La famille de Samuel Paty, assassiné en octobre 2020, a porté plainte le 6 avril auprès du parquet de Paris contre l’administration pour « non assistance à personne en péril et non empêchement de crime ».
Dix membres de la famille du professeur poignardé puis décapité près de son collège de Conflans-Sainte-Honorine dans les Yvelines le 16 octobre 2020 par un islamiste d’origine tchétchène, ont déposé mercredi auprès du parquet de Paris cette plainte annoncée par Libération.
« Des fautes ont été commises tant du côté de l’Éducation nationale que du côté du ministère de l’Intérieur, sans lesquelles Samuel Paty aurait pu être sauvé », a indiqué leur conseil, Me Virginie Le Roy.
« La plainte est en cours d’analyse », a fait savoir le parquet de Paris.
Médiatisation de l’affaire via les réseaux sociaux
Longue de 80 pages, la plainte de Me Le Roy cible les délits de « non-empêchement de crime et de non-assistance à personne en péril » et vise « plusieurs agents du ministère de l’Intérieur et du ministère de l’Éducation nationale » qui ont eu à connaître directement ou indirectement de la situation de Samuel Paty.
Dans le détail, la plainte rappelle le lent engrenage débuté par un cours sur la laïcité dans le collège début octobre 2020, qui a abouti à l’assassinat le 16 octobre 2020 du professeur âgé de 47 ans par Abdoullakh Anzorov, réfugié d’origine tchétchène, puis tué ensuite par la police.
L’agresseur de 18 ans, radicalisé, lui reprochait d’avoir montré en classe des caricatures de Mahomet. Il avait revendiqué son geste en se félicitant d’avoir « vengé le prophète ».
Pour ces membres de la famille, « dès le 8 octobre et jusqu’au 16, Samuel Paty, la principale et les enseignants ont identifié une menace grave pour leur intégrité physique et la sécurité du collège », résultant notamment de la médiatisation de l’affaire via les réseaux sociaux par Brahim Chnina, père d’une collégienne qui prétendait avoir assisté au cours, et par le militant islamiste Abdelhakim Sefrioui.
« La protection la plus faible » aurait « sauvé » le professeur
Un rapport de l’inspection générale de l’Éducation publié quelques jours plus tôt, se penchant sur les événements survenus dans le collège de Samuel Paty avant son assassinat, avait estimé que l’institution avait fait preuve de réactivité dans sa prise en charge, mais souligné un défaut de surveillance des réseaux sociaux.
Pour les plaignants, « les agents du ministère de l’Intérieur ont failli », car Samuel Paty « aurait dû bénéficier au minimum de la protection la plus faible », un ou deux agents, ce qui « l’aurait sauvé ».
Sont ainsi visés par la plainte des agents du renseignement territorial des Yvelines. Ce service avait estimé dans une note du 12 octobre, quatre jours avant l’assassinat, que les choses « se calmaient ». D’autres agents de la DGSI, le renseignement intérieur, sont aussi désignés.
« Pas de commentaire à ce stade »
La plainte vise en outre plusieurs agents de l’Éducation nationale, par exemple au rectorat ou au collège. De longue date, l’avocate de dix membres de la famille Paty met en cause la responsabilité de l’État dans ce drame au retentissement international. Dès décembre 2020, elle pointait du doigt « les institutions (qui) n’ont pas su protéger » Samuel Paty malgré de multiples alertes.
Un rapport de l’inspection générale de l’Éducation publié quelques jours plus tôt, se penchant sur les événements survenus dans le collège de Samuel Paty avant son assassinat, avait estimé que l’institution avait fait preuve de réactivité dans sa prise en charge, mais souligné un défaut de surveillance des réseaux sociaux.
« Préalablement à la présente plainte, la famille de Samuel Paty a questionné les ministères concernés et leur a demandé la transmission de plusieurs informations et documents, elle n’a obtenu aucune réponse », précise la plainte.
« Pas de commentaire à ce stade », a réagi auprès de l’agence France Presse (AFP) le ministère de l’Intérieur.
Dans l’enquête antiterroriste sur l’assassinat, au moins quinze personnes sont mises en examen dans ce dossier, dont six collégiens, le père de l’adolescente et M. Sefrioui. Les investigations pourraient être clôturées d’ici à la fin 2022, selon une source proche du dossier.
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