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La Pakistanaise Asia Bibi a quitté le Pakistan pour le Canada

mai 9, 2019 5:28, Last Updated: mai 9, 2019 11:13
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La chrétienne Asia Bibi, condamnée à mort pour blasphème en 2010 puis acquittée il y a six mois, a quitté le Pakistan et « retrouvé » sa famille mercredi au Canada.

« Elle est au Canada », où elle a retrouvé ses deux filles, a assuré une source canadienne qui a requis l’anonymat. Le Premier ministre Justin Trudeau s’est pour sa part refusé à le confirmer officiellement, alors que plusieurs sources, dont la Première ministre britannique Theresa May, semblaient le suggérer.

« Je ne peux pas confirmer quoi que ce soit pour des raisons de vie privée et de sécurité », a-t-il dit mercredi à des journalistes. Mi-novembre, il avait déclaré à l’AFP être « en discussions avec le gouvernement du Pakistan » au sujet d’Asia Bibi.

Plus tôt dans l’après-midi, une source gouvernementale pakistanaise, sous couvert d’anonymat, avait confirmé à l’AFP que la chrétienne avait « quitté le Pakistan de son plein gré ».  Les autorités pakistanaises ont observé un mutisme complet sur sa destination ou les conditions de son départ.

L’avocat d’Asia Bibi, Saif ul Mulook, tout en admettant ne pas avoir parlé directement à sa cliente, a dit à l’AFP avoir compris après s’être entretenu avec ses propres « sources » qu’elle était bien au Canada, où ses filles, Esha et Ehsam, ont fui il y a plusieurs mois, selon plusieurs sources diplomatiques.

Plusieurs sources sécuritaires au Pakistan ont également déclaré à l’AFP que la chrétienne était partie au Canada. « Les Etats-Unis saluent la nouvelle selon laquelle Asia Bibi a bien retrouvé sa famille. Asia Bibi est désormais libre », s’est félicité dans un communiqué le chef de la diplomatie américaine Mike Pompeo.

La chrétienne avait été condamnée à mort pour blasphème en 2010, après avoir été accusée par deux villageoises musulmanes avec qui elle travaillait d’avoir « insulté » le prophète Mahomet pendant une querelle autour d’un verre d’eau. Son cas était devenu emblématique des dérives de la loi sur le blasphème au Pakistan, souvent instrumentalisée selon ses détracteurs pour régler des conflits personnels via la diffusion de fausses accusations.

« C’est un grand soulagement que cette épreuve honteuse soit enfin arrivée à son terme et qu’Asia Bibi et sa famille soient en sécurité », a déclaré Omar Waraich, le directeur adjoint du programme Asie du Sud d’Amnesty International. « Elle n’aurait jamais dû être emprisonnée et encore moins subir les menaces constantes qui pèsent sur sa vie », a-t-il poursuivi, appelant à « abroger » la loi sur le blasphème au Pakistan.

Dans le communiqué de Mike Pompeo, Washington a également « condamné de façon univoque les lois contre le blasphème partout dans le monde ».  Mme Bibi, une ouvrière agricole chrétienne âgée d’une cinquantaine d’années, avait fini par être acquittée en octobre par la Cour suprême pakistanaise, la plus haute instance judiciaire, après avoir passé plus de huit ans dans les couloirs de la mort.

Après son acquittement, des milliers d’islamistes du groupe Tehreek-e-Labaik Pakistan (TLP) avaient bloqué trois jours durant les principaux axes du pays pour exiger sa pendaison, le blasphème étant une question brûlante au Pakistan. Cette même Cour suprême l’avait ensuite définitivement disculpée en janvier en rejetant un recours contre son acquittement.

Depuis lors, Asia Bibi était vraisemblablement gardée en résidence surveillée, les conditions de son séjour ces derniers mois n’ayant pas été explicitées par Islamabad. Le sort d’Asia Bibi a eu un retentissement international, attirant l’attention des papes Benoît XVI puis François. L’une de ses filles a rencontré ce dernier à deux reprises.

« Asia Bibi est enfin libre », s’est réjouie une association de chrétiens britanniques d’origine pakistanaise (British pakistani christian association), qui dit s’être impliquée dans l’affaire Asia Bibi. « La plus célèbre victime de la loi pakistanaise sur le blasphème a finalement été libérée de son pays natal, où elle est devenue la figure la plus détestée », a poursuivi cette association dans un communiqué.

Le sort d’une autre chrétienne pakistanaise accusée de blasphème en août 2012 avait déjà suscité une vive émotion dans le monde. Rimsha Masih, une jeune fille de 14 ans, illettrée et retardée mentalement, avait été accusée par des voisins d’avoir brûlé des pages d’un manuel d’introduction au Coran. La justice avait abandonné les charges contre elle en novembre. A sa libération, elle et sa famille avaient dû se cacher, avant d’être accueillies au Canada.

Les chrétiens, qui comptent pour environ 2% de la population pakistanaise majoritairement musulmane, constituent l’une des communautés les plus déclassées du Pakistan. Ils vivent souvent dans des bidonvilles et se voient offrir des emplois peu rémunérés de balayeurs, d’agents d’entretien ou de cuisiniers.

D.C avec AFP

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