Aide techniques pour développer les projets dans les villages, financements pour encourager les maires à protéger leurs espaces naturels… . Matignon a dévoilé mercredi une série de mesures du plan « France ruralités », que détaillera jeudi la Première ministre lors d’un déplacement dans la Vienne.
Ce plan d’une quarantaine de mesures est l’aboutissement « d’un an de travail partenarial particulièrement intense centré sur l’enjeu de l’équité territoriale, comment on assure à tous les territoires et en particulier aux territoires ruraux les mêmes opportunités », a expliqué Matignon lors d’un point presse.
Le gouvernement espère ainsi combattre le sentiment de relégation et de recul des services publics qui domine dans certaines zones rurales et a entraîné une vague de votes pour le Rassemblement national lors des élections de 2022. « Les habitants de ces territoires ont le sentiment que tout est plus compliqué pour eux (…). Je veux leur dire que la ruralité est une chance pour notre pays », a déclaré Élisabeth Borne dans un entretien au Figaro mercredi soir.
Une stratégie sur quatre axes
Pour répondre aux enjeux spécifiques au monde rural, qui représente 22 millions d’habitants et 90% de la superficie de l’Hexagone, la stratégie repose sur quatre axes. Un programme « Villages d’avenir » de 15 millions d’euros sera lancé pour aider les petites communes à mener à bien leurs projets, à l’instar des programmes de « revitalisation » des centres-villes comme « Action cœur de ville ». Et 100 chefs de projets « ingénierie » seront déployés dans les préfectures.
Parmi les mesures très attendues, les villages seront rémunérés grâce à la dotation « biodiversité » qui sera portée de 42 millions d’euros « à plus de 100 millions d’euros » afin de protéger les « aménités rurales », à savoir des espaces naturels protégés (parcs naturels), mais aussi des espaces n’ayant aujourd’hui aucune valeur marchande (forêts, étangs, sols) pour les communes.
Les territoires ruraux « représentent des enjeux extrêmement importants en termes de puits de carbone, de transition agricole, de production d’énergies renouvelables et ce rôle (…) les place au cœur de la planification écologique », a commenté Matignon.
Plus de 100 millions investis
« France ruralités » prévoit également un plan d’action pour améliorer le quotidien des habitants et lutter contre un sentiment d’abandon de l’État, après des années de politique en faveur des grandes métropoles. Côté transports, un fonds de 90 millions d’euros sur trois ans permettra ainsi d’aider les collectivités à déployer des services de mobilité « innovants et solidaires » pour que les gens « soient moins dépendants de leur voiture ».
Face à la dégradation du bâti dans les centres-bourgs, une « prime de sortie de la vacance » d’un budget total de 5 millions d’euros sera mise en place pour remettre des biens immobiliers sur le marché de la résidence principale. Pour développer les commerces de proximité absents dans 20.000 communes, les projets d’implantation seront soutenus « à hauteur de 36 millions d’euros sur trois ans », a précisé la Première ministre.
Pour l’accès aux soins, l’une des premières préoccupations d’un monde rural particulièrement touché par les déserts médicaux, le gouvernement va lancer 100 « médico-bus » dotés de spécialistes, notamment des gynécologues, là « où il est le plus difficile d’accéder » aux soins. En outre, le nombre de maisons pluridisciplinaires de santé passera de 700 à 1400, a précisé Mme Borne.
Sur l’éducation, les élus ruraux auront par ailleurs une visibilité « sur trois ans » en cas de fermeture de classe, et 3000 places seront créées dans les « internats d’excellence ».
Zones de revitalisation rurale
Dernier axe : le dispositif des zones de revitalisation rurale (ZRR) – qui permet aux entreprises, collectivités, etc. En zone rurale de bénéficier d’exonérations fiscales et sociales – sera pérennisé. Sa cartographie sera réformée pour toucher les communes les plus fragiles.
Ce plan arrive à un moment charnière pour les territoires ruraux, où les habitants ont à la fois le sentiment que les difficultés persistent, voire s’aggravent. « Et simultanément, un certain nombre d’indicateurs montrent qu’on est dans un moment de « renouveau rural » avec des territoires qui attirent », a souligné le cabinet d’Élisabeth Borne.
« Ce plan est une évolution forte de la reconnaissance de la ruralité et de ses besoins, mais aussi du service rendu à la nature, qui est une démarche nouvelle », a réagi Michel Fournier, président de l’Association des maires ruraux de France (AMRF), qui a travaillé étroitement avec le gouvernement sur le sujet. « La grosse satisfaction, c’est qu’on revient à une politique d’aménagement du territoire qui avait été oubliée pendant de nombreuses années avec des territoires ruraux mis à l’écart pendant trop longtemps », a-t-il ajouté, saluant le « gros travail » de la ministre chargée de la Ruralité Dominique Faure.
« La ruralité est enfin prise en compte par le gouvernement et une première marche a été franchie, même si sur la santé, l’éducation, il faudra aller plus loin pour garantir une offre à hauteur des besoins », a estimé de son côté le sénateur Bernard Delcros (Union centriste), président du Parlement rural, une association de promotion du monde rural.
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