Imaginez la maire de la ville de Paris, Anne Hidalgo, annonçant qu’elle possède des pouvoirs politiques au-delà de la législature de l’État et du système judiciaire et qu’elle répond seulement du président de la République. Sur une plaque financière mondiale à l’autre bout du monde, ce scénario fictif s’est réellement produit.
Le 16 septembre, le dirigeant de Hong Kong, Leung Chun-ying a expliqué aux journalistes lors d’une conférence de presse, que le bureau du chef de l’exécutif avait une « position légale spéciale qui transcende » les bras exécutifs, législatifs et judiciaires du gouvernement de la ville.
« Par conséquent, il est vrai que le chef de l’exécutif a un pouvoir supérieur » a déclaré Leung, dont les propos ont été rapporté par le média public Radio Television Hong Kong (RTHK).
Leung Chun-ying a défendu un discours prononcé quatre jours plus tôt par Zhang Xiaoming, principal responsable chinois du Bureau de Liaison de Hong Kong – la présence officielle du Parti Communiste Chinois dans la région – lors d’un séminaire sur le 25e anniversaire de la promulgation du document d’administration de Hong Kong, la Loi Basique.
Zhang Xiaoming avait déclaré que le chef de l’exécutif avait une « position légale spéciale qui prend le pas sur les organes administratifs, législatifs et judiciaires » et qu’il n’était « pas opportun de décrire le système politique de Hong Kong comme étant une séparation des pouvoirs. »
Zhang Xiaoming et Leung Chun-ying ont été depuis rudement critiqués par les législateurs, les universitaires et les membres du système judiciaire de Hong Kong. La ville méridionale chinoise, ancienne colonie britannique transformée en région administrative spéciale s’est vue garantir un « degré élevé d’autonomie » après être revenue en Chine continentale, en 1997.
Si Leung Chun-ying est « au dessus des pouvoirs législatifs, exécutifs et judiciaires, alors quelle est la différence entre Leung Chun-ying et un empereur féodal ? » a demandé Alan Leong, un législateur pro-démocratie de premier plan, lors d’un programme radio de RTHK.
Johannes Chan, doyen de l’Université de la faculté de droit de Hong Kong a expliqué à Radio Free Asia que la remarque de Zhang Xiaoming constituait une violation de la Loi Basique, qui définit clairement les tâches et les pouvoirs des trois branches du gouvernement. Ainsi, la déclaration de Zhang n’a pas de base légale a argué Chen.
Selon le South China Morning Post, un journal important de Hong Kong en langue anglaise, suite à la conférence de presse du chef de l’exécutif, le 16 septembre, Geoffrey Ma, chef de la justice de Hong Kong a insisté sur le fait que la ville jouit d’une indépendance judiciaire, en citant trois articles de la Loi Basique comme prévue.
Une crise existentielle ?
Shi Cangshan, analyste indépendant de l’élite politique chinoise, vivant à Washington, D.C pense que la question des pouvoirs du chef de l’exécutif a moins à voir avec la façon dont il est interprété qu’avec les réalités politiques actuelles de Hong Kong.
« Les résidents de Hong Kong s’inquiètent de cette situation, parce qu’il n’y a pas de surveillance de l’application de la loi chinoise, contrairement au système légal commun britannique, » a expliqué Shi Cangshan, par téléphone, à un journaliste d’Epoch Times.
Au cours des périodes coloniales, le chef de l’exécutif et avant lui, le gouverneur de Hong Kong avait une position spéciale au sein du gouvernement en relation avec la Grande-Bretagne. Si le chef de l’exécutif ou le gouverneur commettaient un crime impardonnable, ils étaient soumis au système judiciaire du Royaume-Uni.
Mais pour le régime chinois, « la loi est simplement un outil » a continué Shi. Le chef de l’exécutif pourrait avoir un pouvoir « transcendant », mais il n’est finalement qu’un valet du Parti Communiste chinois.
Depuis la rétrocession de Hong Kong à la Chine, le régime chinois s’est mêlé de la législature de la ville, y compris en tentant de passer une loi controversée sur la sécurité nationale en 2003.
L’année dernière, la législature de façade de la Chine a adopté un livre blanc en juin déclarant sa « compétence générale » sur Hong Kong. Le 31 août, Pékin a offert un plan de réforme des élections qui ont permis aux Hongkongais de voter pour un chef de l’exécutif par le suffrage universel, mais seuls deux ou trois candidats ont été nommés par un comité de candidature en phase avec les intérêts de Pékin.
Ces règles ont déclenché un tollé de la part des Hongkongais, qui ont vu le régime chinois revenir sur sa promesse de présenter une démocratie plus totale dans la ville et de revenir sur le principe de « un pays, deux systèmes. »
En guise de protestation, l’année dernière, des centaines de milliers de Hongkongais étaient descendus dans les rues pour les occuper pendant trois mois, lors du Mouvement des Parapluies. Cependant, lorsque le plan de réforme de l’élection du chef de l’exécutif est arrivé au vote en juin, il a été refusé par une écrasante majorité après que le groupe pro-Pékin ait effectué un débrayage de la onzième heure.
Frank Fang et Matthew Robertson ont contribué à ce reportage.
Version anglaise disponible à : Hong Kong Leader Says He’s Above the Law
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