Evguéni Prigojine, le chef du groupe mercenaire russe Wagner, ira s’installer en Biélorussie, pays voisin de la Russie, dans le cadre d’un accord qui vise à mettre fin à un coup d’État armé apparent par Prigojine contre la direction militaire de la Russie, selon le Kremlin.
Prigojine, proche allié du président russe Vladimir Poutine depuis une vingtaine d’années, a accepté de mettre fin à ce qu’il a décrit comme étant une « marche pour la justice » visant à renverser les dirigeants militaires de Moscou, après une médiation du président biélorusse Alexandre Loukachenko.
Le 24 juin, l’état-major de Loukachenko a indiqué que le dirigeant biélorusse avait reçu l’aval de Poutine pour négocier un accord permettant de mettre fin à l’avancée fulgurante des forces de Wagner vers Moscou.
En vertu de cet accord, Prigojine s’installera en Biélorussie et les poursuites pénales engagées contre lui en Russie seront abandonnées, a déclaré aux journalistes le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, le 24 juin. Les soldats de Wagner qui ont pris part à la rébellion armée ne seront pas inquiétés, en reconnaissance des services qu’ils ont rendus à la Russie.
Le porte-parole du gouvernement n’a pas voulu donner plus de détails sur les concessions faites à Prigojine pour qu’il accepte de donner l’ordre aux troupes de Wagner de se retirer. Il a juste été dit que Poutine avait garanti sa sécurité.
« Il n’y a pas d’autres conditions dont je puisse vous parler », a déclaré M. Peskov aux journalistes à Moscou, tout en qualifiant les événements de la journée de « tragiques ».
Après la signature de l’accord avec Loukachenko, Prigojine a publié sur sa chaîne Telegram un message audio dans lequel il indique avoir ordonné à ses hommes de faire demi-tour afin d’éviter de « verser du sang russe ».
Le chef de Wagner, qui, il y a des dizaines d’années, dirigeait un restaurant flottant à Saint-Pétersbourg, que Poutine fréquentait lorsqu’il était maire de la ville, a rappelé que ses troupes étaient parvenues à s’approcher à environ 200 km de Moscou.
Cette promesse par Poutine constitue un revirement brutal par rapport à son engagement antérieur de punir sévèrement les mutins.
« Tous ceux qui se sont délibérément engagés sur la voie de la trahison, qui ont préparé une insurrection armée, qui ont emprunté la voie du chantage et des méthodes terroristes subiront un châtiment inévitable, répondront à la fois devant la loi et devant notre peuple », avait déclaré Poutine dans un discours télévisé prononcé au Kremlin.
En réponse, un Prigojine déterminé avait rétorqué que lui et ses hommes n’avaient pas l’intention de faire marche arrière.
Au cours de leur brève mais audacieuse campagne contre les hauts gradés de l’armée russe, les forces de Prigojine ont réussi à s’emparer de Rostov-sur-le-Don, une plaque tournante logistique située dans le sud de la Russie, et qui joue un rôle clé dans l’effort de guerre en Ukraine.
Prigojine a été vu quittant Rostov-sur-le-Don plus tard le 24 juin.
Wagner en Ukraine
Le groupe Wagner, officiellement connu sous le nom de PMC Wagner ou Wagner Private Military Company, est une organisation paramilitaire russe qui a été identifiée pour la première fois en 2014, lorsqu’elle a soutenu les séparatistes pro-russes dans l’est de l’Ukraine.
Dans le cadre de la dernière « opération militaire spéciale » de la Russie en Ukraine, les forces de Wagner ont apporté un soutien essentiel au Kremlin, en menant la plupart des combats les plus violents dans la région du Donbas et en subissant des pertes importantes dans la lutte pour Bakhmut.
Toutefois, au fur et à mesure que les combats s’intensifiaient, Prigojine est devenu de plus en plus critique à l’égard des dirigeants militaires russes.
Les revers subis sur le champ de bataille en Ukraine, notamment les pertes importantes du groupe Wagner lors de fusillades sanglantes dans la lutte pour Bakhmut, ont conduit Prigojine à lancer une série d’accusations contre les hauts gradés de l’armée, leur reprochant notamment de ne pas leur fournir suffisamment de munitions.
Le point culminant a été son accusation du 23 juin dans un message sur sa chaîne Telegram à destination du ministre russe de la défense Sergei Shoigu, que le chef du groupe Wagner a accusé d’avoir « anéanti » ses combattants lors d’une apparente frappe aérienne de l’armée russe. Il a conclu son message en appelant à une mutinerie armée.
Le chef du groupe Wagner a épargné Poutine dans ses critiques et s’est concentré sur les chefs militaires russes. Il a accusé Shoigu d’avoir personnellement planifié une opération visant à détruire ses soldats.
Il a alors indiqué que le Conseil des commandants de Wagner avait pris la décision de s’opposer au « mal apporté par les dirigeants militaires » qui négligent et détruisent la vie de dizaines de milliers de soldats russes », peut-on lire dans une analyse de l’Institut pour l’étude de la guerre (ISW).
Il avait promis de « s’occuper » de ceux qui ont tué les soldats russes et de revenir en Ukraine une fois justice obtenue. Il a indiqué sur Telegram que la poussée de son groupe armé vers Moscou n’était pas un « coup d’État », mais seulement une « marche pour la justice. »
Certains analystes préviennent que la courte mutinerie de Prigojine pourrait bientôt connaître un nouveau chapitre.
« Ceux qui croient que cela va se terminer là se trompent lourdement », a déclaré Ivana Stradner, chargée de recherche à la Fondation pour la défense des démocraties, lors d’une interview accordée à Fox News.
« Poutine déteste la déloyauté plus que tout et le fait que [Prigojine] parte vivre en Biélorussie ne garantit pas qu’il ne va pas lui-aussi faire l’expérience des fenêtres ou du thé », a déclaré Mme Stradner, laissant entendre qu’une série d’incidents ou une fin suspecte par défenestration ou par empoisonnement n’étaient pas à exclure.
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