Il y a quarante ans, lorsque la télévision était reine, les femmes plaisantaient sur le fait qu’elle plaçait la télécommande à côté de la fourchette pour mettre la table, tant l’addiction était forte. Aujourd’hui, avec la culture de l’écran, de nombreux enfants passent plus de temps sur les écrans qu’à dormir ou à travailler. L’augmentation de l’apprentissage via des écrans dans les écoles et durant les confinements dus au Covid‑19 s’ajoute aux jeux vidéo, aux smartphones, ordinateurs, tablettes qui accaparent les enfants.
Tout ce temps passé devant un écran est‑il inoffensif ? Non. Selon des études scientifiques, cela entraîne des changements négatifs réels dans le développement du cerveau de nos enfants. Une recherche publiée dans l’International Journal of Sociology of the Family en 2021, par exemple, indique que le temps excessif passé devant un écran est lié à « l’atrophie des régions du cortex frontal, du striatum et le cortex insulaire », et plus particulièrement à la réduction de l’épaisseur du cortex orbitofrontal. « Il a également été démontré que l’amincissement du cortex orbitofrontal a un impact important sur la mémoire et peut augmenter l’incidence des troubles obsessionnels compulsifs », indique l’étude.
L’utilisation excessive des écrans est également liée à un déclin de « l’intelligence cristallisée et de l’intelligence fluide », écrit l’auteur de la recherche, ainsi qu’à un déclin des fonctions exécutives. Que sont les fonctions exécutives ? Il s’agit d’activités cérébrales essentielles à l’âge adulte, comme la capacité de planifier, de se souvenir d’instructions, de prêter attention, d’effectuer plusieurs tâches, de passer d’une tâche à l’autre et de les mener à bien, de décélérer la gratification, de contrôler les impulsions, de traiter les informations sensorielles, de réguler le comportement social et avoir conscience de soi. Bien que les jeunes semblent avoir atteint leur pleine maturité, les fonctions exécutives ne se développent pas complètement avant le milieu ou la fin de la vingtaine, ce qui explique pourquoi l’utilisation excessive des écrans peut être si dangereuse.
Une étude récente publiée dans le Journal of Pediatrics a révélé qu’une seule heure de temps passé devant un écran par jour était liée à une diminution des fonctions exécutives chez les enfants dès l’âge de deux ans. Une étude publiée dans Preventive Medicine Reports a révélé qu’une seule heure par jour de temps passé devant un écran chez les enfants et les adolescents âgés de 2 à 17 ans était liée à une curiosité amoindrie, à une maîtrise de soi amoindrie et à une plus grande distraction. Malheureusement, selon une étude de CommonSense Media, les adolescents passent en moyenne plus de neuf heures par jour devant un écran, tandis que les enfants de 8 à 12 ans passent en moyenne huit heures devant un écran.
Une recherche publiée dans la revue Environmental Research fait écho aux changements structurels du cerveau et à la régulation cognitive et émotionnelle associés à un temps d’écran excessif. Elle propose une étude de cas dans laquelle le temps passé devant un écran pourrait avoir contribué au diagnostic de TDAH (Trouble du déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité) d’un garçon de neuf ans.
Les écrans à l’école
Il est clair que les fonctions exécutives sont essentielles à la réussite scolaire, mais que signifie pour les enfants l’apprentissage sur écran qui a envahi tant de milieux éducatifs ? Une étude menée par l’U.S. Military Academy, mieux connue sous le nom de West Point, a révélé que « l’utilisation illimitée d’ordinateurs portables réduit les notes d’examen des élèves de 0,18 écart‑type » et que « les tablettes réduisent les notes de 0,17 écart‑type ». Ce qui équivaut à une différence entre un B+ et un A‑ dans la moyenne générale des élèves, ont rapporté les chercheurs dans la revue Education Next.
« Nous avons également examiné séparément des sous‑groupes d’étudiants définis en fonction du sexe, de la race, des résultats aux examens d’entrée à l’université et de la moyenne générale initiale. Dans aucun groupe, les élèves n’ont bénéficié de manière significative à l’accès aux ordinateurs en classe. Nous avons trouvé des preuves pertinentes que le fait de permettre l’utilisation d’ordinateurs est plus préjudiciable aux étudiants masculins qu’aux étudiantes féminines et aux étudiants ayant obtenu des résultats relativement élevés aux examens d’entrée », résument les chercheurs.
Une des raisons pour lesquelles les ordinateurs n’améliorent pas les résultats scolaires est qu’ils sont une source de distraction plutôt que d’éducation.
Melanie Hempe, fondatrice de ScreenStrong, une organisation qui donne aux parents les moyens de limiter le temps passé devant un écran par leurs enfants, et contributrice d’Epoch Times, voit d’autres obstacles à l’apprentissage scolaire causés par les écrans. Les élèves se fient par exemple à la facilité de recherche sur ordinateur pour « se souvenir » des faits plutôt que d’utiliser leur propre mémoire, une pratique parfois appelée « déchargement cognitif ». Prendre des notes à la main plutôt que sur un ordinateur fait également mieux appel à notre mémoire, selon Melanie Hempe. « Comme n’importe quel muscle, le cerveau a besoin de s’entraîner en réfléchissant de manière approfondie et cruciale, et pas seulement en s’exerçant à la saisie de données ou en cherchant des réponses rapides pour accomplir une tâche », souligne‑t‑elle.
L’écriture ne semble pas non plus bénéficier du temps passé devant un écran. Un enfant qui utilise un écran peut avoir un grand nombre de « sites Web à portée de main », explique Melanie Hempe, mais « ne semble pas pouvoir terminer un travail de recherche dans un délai raisonnable », ou peut mettre « deux fois plus de temps à écrire un paragraphe » que ceux qui travaillent sans écran.
Même les premières recherches sur l’apprentissage sur écran à l’école ont soulevé des inquiétudes. Des chercheurs ayant publié un article dans la revue Pediatrics en 2006 ont établi un lien entre le temps passé devant la télévision et les jeux vidéo et les mauvais résultats scolaires, tandis que des recherches publiées dans la revue South African Family Practice en 2004 ont établi un lien entre le « comportement sédentaire des enfants devant l’écran » et les effets sur la santé mentale, la diminution de l’activité physique et la fatigue oculaire numérique.
Préoccupations particulières quant à la génération Z dans l’ère du selfie
Jonathan Haidt, professeur à la Stern School of Business de l’université de New York et auteur de « The Coddling of the American Mind : How Good Intentions and Bad Ideas Are Setting Up A Generation for Failure » [Dorloter l’esprit américain : comment les bonnes intentions et les mauvaises idées mettent une génération sur la voie de l’échec, ndt.], est particulièrement préoccupé par l’effet du temps passé devant un écran pour la génération Z, c’est‑à‑dire les personnes nées entre 1997 et 2012. « Il n’y a jamais eu de génération aussi déprimée, fragile et anxieuse », a‑t‑il déclaré au Wall Street Journal.
Facebook, Instagram et l’ « ère du selfie » ont commencé lorsque la génération Z étaient au milieu de l’adolescence, note Jonathan Haidt, créant une enfance qui se passe « uniquement sur le téléphone pour la majorité ».
« Cela semble social parce que vous communiquez avec des gens. Mais c’est performatif. Vous n’avez pas vraiment de relations sociales. Vous obtenez des liens sociaux faibles et factices. »
Le représentant Mike Gallagher (Parti républicain‑Wisconsin) a été encore plus loin dans l’analyse des dangers en qualifiant l’application populaire TikTok de « fentanyl numérique » dans l’émission Meet The Press.
Effets émotionnels et physiques possibles des écrans
Peu de parents seront surpris d’apprendre que l’utilisation excessive des écrans est associée à des problèmes émotionnels tels que la dépression et l’anxiété. Une étude publiée dans la revue Preventive Medicine Reports a révélé qu’une utilisation modérée des écrans était liée à un bien‑être psychologique moindre et qu’une utilisation élevée des écrans faisait plus que doubler la probabilité d’un diagnostic de dépression ou d’anxiété, d’un traitement par un professionnel de la santé mentale et d’un enfant sous traitement médicamenteux pour un problème psychologique ou comportemental.
Une étude publiée dans la revue Preventative Medicine souligne que le temps passé devant un écran et l’activité physique insuffisante qui l’accompagne « interagissent pour augmenter les symptômes de dépression et d’anxiété et l’insatisfaction de la vie scolaire chez les adolescents chinois ».
Les changements physiques qui peuvent résulter d’un temps d’écran excessif incluent la privation de sommeil. La lumière des écrans supprime la mélatonine et les chercheurs de la revue Pediatrics ont écrit que l’accès illimité aux écrans dans les chambres d’enfants entraîne « un repos ou un sommeil insuffisant ». Malheureusement, le manque de sommeil est également lié à des problèmes physiques et à « des facteurs de risque de maladies cardiovasculaires comme l’hypertension artérielle, l’obésité, un faible taux de cholestérol HDL, une mauvaise régulation du stress (excitation sympathique élevée et dérèglement du cortisol) et une résistance à l’insuline », indique une recherche publiée dans la revue Environmental Research. « Parmi les autres conséquences sur la santé physique, on peut citer les troubles de la vision et la réduction de la densité osseuse. »
Socialisation et conséquences émotionnelles
Il est clair que le comportement sur écran est généralement solitaire et que même les appels vidéo ne remplacent pas les interactions en face à face dans des lieux sociaux. Nous savons maintenant que le temps excessif passé devant un écran nuit à la saine socialisation des enfants. Les chercheurs ont établi un lien entre l’utilisation excessive des écrans chez les enfants et la difficulté à se faire des amis, la diminution du comportement prosocial et un risque accru de comportement antisocial.
Selon les spécialistes de l’utilisation des écrans, le temps excessif passé devant un écran peut également conduire à des crises de colère. Ce fait est également attesté par d’innombrables parents qui se sont efforcés de fixer des limites de temps d’écran pour leurs enfants.
Un agent de probation pour mineurs a déclaré à Melanie Hempe, la fondatrice de ScreenStrong : « De nombreux parents m’ont appelé en larmes parce que leur enfant avait fait preuve de violence à leur égard. Une mère a acheté un téléphone à son fils pour le récompenser de ses bons résultats scolaires. Quand sa consommation a dégénéré, elle a essayé de lui retirer le téléphone et il l’a frappée. Beaucoup d’enfants se retrouvent dans le système de justice pour mineurs de cette façon. »
Manque de soleil et de jeux en plein air
Il est évident que les enfants qui passent du temps devant l’écran, en particulier les jeux vidéo, ne jouent pas dehors avec d’autres enfants comme le faisaient probablement leurs parents. Le manque de jeux extérieurs prive les enfants d’exercice, de compagnie, de vitamine D et des pouvoirs curatifs de la nature. Par exemple, le fait de s’immerger dans une forêt ou un bois, souvent appelé bain de forêt, est « supposé être directement lié à la libération de phytoncides par diverses espèces d’arbres », indique la recherche publiée dans l’International Journal of Sociology of Family Studies. Les phytoncides sont des composés organiques allochimiques antimicrobiens présents dans les huiles essentielles des arbres.
« Les phytoncides ont un effet importants sur les récepteurs GABA, ce qui améliore les systèmes immunitaire et endocrinien et conduit à une meilleure santé physiologique et psychologique globale », écrivent les chercheurs.
Parmi les autres avantages des bains de forêt, citons une diminution de l’anxiété, des hormones du stress, de la tension, de la colère et de la fatigue, ainsi qu’une amélioration du fonctionnement immunologique et des niveaux de glucose. La méthode des bains de forêt a été utilisée pour traiter le diabète de type 2, en augmentation à mesure que les enfants adoptent des passe‑temps sur écran.
Que peuvent faire les parents ?
Le temps passé devant un écran étant une habitude, Melanie Hempe suggère aux parents de briser les repères qui conduisent les enfants vers les écrans. Elle donne l’exemple d’un petit garçon qui avait l’habitude de se rendre directement dans sa chambre pour jouer à un jeu vidéo après l’école. Un jour, la mère du garçon a décidé d’annoncer qu’elle sauterait sur le trampoline après l’école avec ses enfants, interrompant immédiatement l’habitude des écrans et les initiant à des divertissements amusants, sans écran.
En plus de briser les habitudes et les repères, les parents doivent encourager les activités en plein air chaque fois que possible. Si le temps ne coopère pas, il faut privilégier les jeux, l’artisanat et les jeux intérieurs gratifiants et créatifs.
Oui, les enfants se mettront en colère lorsqu’on leur refusera ce qui est devenu une habitude pour eux, disent de nombreux parents, mais il ne faut pas reculer. « Si vos enfants vous disent qu’ils ont besoin de leur smartphone pour l’apprentissage à distance, pour rester en contact avec leurs amis, ne l’achetez pas », conseille Melanie Hempe. « Ils veulent aussi manger des sandwichs à la crème glacée toute la journée et avoir du pop corn pour le dîner », écrit‑elle dans Epoch Times.
Pour plus de conseils sur la manière de protéger les enfants des effets délétères d’un temps d’écran excessif sans perdre les nombreux effets positifs de la technologie, les parents peuvent consulter le site ScreenStrong.
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