Les autorités électorales en Ukraine ont récemment nommé officiellement Volodymyr Zelenskiy, star de la télévision, comédien et novice politique, comme nouveau président.
Les résultats officiels du second tour du scrutin du 21 avril ont indiqué que M. Zelenskiy remportait haut la main l’élection présidentielle face au président sortant Petro Porochenko en remportant 73 % des suffrages au second tour.
Parmi les principaux facteurs qui ont contribué à cette victoire, on peut citer le climat anti-establishment européen et la promesse de V. Zelenskiy de lutter contre la corruption, d’améliorer les conditions commerciales et de « réunifier » son pays en faisant sortir le président russe Vladimir Poutine de la région occupée du Donbass.
Il y a deux semaines, V. Poutine a signé un décret simplifiant la procédure de délivrance des passeports russes aux résidents de la région du Donbass. L’occupation pesait lourdement sur le trésor russe, et il y a également des raisons d’affirmer que certains fonds de pension du peuple russe ont servi à financer l’invasion illégale.
La mesure de V. Poutine accélérera le traitement des demandes de citoyenneté russe des Ukrainiens (pour la plupart des Russes de souche vivant dans la partie de l’Ukraine contrôlée par les séparatistes soutenus par la Russie) qui, pour devenir citoyens russes, ont du prêter allégeance à la « Mère Russie ». M. Poutine a ajouté plus tard que la Russie pourrait simplifier cette procédure pour tous les citoyens de l’Ukraine souhaitant acquérir la citoyenneté russe.
Le décret russe a irrité, à juste titre, M. Zelenskiy, qui a répondu qu’« un passeport russe donne en fait le droit d’être arrêté pour protester pacifiquement, de ne pas avoir d’élections libres et pluralistes et d’oublier complètement les libertés et les droits de l’homme naturels ».
Il a ajouté que la citoyenneté ukrainienne signifie liberté, dignité et honneur : « C’est ce que nous avons défendu et défendrons. L’Ukraine n’abandonnera pas sa mission de servir d’exemple de démocratie aux pays post-soviétiques. Et une partie de cette mission consistera à fournir protection, asile et citoyenneté ukrainienne à tous ceux qui sont prêts à lutter pour la liberté. Nous fournirons asile et assistance à tous ceux qui sont prêts à se battre à nos côtés pour notre liberté et la vôtre. »
Qu’en est-il de la perception du marché en Europe d’une présidence Zelenskiy ?
Selon Timothy Ash, stratège senior des marchés émergents chez Bluebay Asset Management, les marchés ont bien pris la victoire de V. Zelenskiy. Les élections ont été libres et équitables. Le président sortant, M. Porochenko, offre son aide pour assurer une transition sans heurt du pouvoir. Les gouvernements occidentaux favorisent le nouveau président et fourniront une assistance dans des domaines critiques comme le processus de paix de Minsk et les relations avec le Fonds monétaire international (FMI).
Le filet de sécurité macroéconomique de l’Ukraine est bien meilleur de nos jours, avec des déficits beaucoup plus faibles (2 à 3 % du PIB), une dette publique plus faible, une monnaie stable, des réserves de change de plus de 20 milliards de dollars américains à la banque centrale et des technocrates respectés à la banque et au ministère des Affaires étrangères.
Timothy Ash recommande de surveiller de près cinq indicateurs :
Tout d’abord, que V. Zelenskiy milite ou non en faveur d’élections législatives anticipées. Certains veulent qu’il traduise sa victoire écrasante en une majorité au parlement de la Rada. Cependant, c’est techniquement difficile étant donné que les élections anticipées de la Rada ne sont pas permises six mois avant leur tenue, dans ce cas-ci, le 27 octobre, ce qui ne laisse que quelques jours pour les déclencher. La date limite pour la convocation d’élections législatives anticipées est pratiquement passée, à moins que M. Poroshenko ne veuille rendre service à M. Zelenskiy en organisant des élections anticipées, ce qui semble peu probable.
Deuxièmement, comment V. Zelenskiy va-t-il interagir avec la Rada et le Conseil des ministres ? Il ne peut nommer que quelques ministres au gouvernement, dont les ministres de la Défense, des Affaires étrangères et le chef du Conseil de sécurité nationale.
Il est incapable de renverser le gouvernement sans une motion de défiance soutenue par la majorité à la Rada, mais seulement un vote de ce genre est permis par mandat de la Rada et il a déjà été utilisé. Sans cela, il faudrait une majorité constitutionnelle que V. Zelenskiy aurait probablement du mal à obtenir.
Il doit travailler avec le cabinet et le parlement existants jusqu’en octobre au moins, mais il pourrait y avoir des défections massives des blocs parlementaires existants vers le parti du Serviteur du peuple de Zelenskiy.
Troisièmement, il sera important de savoir qui M. Zelesnkiy nomme à des postes clés, notamment son chef de l’administration, son ministre des Affaires étrangères, son ministre de la Défense et son chef du Conseil de sécurité nationale. Ces nominations pourraient être influencées par les alliés occidentaux.
Quatrièmement, comment la présidence Zelenskiy interagira-t-elle avec les oligarques, en particulier l’ancien propriétaire de la Privatbank, Igor Kolomoisky, qui pourrait avoir une influence sur V. Zelenskiy. La question de la Privatbank, la plus grande banque de Ukraine, pourrait être un facteur de rupture d’accord pour le FMI, à moins qu’elle ne soit résolue d’une manière compatible avec la bonne gouvernance et les meilleures pratiques internationales.
Cinquièmement, les relations avec la Russie. M. Zelenskiy a suggéré de nouvelles perspectives pour tenter d’assurer la paix avec la Russie, mais il ne « vendra jamais son âme » à la Russie. Il disposera d’un grand choix de personnes d’expérience pour servir en tant que ministre des Affaires étrangères, et recevra un bon soutien des gouvernements occidentaux. V. Poutine, comme beaucoup d’autres, tente sans doute d’analyser exactement ce que signifiera une présidence Zelenskiy.
Dans l’ensemble, les électeurs ukrainiens ont une fois de plus montré au monde ce que des élections libres et régulières peuvent apporter en termes de changement démocratique pacifique.
David Kilgour, avocat de profession, a siégé à la Chambre des communes pendant près de 27 ans. Il est l’auteur de plusieurs livres et co-auteur avec David Matas de Bloody Harvest (Massacre meurtrier) : Le meurtre du Falun Gong pour leurs organes. Avant de servir au Parlement, M. Kilgour a travaillé comme procureur de la Couronne pour la ville de Vancouver (1967-1968), au ministère de la Justice d’Ottawa (1968-1969), au gouvernement du Manitoba (1971-1972) et au gouvernement de l’Alberta (1972-1979).
Les opinions exprimées dans cet article sont celles de l’auteur et ne reflètent pas nécessairement celles d’Epoch Times.
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