L’application de cette décision par le Conseil constitutionnel est reportée au 31 décembre 2020.
Le Conseil constitutionnel a censuré le 20 mai plusieurs dispositions portant sur l’accès de la Haute Autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur internet (Hadopi) à « tous documents », dont des données de connexion des internautes. Il a toutefois reporté au 31 décembre 2020 l’application de sa décision, au regard de « conséquences manifestement excessives » d’une abrogation immédiate de ces dispositions du code de la propriété intellectuelle.
« Le législateur n’a pas entouré la procédure » mise en œuvre par Hadopi « de garanties propres à assurer une conciliation qui ne soit pas manifestement déséquilibrée entre le droit au respect de la vie privée et l’objectif de sauvegarde de la propriété intellectuelle », ont expliqué les « sages » dans leur décision.
Le Conseil constitutionnel juge la loi Hadopi contraire à la Constitution https://t.co/je6r1P34u8
— Siècle Digital (@Siecledigital) May 21, 2020
Des informations « attentatoires à la vie privée »
Toutes les dispositions de l’article L331-21 en vigueur depuis la création de la Hadopi en 2009, qui définissent les pouvoirs de collecte des agents auprès des opérateurs télécoms, sont censurées. Le Conseil constitutionnel limite l’accès des données à l’identité des auteurs d’infraction et à leurs coordonnées électroniques, postales, et téléphoniques, et censure l’accès aux données de connexion détenues par les opérateurs de communication électronique.
Celles-ci « fournissent sur les personnes en cause des informations nombreuses et précises, particulièrement attentatoires à leur vie privée. Elles ne présentent pas non plus nécessairement de lien direct » avec l’obligation des internautes à veiller à ce que leur accès à internet ne soit pas utilisé pour échanger illégalement des fichiers.
Un des requérants, l’association de défense des internautes la Quadrature du net, a d’abord réagi avec enthousiasme à cette censure partielle, estimant que la Hadopi était « vaincue ». Elle a toutefois considéré, dans un second communiqué, que « cette décision pourrait constituer une victoire nettement plus modeste »: « Malgré la restriction du champ des données de connexion accessibles à la Hadopi – qui reste une victoire -, une lecture plus attentive nous amène à penser que demeure une interprétation selon laquelle son activité devrait pouvoir persister », écrit l’association.
Contrairement à ce que laisse penser la @laquadrature, la Hadopi n’est pas morte du tout. Les points retoqués par le Conseil Constitutionnel ne changeront rien pour les internautes. https://t.co/K31TklHLcZ
— Raphael Grably (@GrablyR) May 20, 2020
Une « riposte graduée »
Pour mettre en œuvre en France la « riposte graduée » contre le piratage via les réseaux de pair à pair (P2P), la Hadopi reçoit des représentants des artistes (comme la Sacem) les adresses IP des internautes repérés en train d’échanger des fichiers de manière illégale, puis demande aux fournisseurs d’accès (Orange, Free, SFR, etc.) les coordonnées des abonnés utilisant ces adresses IP, afin de leur envoyer des messages d’avertissement.
En 2015, le Conseil constitutionnel avait jugé contraires au droit au respect de la vie privée des dispositions instaurant un droit de communication des données de connexion au profit des agents de l’Autorité de la concurrence, selon des modalités analogues au cas de la Hadopi.
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Dix ans de lutte
« Hadopi est vaincue », applaudie la Quadrature du net qui est l’origine de la question prioritaire de constitutionnalité (QPC). « Il s’agit de l’aboutissement de 10 ans de lutte pour La Quadrature du Net. Si nous avons été nombreuses à nous moquer, avant son adoption, de l’inutilité de la HADOPI, il ne faut pas minimiser la nocivité qu’aura eu son action en 10 années », affirme l’association dans un communiqué.
« Elle aura vivement dissuadé la population de recourir à la pratique vertueuse, libre et décentralisée qu’est le partage d’œuvres de pair à pair. Au contraire, la HADOPI aura forcé nombre d’internautes dans les bras d’une poignée de méga-plateformes, licites ou non, qui auront centralisé les échanges culturels en quelques points dominants. Cette centralisation aura surtout permis à ces méga-plateformes d’imposer leurs conditions aux artistes. Au final, à part ces plateformes, tout le monde – internautes, artistes, etc. – aura perdu au change », conclue-t-elle.
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