L’Azerbaïdjan a annoncé dimanche avoir installé un premier checkpoint à l’entrée du corridor de Latchine, seul axe routier reliant l’Arménie à la région disputée du Nagorny Karabakh, une décision « inacceptable » pour Erevan.
« À partir de 12h00 (08h00 GMT) le 23 avril, un poste frontière a été installé (…) sur le territoire souverain de l’Azerbaïdjan, à l’entrée de la route Latchine-Khankendi », ont annoncé les gardes-frontières azerbaïdjanais dans un communiqué, disant avoir agi « en réponse » à une décision similaire prise samedi par Erevan.
Une telle mesure, une première depuis la courte guerre qui a opposé en 2020 l’Azerbaïdjan et l’Arménie, a également été mise en place « pour empêcher le transport illégal de main-d’œuvre, d’armes et de mines depuis le territoire de l’Arménie pour les formations illégales de bandits arméniens sur le territoire de l’Azerbaïdjan », ont-ils précisé.
L’Arménie dénonce « une nouvelle provocation »
« Le 22 avril, des caméras de surveillance du ministère de la Défense ont enregistré l’entrée sur le territoire azerbaïdjanais de deux conteneurs à des fins militaires et d’un convoi de véhicules militaires arméniens, contrairement à la déclaration trilatérale et aux normes et principes du droit international », a appuyé la diplomatie azerbaïdjanaise dans un communiqué, dénonçant « des provocations » de la part d’Erevan.
Le ministère azerbaïdjanais des Affaires étrangères a fait valoir que l’installation d’un checkpoint « servira à la transparence sur les mouvements (…), à l’État de droit, et ainsi, à assurer la sécurité et la sûreté des mouvements ».
Selon les gardes-frontières azerbaïdjanais, la force de maintien de la paix russe, déployée dans la région, et « le centre de surveillance russo-turc » ont été « informés » d’une telle décision. Dans un communiqué, le ministère arménien des Affaires étrangères a dénoncé « une nouvelle provocation » avec « des prétextes faux et sans fondement ». Cette nouvelle étape est « inacceptable », a-t-il poursuivi.
Réactions des États-Unis et de la France
Les États-Unis se disent « très inquiets de l’établissement d’un checkpoint par l’Azerbaïdjan dans le corridor de Latchine » et appellent les deux parties à « éviter les provocations », selon un communiqué du département d’État.
#Azerbaïdjan | La France déplore la mise en place par l’Azerbaïdjan d’un poste de contrôle à l’entrée de la nouvelle route du corridor de Latchine.
La déclaration complète ? https://t.co/ylMgNmXpDp pic.twitter.com/DKt5qRngYe
— France Diplomatie???? (@francediplo) April 23, 2023
La France « déplore » également cette installation qui « contrevient aux engagements pris dans le cadre des accords de cessez-le-feu et porte préjudice au processus de négociation », a souligné son ministère des Affaires étrangères dans un communiqué. Paris a appelé Bakou à « se conformer à ses obligations internationales », rappelant qu’une décision rendue il y a deux mois par la Cour internationale de justice (CIJ), la plus haute juridiction de l’ONU, avait « force obligatoire » pour l’Azerbaïdjan. Le 22 février, la CIJ avait ainsi ordonné à Bakou d’assurer la libre circulation dans le couloir de Latchine.
Mise en garde sur une « crise humanitaire »
Depuis plusieurs mois, l’Arménie met également en garde sur une « crise humanitaire » au Karabakh du fait d’un blocus azerbaïdjanais – que Bakou nie – dans la zone du corridor de Latchine qui a provoqué des pénuries de médicaments et de nourriture et des coupures d’électricité.
Les représentants séparatistes du Nagorny Karabakh ont, eux, appelé Moscou, médiateur dans le conflit, « à entamer immédiatement des discussions » pour notamment « empêcher l’installation d’un poste de contrôle azerbaïdjanais ». « Nous attendons dans les plus brefs délais des mesures efficaces pour résoudre les problèmes de sécurité » des habitants de l’enclave disputée, ont demandé dans un communiqué leurs représentants sécuritaires.
36.500 morts depuis 1990
L’Arménie et l’Azerbaïdjan, deux ex-républiques soviétiques du Caucase, se sont affrontés en 2020 dans une guerre pour le contrôle de l’enclave du Nagorny-Karabakh. Ce conflit avait donné lieu à une déroute militaire arménienne et à un accord de cessez-le-feu parrainé par la Russie. Des accrochages au Nagorny-Karabakh ou à la frontière entre les deux pays continuent toutefois d’éclater périodiquement.
Dimanche, le ministère arménien de la Défense a rapporté la mort d’un de ses soldats « à la suite de tirs de l’ennemi » en fin de matinée proche de la frontière. Le ministre azerbaïdjanais de la Défense a de son côté « démenti » cette information « fausse », disant avoir en revanche « essuyé des tirs arméniens » dans l’après-midi. « Des mesures de réponse adéquates ont été prises », est-il précisé dans un communiqué, sans plus de détails.
Région montagneuse majoritairement peuplée d’Arméniens et ayant fait sécession de l’Azerbaïdjan à l’effondrement de l’Union soviétique, le Nagorny-Karabakh continue d’empoisonner les relations entre Erevan et Bakou, malgré des tentatives russe, européenne et américaine de médiation.
Le premier conflit, au début des années 1990 au moment du démantèlement de l’URSS, qui a fait 30.000 morts, s’est soldé par une victoire arménienne avec le soutien de Moscou. Mais l’Azerbaïdjan a pris sa revanche à l’automne 2020 à l’occasion d’une deuxième guerre, qui a fait 6500 morts et lui a permis de reprendre de nombreux territoires.
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