La police mexicaine débordée par les tactiques militaires des cartels

14 mai 2015 21:20 Mis à jour: 26 février 2016 09:37

 

Des membres d’un cartel de drogue mexicain ont tiré au lance-roquettes sur deux hélicoptères militaires dernièrement, détruisant l’un d’eux. Cet incident est survenu après une série d’attaques de style militaire, et les forces policières sont prises de court face à ce nouveau développement dans les tactiques des cartels.

Le chef de la Commission nationale de Sécurité, Alejandro Rubido (Alfredo Estrella/AFP/Getty Images)

L’hélicoptère de l’armée mexicaine s’est écrasé le 1er mai après avoir été touché par deux roquettes, selon les détails transmis aux médias par le chef de la Commission nationale de sécurité, Alejandro Rubido. Un deuxième hélicoptère a également été visé, mais les tirs ont manqué leur cible.

Les soldats ayant survécu à l’attaque disent avoir aperçu un convoi de camions qui s’est arrêté, ensuite des hommes armés sont sortis des véhicules pour lancer l’attaque, selon le site Borderland Beat qui rapporte sur la guerre des cartels au Mexique.

Les autorités mexicaines ont arrêté neuf individus relativement à l’attaque et ont retrouvé les véhicules des narcotrafiquants. Deux des véhicules étaient blindés et l’un d’eux était équipé d’une mitraillette. À l’intérieur, les autorités ont découvert les armes présumées avoir servi à l’attaque, un RPG-7 et un RPG-22, des armes de fabrication russe qu’on retrouve souvent au sein des insurrections.

Outre les armes, les autorités ont trouvé autre chose d’inquiétant à l’intérieur des véhicules, soit des uniformes de combat portant un emblème indiquant «Haut commandement des Forces spéciales CJNG».

CJNG est l’acronyme du Cartel de Jalisco Nueva Generación (Cartel de Jalisco Nouvelle génération). Cette trouvaille place les attaques dans le contexte d’un conflit qui s’envenime; la présence possible de soi-disant forces spéciales au sein des cartels marquerait une grave escalade.

Les attaques sont survenues dans l’État de Jalisco, au sud-ouest du Mexique, où le CJNG prend de l’expansion et où il serait responsable de plusieurs récentes embuscades de style militaire.

Les dernières attaques servent probablement de représailles, puisque le gouvernement mexicain avait commencé à cibler les dirigeants du cartel, selon Robert J. Bunker, professeur au Strategic Studies Institute du U.S. Army War College.

La vague d’attaques a débuté après que les autorités ont arrêté plusieurs membres du CJNG.

La police fédérale mexicaine patrouille à l’extérieur d’un édifice où se déroule une rencontre sur la sécurité nationale le 5 mai 2015 à Guadalajara, Jalisco. (Hector Guerrero/AFP/Getty Images)
Le 7 avril, des hommes armés soupçonnés être affiliés au cartel ont tendu une embuscade contre un convoi policier, causant la mort de 15 personnes. Juste avant cette embuscade, des membres du CJNG auraient lancé plusieurs attaques de moindre envergure. Ils auraient également tenté d’assassiner le commissaire à la Sécurité publique de Jalisco, Alejandro Solorio.

Après l’incident du 7 avril, le Département du Trésor américain a sanctionné le CJNG et l’un de ses dirigeants, Nemesio Oseguera Cervantes.

L’organisation a étendu son «empire criminel par la violence et la corruption ces dernières années», maintenant elle représente «l’une des plus puissantes organisations de narcotrafic au Mexique», a déclaré John E. Smith, directeur intérimaire du Bureau du contrôle des avoirs étrangers du Département du Trésor.

Après l’attaque contre les hélicoptères militaires le 1er mai, le gouvernement mexicain a déclaré une offensive à grande échelle contre le CJNG.

Formation militaire

Les attaques rappellent que certains des cartels mexicains ont été mis sur pied par d’anciens militaires et beaucoup de nouvelles recrues reçoivent un entraînement de style militaire.

Selon M. Bunker, la première génération de membres du cartel Los Zetas était composée d’anciens soldats. Lorsqu’ils étaient dans l’armée, selon certaines allégations, ils auraient reçu des formations de type commando et de combat en zone urbaine de la part de forces d’opérations spéciales américaines et israéliennes.

Des soldats mexicains montent la garde sur l’autoroute Guadalajara-Barra de Navidad lors d’une opération le 7 mai 2015 à Tecolotlan, Jalisco. (Hector Guerrero/AFP/Getty Images)

La deuxième génération de membres de Los Zetas avait moins d’habiletés. «Ils sont passés par les camps d’entraînement des Zetas et ont rapidement commencé à combattre avec beaucoup moins de formation, afin de faire nombre», explique M. Bunker.

Concernant le CJNG, «ils démontrent un assez bon niveau de formation», estime M. Bunker, et ils ont probablement des anciens militaires qui forment les nouvelles recrues. Il souligne que le cartel possède des narcocommandos – des groupes d’unités mobiles – et ils vont probablement adopter un comportement plus militaire à mesure que le conflit évoluera.

Ces nouvelles menaces n’augurent rien de bon pour la police mexicaine, car beaucoup «ne sont pas formés aux tactiques militaires», indique M. Bunker. Il affirme que la police mexicaine ne s’attend normalement pas à affronter de plein fouet les combattants des cartels. «Ils ne comprennent pas la dynamique des échanges de coups de feu et des embuscades.»

«Même les équipes tactiques ne sont pas entraînées pour affronter des escouades militaires», explique-t-il. Elles sont entraînées pour entrer et sécuriser des immeubles, où des gens peuvent être barricadés, cette formation spécialisée «leur causerait des problèmes dans un vrai échange de tirs avec un adversaire qui établit des zones létales».

Version originale  : Mexico Police Unprepared for New Military Tactics From Cartels    

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