Arnaud Rousseau, grand cultivateur et patron du géant des huiles Avril, a été élu jeudi par ses pairs à Paris pour succéder à Christiane Lambert à la présidence du syndicat agricole majoritaire français, la FNSEA, qui a l’oreille des dirigeants politiques depuis 77 ans.
Les administrateurs de la puissante fédération, interlocutrice privilégiée des pouvoirs publics en matière agricole, ont élu dans la matinée le nouveau bureau de cette organisation créée en 1946, qui revendique 210.000 adhérents (anciens exploitants inclus).
M. Rousseau, 49 ans, était le seul candidat à cette élection au sein d’une organisation attachée à afficher un front uni, indépendamment de tiraillements internes. Il prend la suite de l’éleveuse de porcs Christiane Lambert qui a incarné le syndicat patronal pendant six ans avant d’annoncer, fin 2022, qu’elle ne souhaitait pas de troisième mandat. Mme Lambert reste présidente du Copa, principale organisation de défense des intérêts des agriculteurs au niveau européen.
Un « productivisme » face à la biodiversité et au bien être des animaux
Dans un entretien accordé à l’AFP, M. Rousseau a expliqué qu’il avait pour objectif, à l’issue de son mandat de trois ans, que les Français « continuent à avoir une alimentation produite en France, ce qui est de moins en moins le cas » (60% des fruits et la moitié des poulets sont importés). « Il faut qu’on continue à produire, et dire cela, ce n’est pas du productivisme », a-t-il déclaré, défendant la nécessité d’améliorer la « compétitivité » des productions françaises dans un marché ouvert.
Il est régulièrement reproché à la Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles (FNSEA) d’alimenter le « productivisme », une agriculture attachée avant tout à faire du volume au détriment de la biodiversité et du bien-être des animaux d’élevage.
Le ministre de l’Agriculture, Marc Fesneau, a été applaudi, lors du dernier congrès de la FNSEA fin mars, en annonçant qu’il avait demandé à l’agence sanitaire Anses une « réévaluation de sa décision » sur l’herbicide S-métolachlore, très utilisé sur les maïs, soja et tournesol. L’agence avait annoncé le 15 février vouloir interdire les principaux usages de ce produit, dont les dérivés chimiques (métabolites) ont été détectés au-delà des limites autorisées dans des eaux souterraines – et donc potentiellement dans l’eau potable. Les métabolites dans l’eau, « évidemment que c’est un problème pour l’agriculteur que je suis, on ne vit pas à l’écart de la société », mais « s’il faut qu’on en sorte, on doit le faire de manière harmonisée » avec les voisins européens « et on doit le faire avec des solutions alternatives », a dit M. Rousseau à l’AFP.
Un « modèle de capitalisme à visage humain »
Producteur de grandes cultures (colza, tournesol, blé, betterave, maïs) en Seine-et-Marne, M. Rousseau est aussi président du groupe agro-industriel Avril, dont il gardera la tête.
Ce géant des huiles (près de sept milliards de chiffre d’affaires en 2021), doublé d’une société d’investissement, est connu du grand public pour les marques Lesieur et Puget, mais ce n’est qu’une partie de son activité. Il est aussi actif dans l’alimentation des animaux d’élevage, les agrocarburants ou encore la chimie des huiles et protéines végétales.
Avant lui, Xavier Beulin a porté cette double casquette de président de la FNSEA et d’Avril, jusqu’à son décès soudain en 2017. M. Rousseau lui avait succédé chez Avril.
Pour M. Rousseau, Avril n’a rien du « capitalisme débridé ». Lui parle d’un « modèle de capitalisme à visage humain ». Au moment de la création d’Avril en 1983, à l’initiative d’un membre de la FNSEA, l’idée était que « la totalité des bénéfices générés par cette entreprise soit réinvestie au profit de la ferme France et de la valorisation de nos débouchés. Le modèle est toujours le même aujourd’hui », a vanté M. Rousseau auprès de l’AFP.
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