La Thaïlande a expulsé des réfugiés ouïghours vers la Chine la semaine dernière par crainte d’éventuelles « représailles » de la part du régime chinois, a déclaré jeudi un ministre thaïlandais.
Cela intervient alors que le pays d’Asie du Sud-Est a été condamné après que son gouvernement a renvoyé une quarantaine de demandeurs d’asile ouïghours en Chine le 27 février. L’expulsion a été effectuée malgré un avertissement antérieur d’un expert des droits de l’homme de l’ONU selon lequel le groupe « risquait réellement d’être torturé ou d’autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants s’ils étaient renvoyés ».
Après l’expulsion, les États-Unis, le Royaume-Uni, l’Australie, le Canada et l’Union européenne, entre autres, ont condamné la décision du gouvernement thaïlandais.
Au milieu du tollé, les responsables thaïlandais ont nié que des pays tiers aient proposé de réinstaller les réfugiés, qui ont été détenus en Thaïlande pendant 11 ans avant leur expulsion. Cependant, des rapports ont fait état de plusieurs offres de ce type pour relocaliser les Ouïghours.
En réponse, Russ Jalichandra, vice-ministre thaïlandais des Affaires étrangères, a déclaré jeudi dans un communiqué que certains pays avaient proposé de réinstaller les Ouïghours, mais que le gouvernement thaïlandais considérait ces offres comme « irréalistes », car la réinstallation des Ouïghours ne protégerait pas la Thaïlande d’une éventuelle intervention de la Chine, qui est le principal partenaire commercial de la Thaïlande.
« La Thaïlande pourrait faire face à des représailles de la part de la Chine qui auraient un impact sur les moyens de subsistance de nombreux Thaïlandais », a-t-il déclaré, ajoutant qu’envoyer le groupe en Chine était la « meilleure option ».
Pisan Manawapat, ambassadeur de Thaïlande au Canada et aux États-Unis entre 2013 et 2017 et sénateur avant sa retraite en 2024, avait précédemment déclaré à Reuters qu’au moins trois pays avaient approché la Thaïlande avec des propositions pour réinstaller les Ouïghours, mais que le gouvernement thaïlandais « n’avait pas pris la décision au niveau politique d’aller jusqu’au bout » parce qu’il « ne voulait pas contrarier la Chine ».
Camps d’internement au Xinjiang
Les Ouïghours sont un groupe ethnique turc majoritairement musulman. Ils ont été soumis à des détentions massives en Chine, avec environ un million ou plus placés dans un réseau tentaculaire de camps d’internement et d’autres centres de détention dans la région extrême-occidentale du Xinjiang.
Les survivants des camps ont décrit avoir subi des travaux forcés, des stérilisations forcées, un endoctrinement politique et d’autres abus pendant leur détention.
Le gouvernement américain a qualifié la répression du régime chinois au Xinjiang de génocide.
Le bureau des droits de l’homme de l’ONU a estimé en 2022 que la répression du régime contre les musulmans ouïghours pourrait constituer des crimes contre l’humanité.
Les personnes expulsées la semaine dernière faisaient partie des centaines de Ouïghours détenus par les autorités thaïlandaises en 2014 après avoir fui le Xinjiang, que les indépendantistes appellent Turkestan oriental.
Les réfugiés chinois, dont les Ouïghours, les pratiquants de Falun Gong et d’autres, ont souvent recours à des passeurs pour se rendre à Bangkok, où ils demandent l’asile par l’intermédiaire du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR). De nombreux demandeurs d’asile restent dans le pays dans l’incertitude pendant des années, certains étant détenus dans le centre de détention pour immigrés de Thaïlande, chroniquement surpeuplé et insalubre.
Sur plus de 300 Ouïghours détenus en Thaïlande en 2014, cinq sont morts en détention depuis. En 2015, les autorités thaïlandaises ont envoyé 173 détenus ouïghours en Turquie, tandis que l’expulsion de 109 Ouïghours vers la Chine en juillet de la même année a donné lieu à une manifestation en Turquie devant l’ambassade de Thaïlande à Istanbul.
Les expulsions de 2015 auraient également conduit à un attentat à la bombe dans une zone touristique de Bangkok qui a fait 20 morts. Deux suspects ouïghours détenus pour l’attentat nient toute implication. Leur procès se poursuit.
Eva Fu et Dorothy Li ont participé à la rédaction de cet article.
Avec Reuters
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