Nikola rappelle ses poids lourds électriques, suite à une enquête sur un incendie survenu en juin. Cet accident qui est loin d’être un cas isolé, questionne sur la sureté des véhicules électriques.
Le tumulte continue autour de Nikola – surnommé « Tesla du camion » – qui a vu ses actions plonger de 5,6% après la clôture du vendredi 11 août. Et pour cause, la start-up a déclaré qu’elle rappelait l’ensemble des poids lourds électriques alimentés par batterie qu’elle avait livrés jusqu’à ce jour, soit 209 véhicules. L’entreprise a également décidé de suspendre la vente de ses véhicules suite à la livraison des conclusions d’une enquête menée par son équipe de sécurité et un groupe d’ingénieurs internes sur un incendie survenu en juin dernier.
Des camions électriques ont pris feu le 23 juin dans le site de son siège social à Phoenix, en Arizona, faisant chuter ses actions de 7%. Dans un tout premier communiqué qui suivait l’incendie, l’entreprise a déclaré qu’« un véhicule [a] été vu dans la zone des camions concernés juste avant l’incident, un acte criminel est suspecté et une enquête est en cours ». Mais maintenant qu’elle a à sa disposition les résultats de l’enquête, Nikola a dû reconnaitre qu’« il était peu probable qu’un acte criminel ou d’autres facteurs externes aient causé l’incident ». La start-up a par ailleurs demandé aux clients et aux concessionnaires de ses camions électriques aux batteries de génération « Tre » de prendre immédiatement certaines mesures de sécurité, notamment de les garer à l’extérieur.
« L’unique composant du fournisseur dans le bloc-batterie est la source probable de la fuite de liquide de refroidissement qui a provoqué l’incendie des véhicules », a ainsi déclaré le concurrent de Tesla dans le secteur des camions électriques, comme le rapporte Reuters. Cela pose de nouveau la question : les véhicules électriques sont-ils dangereux à cause de leurs batteries qui peuvent s’enflammer à tout moment ?
Les batteries lithium-ion « peuvent devenir dangereuses en vieillissant et en s’échauffant »
L’électricité se veut devenir le nouveau carburant des voitures. Les batteries lithium-ion sont la référence actuelle de l’industrie automobile pour remplacer l’essence ou le gazole – accusés d’« émetteurs de CO2 pour entraîner le moteur », selon les termes de l’AFP.
Rechargée, la batterie stocke l’énergie puis, en se déchargeant, transforme de l’énergie chimique (issue des réactions des métaux qui la composent) en énergie électrique. Son principe consiste à faire circuler des électrons entre deux électrodes, chacune constituée d’un métal différent, l’une négative (l’anode), l’autre positive (la cathode). Elles sont plongées dans un liquide conducteur : l’électrolyte, qui contient du lithium. Le modèle de référence mondial actuel pour l’automobile est la batterie lithium-ion dont les deux types les plus fréquents sont les « NMC » (nickel-manganèse-cobalt) et les « LFP » (phosphates de fer lithié).
Ces batteries lithium-ion « peuvent devenir dangereuses en vieillissant et en s’échauffant », souligne Paul Poulain, spécialiste en risques industriels. Il demande des « modifications réglementaires » en France, régissant leurs conditions de stockage et de transport pour éviter les incendies comme celui qui a ravagé un entrepôt appartenant à Bolloré Logistics à Rouen en janvier. En brûlant, elles libèrent de l’acide fluorhydrique, corrosif et agent décalcifiant pour le corps humain.
? VIDÉO. Incendie en cours dans l’entreprise Bolloré Logistics à Grand-Couronne #Rouen #incendie @paris_normandie pic.twitter.com/DDLDhuCbbc
— Jérémy Chatet (@jeremychatet) January 16, 2023
Les incendies se multiplient : des véhicules électriques pointés du doigt
En janvier, un incendie a touché des bâtiments industriels à Grand-Couronne, près de Rouen, dont l’un entre eux appartient à Bolloré Logistics. Au total, les flammes ont fait des ravages à trois « cellules » d’environ 6000 m2 chacune, l’une renfermant quelque 12.000 batteries automobiles au lithium, une deuxième 70.000 pneus et une troisième des palettes, textiles et autres produits plus courants. « On sait que l’incendie est parti de la cellule Bolloré Logistics, puisque l’alerte a été donnée par un des employés », présume Pierre-André Durand, le préfet de la Seine-Maritime.
Plus récent encore, un cargo transportant près de 3000 véhicules a pris feu fin juillet dernier au large des Pays-Bas. « Il y a de fortes chances que l’incendie ait été déclenché par des voitures électriques », a indiqué à la chaîne de télévision publique NOS, Shoei Kisen Kaisha, – la société japonaise de location de navires qui gère le cargo. « Mais nous ne sommes pas tout à fait sûrs de la cause, nous attendons l’enquête. »
En avril dernier, un bus électrique s’est enflammé en plein Paris. « A l’origine de l’incendie (…) l’embrasement d’une batterie au lithium, un type de batterie également suspectée d’avoir pris feu le 7 avril dans le wagon d’une attraction au Futuroscope. Des accidents liés à des surchauffes ou à des défauts de fabrication qui provoquent des réactions chimiques spectaculaires », rapporte France Info.
Les batteries électriques sont omniprésentes de nos jours, non seulement dans les voitures électriques, mais aussi dans de nombreux vélos et trottinettes, ainsi que des objets de plus petites tailles comme les téléphones. Selon la Libération, « les incendies causés par des batteries au lithium pour vélos électriques se multiplient depuis des mois. Ce mardi 20 juin, un feu de ce genre a engendré la mort de quatre personnes à New York. »
Pour Louise Desrosiers, cheffe de l’information publique pour le Service de sécurité incendie de Montréal (SIM), « c’est une nouvelle problématique mondiale. On est en contact avec des pompiers en Espagne et aux États-Unis pour cet enjeu-là. On voit que les appareils sont plus abordables donc plus de gens en achètent. Donc oui, ça nous inquiète. » « Elles sont partout : téléphones, ordinateurs portables, trottinettes, cigarettes électroniques, jouets, montres intelligentes, outils et voitures », souligne l’experte du SIM.
Voitures électriques : une bombe à retardement ?
Pour augmenter l’autonomie des batteries en évitant les risques d’incendie, le taïwanais ProLogium, qui va ouvrir une usine en France d’ici 2030, parie sur une technologie de batteries « solides » qui se distingue par son électrolyte solide. Mais cette technologie est encore à l’étape de recherche et développement, tandis que les voitures électriques alimentées par des batteries d’anciennes générations sont déjà fabriquées à grande échelle. La plupart d’entre elles proviennent de la République populaire de Chine (RPC), leader mondial des véhicules électriques.
Rien qu’en mai 2023, 480 000 véhicules électriques ont été mise sur le marché chinois, représentant une croissance de 48 % dans l’espace d’un an. À mi-parcours de l’année 2023, la RPC a exporté plus de 2,5 millions de voitures, soit une augmentation de 42,4 % par rapport à l’année dernière. Les véhicules électriques représentent près de 40 % de ces exportations, selon les données des douanes chinoises rapportées par The Diplomat.
« L’Europe de l’automobile – 8% du PIB européen et 15 millions d’emplois – est menacée par “ le cheval de Troie du XXIe siècle, vert et made in China ” », dénonce Georges Nurdin, économiste, consultant et rédacteur d’une tribune dans Capital. Des projets d’usines d’assemblage de batteries sont annoncés en Europe mais le vieux continent « n’a pas de capacités de production des composants et des matériaux de base », déplorait fin 2022 Christophe Pillot, directeur du cabinet spécialisé Avicenne Energy. « Il y a peu de fabricants de cathodes si on excepte Umicore et dans une moindre mesure BASF. On ne trouve ni anode, ni électrolyte. Et encore moins de minerais et de raffineries », soulignait-il.
Pour autant, les voitures électriques ont dépassé les diesels au mois de juin pour la première fois dans les ventes de voitures neuves en Europe, a annoncé mercredi 19 juillet l’association des constructeurs (ACEA). Avec 158.000 véhicules vendus, les électriques sont passées de 10,7 à 15,1% de part de marché en un an. Elles ont notamment explosé aux Pays-Bas, en Allemagne, en France et en Belgique.
AFP a contribué à cet article.
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