En moins d’un mois, les membres de l’association des anciens élèves de l’université Tsinghua (Pékin) en France ont reçu deux offres de recrutement en provenance de Chine. Le premier communiqué indiquait explicitement que l’offre faisait partie du « Programme des 1000 talents » de la Chine. Le second que le recrutement se concentrerait sur des domaines sensibles sanctionnés ou dirigés par les États-Unis, tels que la recherche et le développement de puces.
Le Parti communiste chinois (PCC) a lancé en décembre 2008 le programme « 1000 talents », conçu pour attirer des talents en Chine. Au cours des dix dernières années, plusieurs universitaires sino-américains ayant participé à ce programme ont fait l’objet d’enquêtes par les autorités américaines. Certains ont été condamnés à des peines de prison pour avoir enfreint les lois aux États-Unis.
Début février, un membre du groupe WeChat de l’association des anciens étudiants de l’université Tsinghua en France a posté une offre d’emploi pour le programme chinois des 1000 talents, promettant un processus confidentiel qui n’affecterait pas le travail ou la vie à l’étranger. Il a également affirmé que l’offre « resterait valide plus de dix ans ».
« Chers anciens élèves, le programme national des 1000 talents, qui offre les conditions de rémunération les plus élevées en Chine, a débuté ! Le montant total du bonus personnel non imposable est d’environ 13 millions de yuans (1,7 million d’euros), et il n’est pas nécessaire de retourner en Chine puisque vous pouvez postuler en ligne. Vous serez directement mis en contact avec les responsables du bureau gouvernemental des talents par l’intermédiaire de WeChat. Il n’y a pas de tiers, ni d’intermédiaire, l’ensemble du processus est confidentiel et n’affectera ni votre travail, ni votre vie à l’étranger », précise l’annonce.
Les candidats doivent répondre à des critères spécifiques, tels que le fait d’être titulaire d’un doctorat. De plus, les postulants de plus de 40 ans doivent occuper un poste supérieur ou égal à celui de directeur d’une entreprise bien connue en dehors de la Chine ou de professeur associé d’une université. Quant aux jeunes de moins de 40 ans, ils doivent avoir travaillé pendant plus de trois ans après l’obtention de leur doctorat.
Le 1er mars, la même personne du groupe WeChat a publié une autre annonce de recrutement. Il expliquait que son ancien professeur en Chine était aujourd’hui maire adjoint de la ville de Zhenjiang, dans la province de Jiangsu. Il a précisé avoir aidé son professeur à publier l’annonce au nom de la ville de Zhenjiang afin d’attirer des talents.
Dans le « package salaire et avantages » inclut dans l’offre, on peut lire en bas de page que « les subventions spécifiques peuvent varier légèrement en fonction des politiques locales et peuvent être discutées en détail pour mieux répondre aux souhaits du talent ». On peut constater que le recrutement de talents étrangers ne se limite pas à la ville de Zhenjiang, mais qu’il s’agit d’une initiative provinciale voire nationale.
Les domaines d’intérêt particulier, précisés dans l’annonce, comprennent « les puces informatiques de pointe, les superordinateurs, les logiciels d’automatisation de la conception électronique, l’intelligence artificielle, l’information et les télécommunications ».
Ces domaines font partie des secteurs clés visés par les sanctions imposées par les États-Unis dans le domaine de la technologie.
Affaires d’espionnage chinois aux États-Unis liées au programme
Depuis 2013, plusieurs affaires judiciaires aux États-Unis ont visé des scientifiques et des universitaires liés au programme « 1000 talents » du PCC.
Le 9 mai 2022, le Dr You Xiaorong (également connu sous le nom de Shannon You), une résidente du Michigan qui a participé au programme des mille talents, a été condamné à 14 ans de prison pour vol de secrets commerciaux, problèmes économiques, espionnage et fraude. En plus de la peine d’emprisonnement, You risque trois ans de liberté surveillée et une amende de 200.000 dollars.
You Xiaorong a volé des secrets commerciaux concernant la formule de revêtement « sans bisphénol A (BPA) » utilisée à l’intérieur des canettes de boisson. Elle a eu accès à des secrets commerciaux alors qu’elle travaillait pour The Coca-Cola Company à Atlanta et Eastman Chemical Company à Kingsport, dans le Tennessee. Le coût de la recherche et du développement de la formulation du revêtement sans BPA s’élevait à près de 120 millions de dollars.
Elle a utilisé les secrets commerciaux volés pour créer une nouvelle entreprise de revêtement en Chine en partenariat avec Weihai Jinhong Group Co, Ltd. Leur nouveau projet a reçu des millions de dollars de subventions de la part d’agences gouvernementales du PCC, y compris une subvention du « Programme des mille talents ». Le groupe Weihai Jinhong se décrit comme le centre national chinois de technologie d’entreprise et une unité de recherche nationale postdoctorale.
« Le comportement allégué dans l’acte d’accusation d’aujourd’hui illustre l’approche consistant à voler, reproduire et remplacer le développement technologique », a déclaré le procureur général adjoint Demers. « You Xiaorong est accusée d’un vol et d’un transfert flagrants et prémédités de secrets commerciaux d’une valeur de plus de 100 millions de dollars dans le but de créer une société chinoise qui concurrencerait les sociétés américaines dont les secrets commerciaux ont été volés. Malheureusement, la Chine continue d’utiliser ses programmes nationaux, tels que le programme ‘Mille talents’, pour solliciter et récompenser le vol de secrets commerciaux et de la propriété intellectuelle de notre pays, mais le ministère de la Justice continuera à donner la priorité à des enquêtes comme celles-ci, afin de s’assurer que la Chine comprenne que ce comportement criminel n’est pas une pratique commerciale ou de développement économique acceptable », a annoncé un grand jury, comme l’a rapporté DarkReading (un site d’information basé sur la sécurité dans le domaine de l’IT.).
Des scientifiques étrangers ont également participé au programme chinois « 1000 talents ».
Turab Lookman, ancien physicien informatique au laboratoire national de Los Alamos, a plaidé coupable devant le tribunal fédéral d’Albuquerque le 24 janvier 2020 pour avoir fait une fausse déclaration à un enquêteur du gouvernement concernant sa participation au programme des mille talents. Il risque jusqu’à cinq ans de prison et 250.000 dollars d’amende.
L’ancien professeur de l’Université de Virginie-Occidentale, le Dr James Patrick Lewis, qui a plaidé coupable en mars 2020, était spécialisé dans l’application des réactions moléculaires aux technologies de conversion du charbon. Il a signé un contrat de travail dans le cadre du programme des mille talents en juillet 2017 avec l’Académie chinoise des sciences. Lewis a travaillé en Chine pendant trois années consécutives – pas moins de neuf mois par an – pour assurer la formation des futurs chercheurs et publier des articles pour les étudiants de l’Académie chinoise des sciences, en échange d’un salaire et de subventions d’environ 800.000 dollars.
En mars 2018, Lewis a demandé à l’université de Virginie-Occidentale de le libérer de sa charge d’enseignant pour le semestre d’automne 2018, invoquant la nécessité de s’occuper d’un bébé à venir. En réalité, Lewis allait travailler en Chine tandis que l’université continuait à lui verser son salaire.
Le recrutement du PCC à l’étranger se poursuit
Après que les États-Unis aient lancé des enquêtes sur les participants au programme des 1000 talents, le PCC a ordonné vers la fin de l’année 2018 de cesser de mentionner explicitement le programme. En avril 2020, le nom a soudainement disparu sans laisser aucune trace sur l’Internet en Chine.
Xia Yifan, expert de la Chine, a déclaré le 4 mars à Epoch Times qu’il pensait que le PCC continuerait à recruter des talents en dehors de la Chine, en particulier dans les pays développés.
« J’en arrive à cette conclusion pour deux raisons. Premièrement, le PCC a un besoin urgent d’établir une hégémonie économique et de parvenir à une hégémonie politique autoritaire en supplantant l’Occident. Deuxièmement, les mesures anti plagiat des pays occidentaux sont trop faibles pour lutter efficacement contre le plagiat », a déclaré M. Xia.
Il a également souligné que bien que les pays occidentaux aient reconnu les dangers du programme de recrutement de talents du PCC, ils n’ont pas mis en place de mesures préventives systématiques et fiables – que ce soit en termes d’idéologie directrice, d’établissement d’un système préventif ou de moyens pour lutter contre le vol. Il y a encore des progrès à faire.
« En substance, une approche modeste de la lutte contre les voyous est une manière passive et inefficace de les traiter », a-t-il affirmé.
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