Le PCC censure le discours du Premier ministre comparant l’économie chinoise post-pandémique à un patient malade

Par Jessica Mao et Lynn Xu
10 juillet 2024 23:41 Mis à jour: 14 juillet 2024 21:18

Selon certains analystes chinois, le Premier ministre chinois Li Qiang est confronté à un retour de bâton de la part du dirigeant chinois Xi Jinping à la suite de ses remarques peu valorisantes sur l’économie chinoise.

Pékin a censuré le discours que le Premier ministre a prononcé au Forum d’été de Davos le mois dernier, dans une tentative de dissimuler l’état économique actuel de la Chine au milieu des luttes de pouvoir au sein du Parti communiste chinois (PCC), selon l’éclairage de certains experts à Epoch Times.

Le Forum économique mondial (WEF) a organisé la 15e réunion annuelle des Nouveaux champions, ou Forum d’été de Davos, dans la ville chinoise de Dalian, du 25 au 27 juin.

Dans son discours, Li Qiang a comparé le redressement économique de la Chine, après la pandémie, au rétablissement d’une personne souffrant d’une maladie grave, tout en proposant une solution pour relancer l’économie chinoise en difficulté.

« Au lieu d’administrer des médicaments puissants, il faudrait les ajuster avec précision et lentement selon la pratique de la médecine traditionnelle chinoise, de manière à reconstituer progressivement les racines », a-t-il proposé.

Les fondations de l’économie malade doivent être « consolidées et renforcées », a-t-il ajouté.

Le régime de Xi a réagi en censurant le discours du Premier ministre. Le commentaire sur la consolidation de l’économie chinoise a été supprimé de la couverture de l’événement par les médias d’État chinois. Cependant, certains médias chinois de la diaspora, comme Lianhe Zaobao à Singapour, ont conservé ses remarques.

Selon Lai Jianping, ancien avocat chinois spécialisé dans les droits de l’homme et président de la Fédération pour une Chine démocratique, basée au Canada, le discours de Li Qiang a irrité le chef du PCC.

« Le commandement suprême de l’économie chinoise est entre les mains de Xi. Pour Xi, ce n’est pas à Li Qiang de décider s’il peut administrer le médicament pour guérir l’économie », a expliqué Lai Jianping à l’édition en langue chinoise d’Epoch Times le 29 juin.

Il a fait remarquer que les commentaires de Li Qiang étaient similaires à ceux de son prédécesseur en révélant la situation économique réelle – un geste audacieux qui a suscité l’ire des membres de l’élite du Parti.

L’ancien Premier ministre, Li Keqiang, a déclaré publiquement, en mai 2020, que 600 millions de Chinois gagnaient moins de 1000 yuans (environ 127 euros) par mois.

En réponse, le 1er juillet de l’année suivante, pour commémorer le 100e anniversaire de la fondation du PCC, Xi a annoncé que « la Chine a construit une société modérément prospère ».

Affaiblissement du pouvoir du Premier ministre sous Xi

Certains observateurs chinois pensent que Xi veut limiter l’autorité de Li Qiang.

Par exemple, Xi a désigné un autre fonctionnaire à la place de Li Qiang pour assister à une importante conférence sur la science et la technologie le 25 juin.

Ding Xuexiang, membre du comité permanent du bureau politique du comité central, a assisté à l’événement et a prononcé un discours, faisant ainsi sa première apparition publique en tant que chef de la nouvelle commission centrale des sciences et des technologies.

Chen Pokong, un analyste de l’actualité chinoise basé aux États-Unis, a souligné sur sa vidéo YouTube qu’il n’est pas logique que Xi nomme Ding Xuexiang au lieu de Li Qiang à la tête de la commission.

« Ding Xuexiang n’a jamais été impliqué dans la science et la technologie ou l’économie dans sa carrière politique et n’a aucune expérience en matière d’autorité locale. En comparaison, Li Qiang a plus d’expérience [dans ces domaines] », a-t-il ajouté.

Chen Pokong estime que Xi avait l’intention de réduire l’influence du Premier ministre. « Lorsque l’ancien Premier ministre Li Keqiang était à la tête du National Science and Technology Leadership Group, il a obtenu le soutien de nombreux universitaires. Xi ne veut plus voir une situation similaire ».

Li Qiang est la deuxième personnalité la plus puissante du PCC. Il est membre du comité permanent du comité central et Premier ministre du Conseil d’État.

Selon Chen Pokong, malgré ses titres influents, le Premier ministre ne bénéficie pas d’un traitement de faveur et, contrairement aux hommes d’affaires qui possèdent des jets privés, il voyage à bord d’avions affrétés lorsqu’il se rend à l’étranger. « Xi veut limiter le pouvoir de Li Qiang et ne veut pas que le premier ministre attire trop l’attention. »

Lai Jianping, observateur de la Chine, partage le même point de vue que Chen Pokong, confiant que « le chef du PCC a déjà clairement défini la fonction de Li Qiang : il n’est qu’un secrétaire qui exécute les ordres et n’est pas autorisé à entrer dans le cercle décisionnel ».

Démantèlement du Conseil d’État

En ce qui concerne les réformes administratives passées de Pékin, Lai Jianping a précisé que le Premier ministre du Conseil d’État était principalement responsable du travail du gouvernement, tandis que le chef du PCC au pouvoir était principalement en charge des affaires du Parti. Cependant, sous Xi, le Conseil d’État a subi une transformation significative, puisqu’il a perdu la majeure partie de son pouvoir administratif dans la gestion du pays et de l’économie.

En mars 2023, Li Qiang a pris la tête du Conseil d’État. Lors de la première réunion ordinaire et de la première session plénière du Conseil d’État, il a souligné à plusieurs reprises que « le Conseil d’État est avant tout un organe politique » et qu’il doit être « orienté politiquement » et « soutenir fermement l’autorité et la direction centralisée du Comité central du Parti, avec Xi Jinping aux commandes ».

Parallèlement, le PCC a publié un plan de réforme des institutions du Parti et de l’État. Ce plan prévoyait la création de comités centraux chargés des questions financières, scientifiques et technologiques, ainsi que des affaires de Hong Kong et de Macao. Le Conseil d’État est devenu l’organe exécutif de ces comités, dépouillé de sa direction financière et placé sous la direction directe du Comité central.

En outre, Lai Jianping a précisé que le département central du travail social supervise l’administration nationale des plaintes et des propositions publiques. Il a ajouté que le PCC a également créé une nouvelle organisation, le Bureau national des données, sous la direction de la Commission nationale du développement et de la réforme. Toutes ces organisations fonctionnent indépendamment du Conseil d’État.

Xin Ning a participé à la rédaction de cet article

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