Le Bangladesh a ordonné lundi aux opérateurs téléphoniques de couper les communications mobiles à près d’un million de Rohingyas réfugiés dans des camps dans le sud-est du pays, selon les autorités.
Cette décision intervient après des violences ces dernières semaines dans les camps, dont la plupart des résidents, musulmans, ont fui l’Etat birman de Rakhine il y a deux ans après une opération de répression de l’armée en Birmanie, pays à forte majorité bouddhiste.
Des enquêteurs de l’ONU ont dénoncé un « génocide » des Rohingyas, appelant à poursuivre des généraux birmans. La Birmanie a rejeté ces accusations, affirmant s’être défendue contre des attaques de rebelles Rohingyas contre des postes de police.
Le Bangladesh et la Birmanie ont signé un accord de rapatriement des réfugiés en 2017. Mais deux tentatives, en novembre 2018 puis fin août 2019, ont échoué car ils refusaient de partir.
Les opérateurs téléphoniques ont sept jours pour transmettre un rapport sur les actions entreprises pour couper les communications dans les camps, a déclaré le porte-parole de la Commission de régulation des télécommunications du Bangladesh, Zakir Hossain Khan.
« De nombreux réfugiés utilisent des téléphones mobiles dans les camps. Nous avons demandé aux opérateurs de prendre des mesures pour y mettre fin », a-t-il déclaré à l’AFP, précisant que la décision avait été prise « pour des raisons de sécurité ».
L’ordre a sidéré les Rohingyas, a commenté un de leurs leaders sous condition d’anonymat. Selon lui, l’interdiction va lourdement affecter le quotidien des réfugiés. « Nous ne pourrons pas communiquer avec nos proches vivant en Birmanie ou d’autres endroits dans le monde », a-t-il dit. Beaucoup de Rohingyas, a-t-il expliqué, dépendent de transferts d’argent envoyés par leur diaspora et se tiennent au courant des transactions via leur téléphone portable.
Pour le porte-parole de la police, Ikbal Hossein, cette décision « aura sans aucun doute un impact positif ». Selon lui, des réfugiés utilisent la téléphonie mobile pour des activités criminelles, et notamment le trafic de méthamphétamine en provenance de Birmanie, à hauteur de centaines de millions de dollars.
Dimanche, la police a annoncé qu’un quatrième réfugié Rohingya avait été abattu, en représailles au meurtre d’un leader local du parti au pouvoir, Omar Faruk, par de présumés criminels Rohingyas. Le meurtre de M. Faruk a provoqué des émeutes dans la population locale le 22 août.
Les réfugiés ont indiqué qu’une atmosphère de peur régnait depuis ces meurtres dans les camps, où la sécurité a été renforcée.
Des groupes de défense des droits humaines ont accusé à plusieurs reprises la police locale d’exécutions extrajudiciaires.
Ces deux dernières années, les forces de sécurités bangladaises ont abattu au moins 34 Rohingyas, dont la plupart auraient été, selon les autorités, impliquées dans le trafic de méthamphétamine.
Un responsable des Nations unies, sous couvert d’anonymat, a déploré que la coupure des communications mobiles allait « encore plus isoler et prendre pour cible des gens déjà persécutés » et « les pousser vers des solutions de repli négatives, que ce soit le crime, la violence ou l’extrémisme ».
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