Le micro-Lycée de Sénart, un laboratoire pédagogique

6 décembre 2017 08:10 Mis à jour: 5 décembre 2017 23:27

Cet article est publié en partenariat avec la revue « Le magazine de l’Éducation » du laboratoire EMA-TechEduLab de l’Université de Cergy-Pontoise.


À la fin des années 90, l’État français commençait à peine à se préoccuper de la question du décrochage scolaire. Un collectif de pédagogues militants, impliqués dans des actions de remédiation auprès de jeunes déscolarisés, s’engagea alors dans la création d’une structure expérimentale dédiée au raccrochage scolaire. Son objectif était d’offrir à des jeunes soucieux de reprendre leurs études une authentique « seconde chance », c’est-à-dire la possibilité de revenir en formation initiale pour préparer le baccalauréat.

Une autre rencontre avec l’apprentissage
Considérant le « décrocheur » comme l’analyseur des dysfonctionnements de l’école concernant la qualité du climat scolaire, les modalités d’enseignement et la mise en œuvre de l’orientation, ces enseignants ont conçu, pour les élèves, les conditions d’une autre rencontre avec l’apprentissage. Pour cela ils se sont inspiré des mouvements pédagogiques de l’éducation nouvelle, très critique à l’égard du système scolaire.

Ouvert depuis septembre 2000 et pris en charge collégialement par une équipe dotée d’une autonomie pédagogique et organisationnelle, Le Micro-Lycée de Sénart, situé en Seine-et-Marne, rescolarise une centaine de jeunes du secteur géographique, âgés de 17 à 25 ans. Établissement non dérogatoire, il accueille des élèves ayant obtenu soit un BEP, soit le passage en seconde générale.

À la marge, après l’entretien préalable à toute inscription, l’équipe peut accepter des jeunes dont les caractéristiques du parcours à l’école et en dehors de l’école les convainquent de leur laisser tenter l’aventure. Ce sont avant tout la motivation, les éléments de projet du jeune et sa capacité à adhérer aux valeurs et aux modalités d’organisation du Micro-Lycée qui déterminent la décision de l’équipe.

À Sénart : autant d’élèves, autant de parcours. (Valérie Melin)

Des parcours individualisés
Une fois cette étape franchie, le jeune entre dans la période d’accueil, temps de familiarisation avec le fonctionnement de la structure, qui lui permet de s’assurer de son choix et de préciser la configuration de son projet de rescolarisation.

En effet, une des caractéristiques de cet établissement consiste à construire avec le jeune un parcours individualisé de formation et de préparation au baccalauréat grâce au travail d’accompagnement que rend possible la « référence », sorte de tutorat dont la vocation est de restaurer la relation de confiance, bien souvent perdue, entre l’élève et l’enseignant et de favoriser le renforcement de l’estime de soi particulièrement mise à mal par le décrochage.

La possibilité de passer le baccalauréat sur plusieurs années contribue aussi à assouplir le cadre de la reprise d’études dans une école dont les enseignants refusent d’accaparer tout le temps de l’élève qui peut donc donner place à d’autres dimensions de son existence (activité salariée, éducation d’un enfant, projets artistiques, etc.) et être disponible pour une reconstruction personnelle, processus inhérent au raccrochage scolaire et qui ne peut se contraindre.

Socialisation et insertion
L’équipe éducative, si elle est soucieuse d’individualisation et convaincue de la nécessité de prendre en compte la globalité du jeune par delà la figure de l’élève, reconnaît aussi la valeur fondamentalement socialisatrice de l’école. Par la mise en place d’un conseil collectif qui concourt au développement d’une citoyenneté active, ancrée dans le quotidien, elle mobilise les élèves pour penser avec elle la structure, la parfaire et, si besoin, la réformer dans un souci de transparence et de démocratie.

Sa capacité inclusive, favorisant le bien-être et le pouvoir d’agir des élèves et son incidence en terme d’insertion socio-économique ont incité les pouvoirs publics à développer dans d’autres académies « les bonnes pratiques » du Micro-Lycée de Sénart dont on tend à oublier le questionnement critique sur l’école et la dimension de laboratoire pédagogique.

Valérie Melin, Maître de conférence en Sciences de l’éducation Profeor-CIREL EA 4354, Université Lille 3 – Université de Lille

La version originale de cet article a été publiée sur The Conversation.

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