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La terreur sous l’EI: un quotidien de règles strictes et de châtiments

mars 24, 2019 11:54, Last Updated: mars 24, 2019 12:13
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De la naissance à la mort de son « califat », le groupe Etat islamique (EI) a un temps exercé un contrôle absolu sur une population atteignant sept millions d’âmes: son proto-Etat régissait tout, des services publics à l’impôt, en passant par l’habillement et l’éducation.

La reprise samedi de Baghouz, aux confins orientaux de la Syrie, par une force arabo-kurde a signé la fin de près de cinq années de férule jihadiste sur une zone autrefois grande comme la Grande-Bretagne, un pouvoir imposé à coups de châtiments corporels, d’embrigadement forcé et de racket organisé.

A cheval sur la Syrie et l’Irak, le « califat » avait ses administrations, qui, à leurs débuts, ont pu attirer la bienveillance d’habitants s’estimant délaissés par leurs autorités, et même sa radio qui ne diffusait pas de musique, considérée comme un « péché ». Très vite, l’EI a fait frapper sa propre monnaie, le « dirham du califat », comme le proclament les pièces que soldats irakiens ou combattants kurdes en Syrie ont conservées et exhibent aujourd’hui comme les reliques d’un cauchemar terminé.

Le groupe ultra-radical avait aussi sa police, la redoutable « hisba », qui pouvait distribuer amendes ou coups de fouet à un homme dont l’haleine avait des relents de cigarette ou d’alcool, ou à une femme dont les mains ou le visage dépassaient du long voile noir que l’EI imposait jusqu’aux petites filles. Ses tribunaux ordonnaient la mort, par décapitation, pendaison ou lapidation, ou emprisonnaient ceux qui ne payaient pas l’impôt, obligatoire.

Ces châtiments corporels et autres exécutions étaient menés en place publique. Et tout le monde devait y assister, rapportent ceux qui ont vécu les années d’occupation jihadiste.  Les têtes coupées étaient ensuite exhibées ou les corps laissés des jours à pendre au bout des potences, « pour l’exemple » et pour « terroriser » un peu plus des habitants qui évoquent encore ces épisodes avec effroi.

A Mossoul ou Hawija en Irak, à Raqa ou Baghouz en Syrie, de nombreux déplacés racontent la même histoire: celle d’une entreprise violente et mortifère régie par la bureaucratie. « Ils ont exécuté mon mari et ne m’ont jamais remis le corps mais ils m’ont délivré un certificat de décès signé de l’Etat islamique », ont affirmé différentes femmes à l’AFP dans plusieurs villes reprises à l’EI.

Il faudra des années pour découvrir le sort de ces disparus. Car les plus de 200 charniers laissés derrière lui par l’EI en Irak et les autres renfermant jusqu’à 5.000 corps dans le nord et le nord-est de la Syrie repris à l’EI doivent encore être ouverts. Quant aux prisonniers, un temps utilisés comme boucliers humains, personne ne sait ce qu’ils sont devenus. Au sein de la minorité yazidie, la plus persécutée par l’EI, plus de 3.000 membres manquent toujours à l’appel.

En 2014, les femmes de cette communauté kurdophone pratiquant une religion ésotérique ont été arrachées de force aux leurs. Vendues aux marchés aux esclaves, elles ont été violées et mariées de force à des jihadistes qui les ont embarquées avec eux jusque dans leur dernier réduit. « On faisait tout ce qu’ils réclamaient », racontait récemment à l’AFP Bessa Hamad, une Yazidie irakienne « achetée et revendue » six fois par des jihadistes avant de fuir l’ultime réduit de l’EI en Syrie. « On ne pouvait pas dire non ».

Les jeunes garçons yazidis, eux, ont été transformés en enfants-soldats avec lesquels leurs familles pour ceux qui ont pu être retrouvés  peinent désormais à dialoguer et à renouer, tant ils ont été endoctrinés et entraînés à haïr la langue et la religion de leurs parents. Dès l’école, l’EI inculquait aux enfants son idéologie littéraliste et violente. Dans les livres de mathématiques, on additionnait des mitraillettes et des grenades. Dans les livres de contes, on défigurait les personnages car toute représentation humaine était interdite.

Rencontré aux derniers jours du califat, après s’être rendu à Baghouz, un partisan de l’EI, Abdel Moneim Najia, affirmait à l’AFP que sous le « califat », « la loi de Dieu était appliquée ». Mais, ajoutait-il, l’EI, qui ne cesse d’affirmer que toute autre loi est injuste, a failli lui aussi. « Il y avait des injustices, des dirigeants ont volé l’argent et abandonné le peuple », accusait-il. Les griefs mêmes sur lesquels l’EI avait prospéré lors de sa percée de 2014 face à des Syriens et des Irakiens lassés de la corruption et de l’incurie rampantes dans leurs pays.

D.C avec AFP

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