L’Assemblée nationale a adopté mardi la proposition de loi LR controversée « anticasseurs » remaniée par la majorité, mais 50 députés LREM – un record – ont marqué par l’abstention leur refus des interdictions préventives de manifester.
Dans une ambiance chahutée, la grande majorité des députés LREM et MoDem, ainsi que des LR et UDI ont voté pour, l’ensemble de la gauche s’est prononcé contre, de même que les élus RN.
Déjà approuvé par les sénateurs en octobre, le texte a été validé au Palais Bourbon en première lecture par 387 voix contre 92, et 74 abstentions.
L'affaire des perquisitions contre @Mediapart sur réquisition du parquet pour violer le secret des sources, relève de la même logique que la #loianticasseur. Nous assistons à ce qu'il faut bien appeler sans excès de langage, une dérive autoritaire et liberticide du pouvoir actuel
— Benoît Hamon (@benoithamon) February 4, 2019
Cinquante « marcheurs », dont le vice-président de l’Assemblée Hugues Renson, la présidente de commission Barbara Pompili, ainsi que Matthieu Orphelin, Aurélien Taché et encore Sonia Krimi ont fait le choix de l’abstention, un chiffre jamais atteint depuis 2017 sur un texte soutenu par le gouvernement. Mais aucun n’a voté contre.
Sur la loi asile-immigration il y a quelques mois au même stade, les abstentionnistes étaient 14 (et un contre).
« Le texte a été voté » et « il n’y a pas de malaise », a balayé le patron du groupe majoritaire Gilles Le Gendre, qui tablait pourtant lundi sur une vingtaine d’abstentions sur un texte « équilibré ».
Casse ? Vous avez dit casse ? #loianticasseur #cassesociale pic.twitter.com/5gU1srzh0g
— Large (@marclarge) February 5, 2019
Sonia Krimi, qui a un temps envisagé de voter contre, a voulu « envoyer un signal » pour que le gouvernement évolue sur la disposition clé des interdictions préventives de manifester pouvant être prises par les préfets. Plusieurs redoutent à l’avenir que ces représentants de l’État soient aux mains d’un « régime malintentionné ».
Parce que les juges administratifs ou le Conseil constitutionnel ou la CEDH feront valoir le caractère disproportionné de cette loi, qui confie des pouvoirs exorbitants de police aux seuls préfets.
Le numéro un de LREM, Stanislas Guerini, avait récusé d’avance toute « fronde » : sous François Hollande il s’agissait d’« une opposition fondamentale avec la politique qui était portée » et « ce n’est pas le cas ici ».
Plusieurs avocats de renom, dont deux proches d’Emmanuel Macron, se sont élevés contre une « loi de la peur » (François Sureau) ou « une réponse d’un pouvoir qui agit sous la pression et dans l’urgence » (Jean-Pierre Mignard).
Les députés #lrem n’ont pas été jusqu’à oser se lever, comme ils le font toujours, pour fêter le vote d’une loi scélérate. Cela ne change pas leur vote honteux,liberticide, contraire à l’Etat de droit. C’est une étape de plus dans la dérive autoritaire du pouvoir #loianticasseur pic.twitter.com/BYJMiJTYo3
— Eric Coquerel (@ericcoquerel) February 5, 2019
Outre les interdictions de manifester pouvant être prises par les préfets, sous peine de six mois d’emprisonnement et 7 500 euros d’amende, il est également prévu la possibilité de fouilles pour trouver des « armes par destination », sur réquisition du procureur, et encore le principe du « casseur-payeur ».
La proposition de loi retournera au Sénat dès le 12 mars pour une deuxième lecture, le gouvernement, qui l’a reprise à son compte début janvier, souhaitant une adoption définitive rapide dans le contexte des manifestations récurrentes des « gilets jaunes ».
Excellente #QAG de @mpdelagontrie sur la fragilisation inquiétante de nos libertés fondamentales. Perquisition de #mediapart, #loianticasseur et violences policières, #SecretDesAffaires… tout cela fait système, un système dangereux pour notre démocratie. pic.twitter.com/KJdJuDWZ9q
— Sophie Taillé-Polian (@STaillePolian) February 5, 2019
Le ministre de l’Intérieur Christophe Castaner, qui entend donner des gages à certains syndicats policiers, a répété mardi que ce n’est « pas une loi de circonstance mais une loi de bon sens » à l’égard des « brutes » qui empêchent de manifester.
Hasard du calendrier, plusieurs dizaines de milliers de personnes défilaient dans le même temps partout en France, à l’appel principalement de la CGT mais aussi pour la première fois avec la participation de « gilets jaunes ».
D. S avec AFP
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