La Tête haute, le film qui a ouvert la 68e édition du festival de Cannes, met en premier plan la face moins glamour
de la société – les services sociaux – avec Catherine Deneuve dans le rôle d’une juge des enfants.
Entre Mommy (2014) de Xavier Dolan et Polisse (2011) de Maïwenn, La Tête haute d’Emmanuelle Bercot propose un angle supplémentaire sur la misère sociale et la délinquance des mineurs.
La réalisatrice, scénariste et comédienne Emmanuelle Bercot qui vient de remporter le prix d’interprétation féminine pour son rôle dans Mon roi de Maïwenn au dernier festival de Cannes, dit avoir été fascinée par ce monde marginal habité par les errances des adolescents délinquants d’un côté et par le dévouement inlassable des éducateurs de l’autre.
Comme dans Mommy, tout commence par une mère immature, à peine capable de conduire sa propre vie. Mais toute la ressemblance s’arrête là, le film d’Emmanuelle Bercot est quasi documentaire.
Un cercle vicieux
Séverine (Sara Forestier), 25 ans, arrive chez la juge des enfants. Elle hurle et tape sur la table alors qu’elle est sur le point de se débarrasser de son enfant au visage angélique, mais qu’elle ne peut pas gérer, car arrivé malgré lui, malgré elle, trop tôt dans sa vie.
Malony (Rod Paradot) a 6 ans quand il est placé dans un centre avec d’autres enfants comme lui. Le temps d’une éllipse et nous le retrouvons déjà adolescent.
Malony passe alors régulièrement devant la juge des enfants pour des vols de voitures et autres délits, sans jamais comprendre ni pourquoi ni comment. La juge sera sa mère, elle sera aussi son père. Douce et sévère, interprétée délicieusement par Catherine Deneuve. Elle se fait accompagner de Yan (Benoît Magimel), devenu éducateur après que la juge s’était occupée de lui à l’époque où il était lui-même un enfant en difficulté.
Emmanuelle Bercot suit pour nous la vie du jeune Malony jusqu’à ses 18 ans, jusqu’à ce que sa rage s’apaise avec la découverte de l’amour, mais non sans avoir été confié d’abord à Yan. Car l’éducateur connaît bien la question, ayant dû sortir lui aussi de l’enfer de la haine et de la dégringolade sociale.
Des acteurs non professionnels
Un film poignant sur la société qui se voit obligée de protéger les marginaux, les inadaptés, les mal aimés – ceux qui souffrent de disfonctionnements souvent transmis d’une génération à l’autre. Un film sur les travailleurs des services sociaux qui exercent un métier souvent ingrat, qui tendent la main inlassablement à des gens la plupart du temps incapables de la saisir, des anonymes qui s’acharnent malgré les obstacles pour sauver les mineurs de l’abîme de la délinquance, essayant tant bien que mal de les ramener vers l’autre et vers la société.
Une longue enquête – comprenant des lectures, des stages, des observations dans des centres fermés, des audiences au tribunal et des interviews avec des juges et des éducateurs – a permis à Emmanuelle Bercot de réaliser ce film de la manière la plus juste possible.
La plupart des éducateurs dans le film le sont également dans la vie.
Rod Paradot, qui joue à merveille toutes les nuances d’un jeune adolescent perturbé, mal aimé, à la fois violent et fragile, a été recruté dans un lycée pro où il faisait un CAP de menuiserie.
Rod Paradot dans le rôle de Malony inspire tour à tour empathie ou rejet, compassion ou colère, espoir ou découragement. Le spectateur l’attend comme la juge et comme son éducateur, qui le suivent avec amour et fermeté dans l’espoir qu’il s’en sortira.
L’amour comme facteur de rédemption
C’est l’amour innocent de Tess (interprétée par la très convaincante Diane Rouxel)qui le sauvera. Tess, c’est la fille de son éducatrice au centre des jeunes délinquants, une jeune de son âge, timide, une sorte de garçon manqué, qui le délivre du cercle vicieux dans lequel il est pris au piège. Elle lui permet d’aimer à son tour. Un amour qu’il accepte non sans difficultés et qui lui permet finalement de rejoindre la société. De leur amour, naîtra un enfant, qui malgré l’âge de ses parents et malgré le vécu de son père, aura sa chance. C’est avec cet enfant dans les bras que Malony ira – dans la scène du « happy end » – remercier Madame la juge et lui prouver par l’expression de sa gratitude que tous ses efforts n’auront pas été vains.
Un film d’Emmanuelle Bercot, avec Catherine Deneuve, Rod Paradot, Benoît Magimel et Sara Forestier.
Sorti au cinéma le 13 mai 2015.
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