Submersion migratoire, sentiment d’insécurité permanent, délinquance hors de contrôle : sur l’île de Mayotte, à cause de l’immigration illégale venue principalement de l’archipel des Comores, la vie des Mahorais est devenue au fil des décennies un véritable enfer. Dans cet entretien, Mansour Kamardine, député Les Républicains du 101e département français, explique à The Epoch Times le contexte d’insécurité dans lequel a été déclenchée l’opération Wuambushu et dénonce l’apathie du Quai d’Orsay qui, selon lui, fait preuve de scepticisme par rapport à l’identité française de Mayotte, refusant de mettre en œuvre les actions nécessaires à la protection de la souveraineté française dans ce département.
Pouvez-vous nous expliquer le contexte dans lequel a été déclenchée l’opération Wuambushu ?
Mayotte, c’est une île française depuis près de deux siècles. Mayotte, c’est un territoire d’une superficie de 374 km2 sur lequel vivent aujourd’hui 400.000 habitants, dont un peu plus de 200.000 – (peut-être 220.000, 230.000…) —, sont des étrangers, pour la moitié en situation irrégulière. Mayotte, c’est aussi un département dans lequel 77% de sa population vit sous le seuil de pauvreté et 80% de ses écoles sont surchargées, car elles sont peuplées d’enfants d’origine étrangère. Mayotte, c’est aussi l’insécurité : nul n’est certain de pouvoir rentrer chez soi à la fin de la journée sans avoir été agressé. En journée, quand vos enfants sont à l’école, vous avez la boule au ventre, vous préparant à ce qu’on vous informe que votre gamin a été tué ou bien grièvement blessé. Il est impossible de sortir la nuit ; il n’y a plus de vie sociale nocturne : on ne peut ni sortir au restaurant ni simplement faire la fête. Il y a ce qu’on appelle des « coupeurs de route » : des personnes qui battent la route à la nuit tombée et commettent des agressions violentes voire des meurtres. On constate qu’à plus de 90%, les responsables sont des individus d’origine étrangère. Dans la peur permanente, les Mahorais vivent dans des maisons entièrement barricadées. C’est une situation face à laquelle les forces de l’ordre sont submergées, quand elles ne sont pas harcelées, parce qu’il y a des gens qui cherchent à semer le chaos. Cette situation, qui dure depuis plusieurs années, contraint les Mahorais à quitter leur propre territoire pour aller chercher refuge à la Réunion, en métropole et ailleurs. Depuis plusieurs années, j’interpelle l’État afin qu’il prenne ses responsabilités et assure la sécurité des personnes et des biens. C’est dans ce contexte qu’a été prise la décision de déclencher l’opération Wuambushu.
L’ambition de cette opération est de parvenir à l’expulsion de 10.000 clandestins. Au regard de l’importante proportion de sans-papiers présents illégalement dans ce département, sujet sur lequel vous sonnez l’alerte, cet objectif vous paraît-il suffisant pour mettre fin à la submersion de l’île ?
L’opération Wuambushu ne vise pas exclusivement l’expulsion des clandestins. Ce serait une lecture réductrice de l’opération : ce n’est pas la première fois que nous opérons des reconduites à la frontière. En moyenne, la France reconduit aux Comores plus de 20.000 personnes par an. C’est une opération à multiples directions : outre le renvoi des clandestins aux Comores, elle compte s’attaquer aux réseaux mafieux qui se développent localement. En février, les services de police ont démantelé une filière de passeurs qui avait fait venir depuis 2019 pas moins de 40.000 clandestins à Mayotte. En dehors de ce type de réseau, il y a aussi la lutte contre les marchands de sommeil, la fabrique de faux papiers, la production de fausses attestations de reconnaissance de paternité. Tout ce petit monde participe à l’immigration. L’idée, c’est donc d’aller chercher toutes ces têtes de réseaux et de les remettre au procureur de la République. Depuis le déclenchement de l’opération Wuambushu, plus d’une quarantaine de têtes de réseaux ont été interpelées. L’autre volet de cette opération, c’est effectivement la reconduite aux Comores, de tous ceux qui n’ont pas à être à Mayotte.
Il ne faut pas aussi perdre de vue que le « décasage » de l’État, ainsi qu’il est appelé vulgairement, est une opération déjà bien rodée. Depuis plusieurs années maintenant, plus d’une dizaine de décasages ont déjà été effectués. Dans ces quartiers que l’on veut décaser, on trouve plusieurs situations : des Français comme vous et moi qui habitent sur des terrains privés ou appartenant à l’État, des personnes en situation régulière, qui ont un titre de séjour et une attestation d’hébergement, et enfin, en troisième catégorie, les clandestins. Dans le cadre de l’opération Wuambushu, comme précédemment, les deux premières catégories sont relogées, contrairement à ce qu’ont pu affirmer ces associations que j’appelle les « artificiers du chaos ».
Comment expliquez-vous la polémique médiatique autour de cette opération et le manque de pédagogie que l’on a pu constater autour de la communication sur ses tenants et aboutissants ?
Vous avez vu que jusqu’ici, c’est aux réseaux d’extrême gauche que l’on a beaucoup donné la parole. C’est maintenant que vous cherchez à donner, à nous les Mahorais, voix au chapitre. On parle de nous sans nous demander les réalités que nous vivons. La deuxième chose, c’est que pendant longtemps, le gouvernement n’a pas expliqué correctement ce qui se fait. Nous réalisons qu’enfin, vous avez compris que pour une bonne compréhension du sujet, il faut interroger les premiers intéressés, qui sont les Mahorais. Personne ne pourra démentir ce que je vous dis. Je soupçonne que le gouvernement expliquera bientôt les premiers résultats obtenus dans l’attaque de ces réseaux mafieux.
Les Comores ont déclaré lundi refuser l’accueil des migrants expulsés, infligeant ainsi un revers à la bonne exécution de l’opération Wuambushu. Comment dépasser cette résistance ?
La résistance ne vient pas tant du gouvernement comorien que du Quai d’Orsay. Pourquoi dis-je cela ? Je tiens à être clair et ferme. Récemment, l’ambassadeur de Chine a fait des déclarations par lesquelles il a mis en cause « le statut de pays souverain » des territoires de l’ex-URSS. Il a été convoqué au quai d’Orsay dans le cadre de « mises au point très fermes ». En revanche, alors que l’ambassadeur des Comores en France fait des déclarations du même acabit à propos de Mayotte, le quai d’Orsay ne réagit pas. C’est un deux poids deux mesures. On aurait pu s’attendre du gouvernement français, et notamment du ministère des Affaires étrangères, à un peu plus de sensibilité à propos de ces déclarations sur Mayotte, puisqu’il s’agit d’une remise en question de la souveraineté française : je rappelle à nouveau que Mayotte est française depuis près de 200 ans. La France n’a jamais été éconduite à Mayotte. Au contraire, les Mahorais, avec beaucoup de fierté, ont souhaité se prononcer en faveur de l’appartenance à la France. Donc le jour où le quai d’Orsay comprendra que Mayotte est française, et fière d’être française, je crois que cette situation avec le gouvernement comorien ne se reproduira pas. La France, vis-à-vis de l’Union des Comores, dispose de nombreux atouts diplomatiques, ne serait-ce qu’au titre de l’aide au développement qu’on lui a apportée. Sans compter qu’il s’agit d’un pays dont la moitié de son gouvernement est français. On a des dispositions du Code civil. Quand on est français, on ne peut s’attaquer à la souveraineté de la France. Si on le fait, on peut se voir déchoir de la nationalité française. Or, rien n’est fait, car, encore une fois, au ministère des Affaires étrangères, on n’est pas suffisamment convaincu que Mayotte est française et on n’a pas la volonté de faire valoir que Mayotte est bel et bien un département français.
Mardi, cette opération a essuyé un deuxième échec avec la décision du tribunal judiciaire de Mamoudzou, qui a suspendu l’évacuation d’un bidonville de Mayotte. Comment percevez-vous l’attitude de la justice qui s’inscrit à rebours de la volonté populaire des Mahorais, dont vous êtes l’un des représentants légaux ?
Ce n’est pas une décision de justice. C’est une délibération du conseil du syndicat de la magistrature. Je vous rappelle que lorsque Le Canard enchaîné a annoncé l’existence de cette opération, la section régionale du syndicat de la magistrature, c’est-à-dire de Mayotte, a dénoncé une opération dirigée contre des frères : elle considère que Mayotte n’est pas française mais comorienne. Comme je le subodorais, on sait désormais que le juge à l’origine de cette décision, Catherine Vannier, qui n’est autre que la présidente du tribunal judiciaire de Mayotte, est une ancienne vice-présidente du syndicat de la magistrature, comme l’ont confirmé vos confrères d’Europe 1. À mes yeux, ce n’est pas une décision de justice qui doit être respectée, car il s’agit tout simplement d’une délibération d’un syndicat d’extrême gauche qui a pour seule volonté d’encourager l’immigration illégale à Mayotte.
Les Comores sont actuellement sous offensive économique de la Chine, soulignait dans le Figaro Patrick Stefanini, ancien secrétaire général du ministère de l’Immigration. Selon vous, la Chine joue-t-elle un rôle dans l’agitation du sentiment anti-français aux Comores ou bien reste-t-elle neutre ?
La Chine joue probablement un rôle dans cette affaire. Tout est permis. Il y a la Chine, mais il y a aussi la Russie. Au moment où je vous parle, l’ambassadeur russe se trouve aux Comores. Ce n’est pas une visite anodine. Sans doute essaie-t-il d’enjoindre le gouvernement comorien à tenir et faire échec à l’opération Wuambushu en leur soufflant que Mayotte est comorienne. Quoi qu’il en soit, la situation à Mayotte dure depuis plus de 45 ans. Si le Quai d’Orsay avait vraiment souhaité que cette affaire soit soldée, cela fait longtemps qu’elle l’aurait été. Mais, encore une fois, on refuse d’agir. À titre d’exemple, on nous refuse même l’envoi d’une délégation française pour aller à l’ONU expliquer aux Africains et aux autres pays que Mayotte n’a jamais été comorienne, que nous sommes Français parce que nous l’avons demandé depuis 1841 et qu’avant cette date, il n’y a jamais eu d’État comorien. Au total, il y avait à l’époque dans l’archipel à peu près une quinzaine de sultans. Chaque sultan faisait la guerre à l’autre pour conquérir son territoire. Si Mayotte est devenue française, c’est tout simplement parce que le sultan mahorais a voulu se prémunir des invasions anjouanaises et des Comoriens de manière plus générale, ce afin de construire la paix ici. Aujourd’hui, la donne reste la même : nous voulons construire notre paix, nous avons fait un choix de destins depuis 1841. Malheureusement, encore une fois, j’accuse le Quai d’Orsay de ne pas vouloir le comprendre et de céder aux sirènes de l’extrême gauche, au lieu de prendre en compte la volonté populaire.
Vous dites soupçonner la Chine et la Russie de jouer un rôle en coulisses dans cette affaire. Quels seraient, d’après vous, les intérêts qui les pousseraient à agir en ce sens ?
S’agissant de la Chine, c’est un intérêt économique : le développement des nouvelles routes de la soie. On voit bien que les Chinois investissent massivement en Afrique dans le même temps où, nous, nous en sommes éjectés en raison de nos sottises. Quant à la Russie, elle ne supporte pas la position de la France sur la guerre en Ukraine, n’hésitant pas à comparer la situation de la Crimée à celle de Mayotte en faisant valoir que l’ONU n’a jamais entériné le vote d’indépendance. Chacun a son intérêt. Ce ne sont pas les mêmes, mais ils ont, l’un et l’autre, intérêt à ce qu’il y ait des tensions à Mayotte.
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