Raids aériens et tirs nourris à Khartoum, des milliers de personnes évacuées du Soudan : les combats acharnés et meurtriers entre l’armée et les paramilitaires sont entrés samedi dans leur troisième semaine, en violation d’une nouvelle trêve.
Le pays est plongé dans le chaos depuis le déclenchement le 15 avril d’une lutte de pouvoir sanglante entre le chef de l’armée, Abdel Fattah al-Burhane, et son numéro deux, Mohamed Hamdane Daglo, dit « Hemedti », à la tête des redoutées Forces de soutien rapide (FSR).
Les combats ont fait au moins 528 morts et 4599 blessés, selon les derniers chiffres officiels communiqués samedi. Des dizaines de milliers de Soudanais ont fui vers les États voisins incluant l’Égypte, l’Éthiopie, le Tchad et le Soudan du Sud, tandis que des pays étrangers procèdent à des évacuations massives de leurs ressortissants. Le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, a déploré, via la chaîne Al-Arabiya, que « la guerre pour le pouvoir se poursuive alors que le pays s’effondre ».
Accusations de deux généraux
Chaque camp s’accuse de violer la trêve prolongée, sous médiation internationale, jusqu’à dimanche minuit (22h00 GMT). Les civils tentent de fuir ou de survivre barricadés sans électricité, eau, ni nourriture. « Il y a des affrontements à l’arme lourde et à la mitrailleuse », raconte à l’AFP un habitant de Khartoum, tandis qu’un autre témoin rapporte « des explosions et des tirs » ailleurs dans la capitale. Environ 70% des hôpitaux dans les zones de combats sont hors service, selon le syndicat des médecins.
Vendredi, les généraux en guerre se sont écharpés par médias interposés. Sur la chaîne Al-Hurra, Burhane a qualifié les FSR de « milice cherchant à détruire le Soudan » avec l’aide de « mercenaires venus du Tchad, de Centrafrique et du Niger ». « Hemedti » a lui parlé sur la BBC de son rival comme d’un « traître » qui n’est « pas digne de confiance ».
Les deux généraux avaient pourtant fait front commun lors du putsch de 2021 pour évincer les civils avec lesquels ils partageaient le pouvoir depuis la chute du dictateur Omar el-Béchir, deux ans plus tôt. Mais des divergences sont ensuite apparues et, faute d’accord sur l’intégration des FSR dans l’armée, ont dégénéré en guerre ouverte le 15 avril. Pour l’émissaire de l’ONU au Soudan, Volker Perthes, si les tensions étaient palpables, il n’y avait « aucun signe » que les combats éclateraient le 15 avril car, a-t-il dit à Al-Jazeera, les deux généraux rivaux devaient se rencontrer pour discuter ce jour-là.
Évacuations des étrangers
Selon l’ONU, 75.000 personnes ont été déplacées par les combats, particulièrement violents au Darfour, région déchirée par une guerre dans les années 2000. Si la trêve n’arrête pas les combats, elle n’empêche pas la poursuite des évacuations. Samedi, un nouveau bateau transportant environ 1900 évacués est arrivé en Arabie saoudite qui a accueilli jusqu’ici près de 5000 ressortissants saoudiens et étrangers. Parmi eux, Merhdad Malekzadh, qui fait partie des premiers Iraniens évacués samedi, décrit à l’AFP des bombardements et des explosions au quotidien à Khartoum. « On n’aurait jamais imaginé que la situation se tendrait autant ».
Le Royaume-Uni a déjà prévenu que son dernier vol d’évacuation aurait lieu samedi soir après avoir sorti plus de 1500 personnes du Soudan. « La fenêtre d’opportunité se referme », a regretté le Canada de son côté. « Nous continuons d’évaluer différentes options pour évacuer les Canadiens, y compris par voies terrestre et maritime », a déclaré sa ministre de la Défense Anita Anand.
En tout, « plus de 375 Canadiens » ont été évacués du Soudan et environ 300 autres attendent de l’aide pour sortir du pays, a ajouté la ministre.
Pillages, destructions et incendies
L’ONU estime que des millions de personnes supplémentaires pourraient sombrer dans la faim alors qu’un tiers des 45 millions de Soudanais en souffraient déjà, dans le pays, l’un des plus pauvres au monde.
Pillages, destructions et incendies se multiplient au Darfour-Ouest, y compris dans des camps de déplacés, rapporte Médecins sans frontières (MSF). L’ONG a dû y « arrêter la quasi-totalité de (ses) activités », regrette son chef adjoint au Soudan, Sylvain Perron.
Ces derniers jours, une centaine de personnes ont été tuées dans des combats qui ont ravagé El-Geneina, son chef-lieu, selon l’ONU dont le patron Antonio Guterres a déploré une situation « terrible ». « La société s’effondre, nous voyons des tribus qui essaient désormais de s’armer », a-t-il dit.
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