Le monastère Saint-François de Séville a demandé au célèbre artiste Bartolomé Esteban Murillo de peindre 13 œuvres d’art mettant en valeur les saints franciscains. L’une de ces peintures, La cuisine des anges, raconte la visite d’êtres célestes venus aider un humble frère laïc dans ses tâches. Murillo était considéré comme un conteur, et cette peinture raconte une histoire merveilleuse.
On sait peu de choses sur Saint Gilles, l’un des premiers disciples de Saint François d’Assise, qui a vécu des centaines d’années avant l’époque de Murillo. La cuisine des anges, également connue sous le nom de Lévitation de Saint Gilles, s’inspire d’un récit que l’artiste connaissait sur Francisco Pérez, un frère laïc franciscain du monastère de Séville. Francisco Pérez a passé sa vie comme aide-cuisinier au monastère. Homme simple, le frère laïc était chargé de préparer les repas dans la cuisine des frères. Ce jour-là, il se mit à prier et fut bientôt pris d’une extase spirituelle. Son corps s’élevait, ou lévitait, de plus en plus haut, au fur et à mesure qu’il priait. Lorsqu’il se réveilla, ses tâches de cuisine étaient miraculeusement terminées.
Le récit s’ouvre au spectateur sur la gauche du tableau. L’abbé du monastère a convié des invités pour un repas. Il ouvre la porte de la cuisine et découvre un spectacle merveilleux. Le Frère Gilles est baigné de lumière et lévite dans un état d’extase. En se déplaçant vers la droite, un être angélique tenant un pot à eau ou à vin discute avec un autre ange. En descendant vers le sol à proximité, des putti sont occupés à laver des pots, près d’un autre ange qui broie des aliments ou des épices. À l’extrême droite, un ange dresse la table pour les invités du monastère. Une table de nourriture et de vaisselle constitue une belle nature morte.
À l’arrière-plan, dans des tons sombres, Murillo place une autre image du Frère Gilles sous une arche, en train de parler avec un ange. Représenté comme s’il se trouvait dans un autre espace-temps, Frère Gilles explique à l’ange les tâches qu’il a accomplies ce jour-là ou exprime peut-être son étonnement devant ce qu’il voit.
Un royaume spirituel devenu réel
La peinture représente la cuisine du monastère. La composition présente une scène miraculeuse comme réelle et tangible, qu’il s’agisse de la nourriture, des ustensiles de cuisine ou même de l’aspect physique des anges. Les deux anges au centre sont une transition entre le monde que nous voyons et une dimension spirituelle supérieure dans laquelle Frère Gilles a pénétré pendant sa lévitation. Les érudits religieux soutiennent que la lévitation n’est pas une technique de contrôle de l’esprit, mais un signe de sainteté. Sans un esprit pur et droit, elle ne peut se produire.
Au premier plan, au centre, un socle, bloc ou dalle – généralement placé à la base d’une colonne ou d’une statue – désigne Francisco Perez, cuisinier du monastère et connu pour sa piété, comme le Saint Gilles de la légende.
Il s’agit de l’une des rares peintures signées et datées par l’artiste.
La carrière de Murillo s’est épanouie pendant l’âge d’or de l’art baroque espagnol. Né à Séville et orphelin à un jeune âge, il peint pour gagner sa vie et étudie avec le célèbre artiste espagnol Diego Velázquez. Il est resté humble et spirituellement dévot tout au long de sa vie et a été favorisé par l’aristocratie espagnole.
Pour Murillo, la dimension spirituelle était aussi réelle que le monde tangible. Le site web de l’Electric Light Company a qualifié le tableau de « fusion inhabituelle entre le miraculeux spirituel et l’environnement quotidien d’une cuisine en activité ». Le critique d’art français Michel Butor a qualifié le tableau comme un des « 105 chefs-d’œuvre décisifs de l’art occidental ».
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