remplaçant un journaliste qui avait quitté la Chine », peut-on lire dans le rapport. « Tous les autres médias américains ont déclaré qu’ils n’avaient pas été en mesure de remplacer les correspondants qui partaient, et encore moins d’ajouter des journalistes à leurs bureaux. »

Sur la base de ces témoignages, le FCCC a demandé aux autorités chinoises « d’assouplir les restrictions en matière d’accréditation et de permettre à davantage de journalistes étrangers de se rendre dans le pays ».

« Le club demande également à Pékin de mettre un terme à la surveillance et au harcèlement croissants des journalistes travaillant en Chine. »

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