Le « grand gouffre » du retour à la terre pour les skippers du Vendée Globe

Par Epoch Times avec AFP
13 mars 2021 14:14 Mis à jour: 13 mars 2021 14:14

« Il y a un grand gouffre quand on s’arrête »: la fin du Vendée Globe est synonyme pour les navigateurs d’un grand soulagement et de moments d’intense bonheur, mais aussi d’une lente convalescence tant physique que psychologique.

« Les premières heures sont géniales, tout se passe bien, c’est les retrouvailles, la première douche, la première nuit, et puis après il y a toute la fatigue qui te tombe dessus », témoigne Jérémie Beyou quelques semaines après son arrivée, le 6 février, dans le port vendéen des Sables d’Olonne.

« Il y a un grand gouffre quand on s’arrête », assure le skipper de Charal, 44 ans, disant avoir réalisé depuis son arrivée un bilan médical mais aussi psychologique.

« Je passe un peu par tous les états dans une même journée ces jours-ci », raconte celui qui était parti grand favori mais est arrivé en 13e position en raison d’avaries. « Je ne dors que d’un œil ou d’une oreille comme si j’étais toujours sur le bateau et que je m’attendais à ce qu’il se passe quelque chose », explique le marin qui participait à son 4e Vendée Globe.

Des questions existentielles

« Ils ont vécu quelque chose que nous, terriens, on n’a pas l’occasion de vivre, atterrir après ça ce n’est pas simple », analyse Jean-Yves Chauve, médecin de la course depuis sa première édition en 1989, assurant avoir « connu un divorce au large ». « Il y a des questions existentielles qui peuvent se poser », note-t-il.

Des tels changements de vie restent cependant assez exceptionnels et le plus compliqué reste la gestion du vide qui peut se faire ressentir quelques jours ou semaines après l’arrivée.

« Une fois qu’on est monté en haut de l’Everest il faut en revenir, mais qu’est-ce qu’on fait après ? Y retourner c’est presque la solution de facilité », juge le Dr Chauve.

Encore de belles courses à venir

« Pendant plusieurs années j’ai mangé, j’ai dormi Vendée Globe, jour et nuit. J’aurais pu effectivement ressentir ce vide une fois ce gros objectif terminé, mais heureusement j’ai encore de belles courses à venir cette année et l’année prochaine, ça me permet de me concentrer là-dessus », note Charlie Dalin, se réjouissant de ne pas souffrir du « fameux Vendée Blues », cette décompression qui peut accompagner le retour à la terre ferme.

Le navigateur de 36 ans remettra son titre en jeu en novembre lors de la Transat Jacques-Vabre avant de participer à la Route du Rhum en 2022. Dans son chantier de Concarneau, il s’affaire ainsi autour de son bateau en cours de modification afin de « le rendre encore plus fiable et performant ». 

Physiquement en revanche, le retour n’a pas été simple pour le navigateur normand qui s’est classé deuxième pour sa première participation. « J’ai un peu mal partout, aux genoux, aux articulations, je sens que je ne peux pas me permettre de forcer, le corps ne suivrait pas », décrit-il, au terme d’une séance d’entraînement avec le pôle Finistère course au large.

En convalescence du Vendée Globe

Bien qu’extrême, l’épreuve, autour du monde en solitaire et sans escale, n’en reste pas moins une « course de sédentaires », note le Dr Chauve. « Les navigateurs vivent assis sur le bateau, il y a une importante fonte musculaire au niveau des membres inférieurs », explique-t-il.

Charlie Dalin est « extrêmement fatigué », confirme Ronan Martin, son préparateur physique. « Il a du mal à se remettre dans le bain », poursuit-il, évaluant à trois mois encore le temps nécessaire pour qu’il retrouve sa forme d’avant. Il a « perdu en puissance, en force et en endurance », énumère-t-il.

« Il y a un temps d’adaptation c’est sûr », résume Jean Le Cam, arrivé au pied du podium après un spectaculaire sauvetage de son concurrent Kévin Escoffier. « On est un peu décalé… voilà, t’es un peu dans les nuages », décrit le skipper de 61 ans après un temps de pause, disant prendre pour sa part les choses « au jour le jour ». « On est en convalescence du Vendée Globe quoi ».

 

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