Le sucre : histoire d’un produit inutile

4 décembre 2015 10:00 Mis à jour: 15 août 2016 07:42

Il semble qu’aucune autre substance que le sucre n’occupe une si grande partie des terres de la planète tout en apportant si peu d’avantages à l’humanité.

Selon les dernières données, la canne à sucre est la troisième culture la plus importante au monde après les céréales et le riz, occupant 27 millions d’hectares de terres à travers le monde. Son apport principal, en dehors de bénéfices commerciaux, est une crise de la santé au niveau mondial.

L’épidémie d’obésité, ainsi que les maladies connexes telles que le cancer, la démence, les maladies cardiaques et le diabète se sont répandues dans les pays où les glucides, à base de sucre, dominent l’économie alimentaire.

Il est donc nécessaire de prendre du recul, d’examiner l’origine de la culture sucrière et la manière dont elle est devenue une menace directe pour nos paysages, nos sociétés et notre santé.

Examinons le passé

La physiologie humaine a évolué à partir d’aliments contenant très peu de sucre et de glucides, pratiquement pas raffinés. En fait, le sucre a probablement pénétré dans nos régimes par accident.

Il est probable que la canne à sucre, cultivée principalement pour le fourrage afin d’engraisser les porcs, ait été mâchée par les humains et que son goût les ait séduits.

Le premier sucre raffiné est apparu, en Inde, il y a environ 2 500 ans. De là, la technique s’est répandue vers la Chine, la Perse et les royaumes du Nord de l’Afrique, pour finalement atteindre la Méditerranée vers le XIIIe siècle. Chypre et la Sicile sont devenues des centres importants de production de sucre. Au Moyen Âge, il était considéré comme une épice rare et coûteuse.

Le premier endroit où l’on a cultivé la canne à sucre pour le raffinement et le commerce, à grande échelle, a été l’île de Madère, vers la fin du XVe siècle. Puis, les Portugais ont réalisé que des conditions favorables à la plantation de la canne à sucre existaient au Brésil, où une économie de plantation esclavagiste a été établie. Lorsque la canne à sucre brésilienne a été introduite dans les Caraïbes, peu avant 1647, la croissance industrielle s’est développée et a nourri l’engouement du sucre en Europe occidentale.

L’étude de l’ADN de restes de plantes suggère que la canne à sucre a évolué en Asie du Sud-Est. Les chercheurs ont cherché des preuves de la culture précoce de la canne à sucre dans le marais de Cook en Papouasie-Nouvelle-Guinée, où d’autres cultures comme le taro et la domestication des bananiers remontent à 8 000 av. J.-C. Cette culture daterait d’environ 3 500 ans et se serait transmise le long de la côte orientale de l’océan Pacifique et Indien par les marins polynésiens austronésiens.

Le commerce des esclaves

Cette nourriture dont personne n’a besoin, mais dont tout le monde raffole, a conduit la formation de notre monde moderne. Il y avait une énorme demande de main-d’œuvre pour cultiver les plantations de sucre au Brésil et dans les Caraïbes. Cette nécessité est à l’origine du commerce transatlantique des esclaves qui a arraché à leur terre près de 12,57 millions d’êtres humains entre 1501 et 1867. Le taux de mortalité, parmi les esclaves à chaque voyage, atteignait 25%. Environ deux millions de personnes ont été jetées à la mer.

Pour acheter des esclaves à l’élite africaine, l’Angleterre a rapidement augmenté la production de cuivre, de laiton, de rhum, de textile, de tabac et d’armes. Des banques modernes et des compagnies d’assurance peuvent retracer les origines du développement de ces industries dans l’économie de l’Atlantique du XVIIIe siècle.

Au XXIe siècle, le pouvoir du sucre est énorme, il a un impact plus important que le tabac ou l’alcool.

L’apogée industrielle est liée aux conditions de vie abominables des esclaves. En 1834, l’empire britannique a finalement libéré les opprimés, mais une compensation a été versée aux propriétaires d’esclaves alors que les esclaves, eux, n’ont jamais été indemnisés. Une grande partie de cet argent a été utilisée pour construire des infrastructures victoriennes, comme les chemins de fer et les usines.

Fléaux des temps modernes

À bien des égards, l’histoire du sucre et du tabac sont étroitement liés. Les deux produits ont été cultivés par des esclaves et considérés comme bénéfiques pour la santé. Bien que le sucre et le tabac aient des origines très anciennes, la consommation de masse a commencé au milieu du XVIIe siècle. Tous deux sont de vrais fléaux pour la santé.

La dépendance au tabac est largement reconnue, mais le sucre aussi stimule des réponses comportementales qui sont indissociables de la dépendance.

Au XXIe siècle, le pouvoir du sucre est énorme, il a un impact plus important que le tabac ou l’alcool. Le sucre est non seulement omniprésent – il est potentiellement responsable de 20% de la teneur calorique de l’alimentation moderne – mais il occupe également une place centrale dans l’économie mondiale et le patrimoine culturel.

On peut établir une comparaison avec notre dépendance aux combustibles fossiles. Ils ne sont pas seulement une mauvaise habitude, mais ils occupent une place centrale dans nos vies, ainsi que dans la géopolitique des zones où ils sont produits. De même, la hausse de la production du sucre est à la base du commerce mondial et du développement socio-économique, de l’esclavage, de la diaspora africaine et des normes culturelles modernes.

En connaissant les origines évolutives et historiques de la canne à sucre, nous comprenons mieux pourquoi le sucre domine la culture moderne et de quelle manière atténuer son influence néfaste. Comme beaucoup de grands défis du XXIe siècle, tel que le changement climatique, l’identification du problème semble claire.

La volonté publique et politique d’y faire face pourrait se traduire par une taxe sur le sucre et par un affichage des avertissements sanitaires. Aujourd’hui, le sucre est encore plus profondément ancré dans notre système alimentaire. En 2013, les cultures sucrières constituaient 6,2% du rendement agricole du monde et 9,4% de sa valeur monétaire totale. Seules des mesures socio-économiques audacieuses pourront apporter un changement positif.

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