Le Parti communiste chinois ouvre la voie pour une longue présidence de Xi Jinping qui est en plein combat factionnel

26 février 2018 18:28 Mis à jour: 26 février 2018 18:28

Le régime chinois a officiellement proposé d’abolir la limite de deux mandats pour le président du pays, établie dans la constitution du Parti communiste chinois (PCC), ouvrant ainsi la voie à un troisième mandat ou, peut-être, à une présidence à vie à l’actuel dirigeant Xi Jinping.

Les observateurs avaient déjà prédit cette possibilité devant le fait que Xi Jinping n’avait pas nommé de successeur potentiel à la plus haute instance du Parti, lors du 19e Congrès national du PCC en octobre dernier.

Actuellement, la règle de la constitution limite à deux le nombre de mandats présidentiels de cinq ans. Président de la République populaire de Chine depuis 2013, Xi Jinping devrait normalement quitter ses fonctions en 2023, mais la révision de la règle pourrait tout changer.

Vue générale du Grand palais du Peuple à Pékin lors du 19e Congrès quinquennal du PCC, le plus important conclave politique du Parti, le 24 octobre 2017. (Lintao Zhang/Getty Images)

Selon l’annonce du 25 février de l’agence officielle Xinhua, cette proposition a été faite par le Comité central du PCC, qui comprend 204 membres d’élite du Parti (et 170 suppléants).

La pratique du PCC prévoit que son chef, le Secrétaire général du PCC, occupe également le poste du chef des forces armées, lesquels n’ont pas de limite de mandat. Xi Jinping pourrait théoriquement rester sur l’un de ces postes, ou créer un nouveau poste qui lui permettrait de rester au pouvoir.

Le Comité central a également proposé d’incorporer dans la constitution la marque idéologique du PCC apportée par Xi Jinping, connue sous le nom de la « Pensée de Xi Jinping sur le socialisme avec des caractéristiques chinoises pour une nouvelle ère » – un changement qui a été décidé en octobre dernier lors du 19e Congrès du Parti.

Les changements constitutionnels font partie des tentatives de Xi Jinping de consolider davantage son pouvoir au sein du Parti marqué par des batailles constantes de factions.

Le Parti divisé

De même, les dates prévues pour la prochaine réunion politique du Comité central, connue sous le nom de troisième session plénière, donnent des indices sur les luttes qui se poursuivent entre les factions au sein des échelons supérieurs du Parti.

Lors de cette session plénière du 26 au 28 février, l’élite du Parti discutera des réformes et des nominations du personnel, explique l’agence Xinhua.

Quelques jours plus tard, les 3 et 5 mars respectivement, se réuniront la Conférence consultative politique du peuple chinois, la plus haute instance consultative politique du PCC, et l’Assemblée nationale populaire, la législature fantoche du régime qui fait office de parlement-tampon. Ces deux sessions sont connues sous le nom de Lianghui, ce qui signifie « deux réunions » en chinois.

D’après l’analyste politique chinois Chen Pokong, ce calendrier serré et inhabituel suggère que Xi Jinping n’exerce toujours pas un contrôle complet sur les hauts dirigeants du Parti et fait face aux défis factionnels à son pouvoir.

Chen Pokong a expliqué le raisonnement derrière son analyse dans une vidéo postée sur YouTube le 24 février.

Que la troisième session plénière du Comité central et le Lianghui ne soient séparés que de quelques jours suggère qu’il y a des choses urgentes dont Xi Jinping doit s’occuper avant que les réformes ou les décisions sur le personnel ne soient approuvées sans discussion lors du Lianghui

Les plans de Xi Jinping ont peut-être rencontré des obstacles au sein du Comité permanent du Politburo, l’organe décisionnel le plus puissant du Parti, d’où la nécessité pour le dirigeant chinois de convoquer une réunion d’urgence du Comité central où il a plus de soutien politique, explique Chen Pokong.

Parmi les sept membres du Comité permanent du Politburo (dont Xi Jinping fait partie), Wang Huning et Han Zheng ont des liens antérieurs avec l’ancien chef du Parti Jiang Zemin et sa faction, alors que Li Keqiang et Wang Yang sont considérés comme des membres de la faction de « Tuanpai » (ceux qui sont affiliés à la Ligue de la jeunesse communiste). Il ne reste que Xi Jinping lui-même, son ancien subordonné Li Zhanshu et Zhao Leji, qui a démontré sa loyauté envers Xi Jinping, mais qui n’a pas travaillé aussi étroitement avec lui, précise Chen Pokong.

Les membres du Comité permanent du Politburo (de g à d) : Han Zheng, Wang Huning, Li Zhanshu, le dirigeant chinois Xi Jinping, le Premier ministre Li Keqiang, Wang Yang et Zhao Leji rencontrent les journalistes au Grand palais du Peuple à Pékin, le 25 octobre 2017. (Wang Zhao/AFP/Getty Images)

Les plans de Xi Jinping n’ont peut-être pas recueilli suffisamment de soutien au sein de cet « équilibre de pouvoir entre les factions », alors il se tourne vers le Comité central pour du soutien, estime Chen Pokong dans la vidéo.

En même temps, les dates de la troisième session plénière du Comité central sont inhabituelles pour une autre raison : le Comité central tient généralement sa deuxième session plénière au début de l’année, où ses membres discutent des nominations du Parti. Après cela, le Lianghui approuve ces nominations au mois de mars. Il est suivi par la troisième session plénière du Comité central à l’automne, où les réformes du Parti sont élaborées.

Cette année, la deuxième et la troisième session du Comité central ne sont séparées que d’un mois – le deuxième plénum vient de se terminer à la mi-janvier. Ce changement du calendrier souligne une fois de plus l’urgence de ce que Xi Jinping voudrait adopter.

En outre, le fait que les nominations du personnel n’aient pas été finalisées lors de la session précédente et restent à l’ordre du jour du troisième plénum du Comité central suggère que les batailles entre les factions auraient pu avoir bloqué les décisions sur ces nominations. « Il reste à voir de combien de pouvoir Xi Jinping pourrait s’emparer », a conclu Chen Pokong.

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