Législatives : ces violences et intimidations qui menacent la démocratie en France

Par Germain de Lupiac
5 juillet 2024 15:50 Mis à jour: 5 juillet 2024 18:16

Alors que la campagne des législatives arrive à son terme, les derniers jours ont été marqués par une multiplication d’accrochages verbaux et physiques touchant tous les partis. Plusieurs candidats et militants ont été agressés alors qu’ils faisaient campagne, dans un contexte d’antagonismes exacerbés entre le Nouveau Front populaire, le Rassemblement national et le camp macroniste qui s’accusent mutuellement de ces violences.

La campagne éclair a été « très polarisée », avec « un fort enjeu » entre « deux blocs antagonistes » analyse Luc Rouban, politologue au Centre de recherches politiques de Sciences Po. Pour la directrice de BVA Opinion, Christelle Craplet, un « climat éruptif » et « des propos très violents » a visé particulièrement le président Emmanuel Macron, comptable de la politique française depuis sept ans.

Ce dernier a brandi lui-même le spectre d’une « guerre civile » en cas de victoire des « deux extrêmes », quand Marine Le Pen accusait de son côté « l’extrême gauche qui depuis toujours agit par la violence » et pourrait selon elle contester dans la rue la victoire du RN. Dans cette optique, le gouvernement se prépare à des troubles à l’ordre public dans toute la France au soir des élections.

Plusieurs agressions et intimidations ces dernières semaines

Quelque « 51 candidats, suppléants ou militants » ont été « agressés physiquement » durant la campagne des élections législatives, a annoncé Gérald Darmanin, le 5 juillet. Durant cette campagne menée dans « une France à vif », « plus d’une trentaine d’interpellations » de « profils extrêmement variés » ont été effectuées par les forces de l’ordre, a précisé le ministre de l’Intérieur.

Mercredi soir, la porte-parole du gouvernement Prisca Thevenot, candidate dans les Hauts-de-Seine, a été victime avec son équipe d’une agression lors d’une opération de collage d’affiches, vraisemblablement par des jeunes du quartier. En Savoie en début de semaine, une candidate du RN, Marie Dauchy, a porté plainte après avoir été violemment prise à partie par un commerçant sur un marché. En Isère, c’est l’ancien ministre Olivier Véran qui a dénoncé l’agression d’un élu local qui collait des affiches pour sa campagne.

La liste continue, le 20 juin, le parquet de Saint-Étienne a ouvert une enquête pour « violence en réunion » après « une bousculade, des insultes et des projections d’eau et de farine » visant le candidat RN Hervé Breuil sur un marché. Marine Le Pen avait pointé des « milices d’ultragauche, soutiens du Nouveau Front populaire ». Shannon Seban, candidate Renaissance dans le Val-de-Marne, a également porté plainte pour injure raciste, affirmant avoir été traitée de « sale sioniste » par des « partisans de l’extrême gauche » à Ivry-sur-Seine.

Plusieurs militants de gauche déplorent eux aussi des agressions attribuées à l’extrême droite. Un homme distribuant des tracts du NFP à Bordeaux a déposé une plainte la semaine dernière, après avoir été frappé par un homme affirmant « supporter Bardella ». Noé Gauchard, candidat NFP dans le Calvados, qui a vu ses affiches barrées d’un tag « SS », a constaté aussi que « les agressions verbales se produisent quasiment tous les jours.

Des agressions dénoncées par tous les camps politiques.

Une pression médiatique pour influencer le vote

Rien n’est fait non plus pour apaiser les clivages quand une partie des élites françaises donnent des consignes de vote, renvoyant un camp arrivé en tête du vote au statut d’abominable, l’accusant de racisme, de fascisme, d’homophobie, etc. et s’autorisant au passage des digressions. Depuis des semaines, des élites culturelles, médiatiques, sportives, associatives, universitaires, judiciaires, etc. ont donné aux électeurs des consignes de vote contre le RN.

Dans les médias, le quotidien Le Monde a appelé le 28 juin ses lecteurs à faire « barrage » au Rassemblement national. « Selon les opinions de chacun, le choix de candidats républicains convaincus, démocrates sincères, paraît assez large dans chaque circonscription », écrit le directeur du journal, Jérôme Fenoglio, dans un édito intitulé « Législatives 2024: préserver notre démocratie ». Un appel qui se lira en Une d’autres grands médias.

Dans le sport, le capitaine de l’équipe de France Kylian Mbappé a estimé en pleine compétition pour l’Euro, qu’il y avait « urgence à aller voter après les résultats catastrophiques » du premier tour. « On ne peut pas mettre le pays entre les mains de ces gens-là », a-t-il lancé, sans toutefois citer explicitement le RN mais en pointant l’extrême droite plus tard dans la conférence. Plusieurs sportifs de premier plan ont également partagé leur consigne de vote.

Plusieurs centaines d’artistes ont appelé à faire barrage au RN, dans une tribune publiée le 21 juin, montrant la politisation des arts et de la culture en France. « Le monde des arts et de la culture est en prise directe avec la société et ses évolutions. Il existe par la rencontre de l’autre, la découverte de ses différences, l’expression de l’intime, dans le respect des identités et de la diversité », ont-ils écrit pour justifier leur choix.

Des syndicats, des associations de lutte contre la précarité, des mouvements féministes – tous de gauche, ont aussi donné des consignes de vote explicites pour les législatives. Dans une décision rare, la CGT a appelé le 19 juin à voter pour le NFP. La CFDT, premier syndicat français, a également appelé à ne pas voter pour le RN.

Des groupes violents contestent le résultat des urnes

Le collectif « Action antifasciste Paris-Banlieue » a prévu une manifestation dimanche soir devant l’Assemblée nationale à la clôture du second tour des législatives, a révélé une source policière. Sur les réseaux sociaux, le groupuscule violent d’extrême gauche a lancé un appel à « converger vers l’Assemblée nationale » quelle que soit l’issue » du scrutin. « Aujourd’hui plus que jamais, faisons bloc par tous les moyens contre l’extrême droite et ses alliés » peut-on lire dans leur publication. La manifestation a tout de suite été interdite par le Préfet de Paris Laurent Nunez, même si l’interdiction ne sera sûrement pas respectée.

Le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin a annoncé que « 30.000 policiers et gendarmes, dont 5.000 à Paris et sa banlieue » seraient mobilisés dimanche soir. Les services de renseignement considèrent qu’il existe « de réels risques de troubles à l’ordre public après le second tour avec à la fois des rassemblements qui pourraient donner lieu à des incidents mais aussi des risques d’affrontements entre des groupes antagonistes ».

« Ces appels à la rébellion, ces appels à l’insurrection, ces appels à contester le fonctionnement de la démocratie française m’apparaissent extrêmement dangereux », déclarait Jordan Bardella à propos des manifestations anti-RN au 1er tour. Ces intimidations apparaissent aussi du côté de groupuscules de l’ultradroite comme récemment un site qui a appelé à « éliminer » des avocats signataires d’une tribune contre le Rassemblement national.

Un inévitable appel à l’apaisement

Il y a une semaine, le PDG de la SNCF Jean-Pierre Farandou – anticipant peut être des grèves des syndicats en réponse aux résultats du second tour – parlait d’un nécessaire apaisement à un mois des Jeux olympiques. « C’est compliqué en ce moment », a-t-il reconnu, mais il faut réussir à trouver «de la joie, du plaisir» à l’approche de cet événement mondial qui va attirer 15 millions de visiteurs en France, a-t-il déclaré.

Pour le PDG dont le mandat est censé se terminer après les Jeux, cette compétition représente « un moment de concorde ». « Pendant les JO, les Grecs arrêtaient de se faire la guerre. Si on pouvait un peu retrouver cet état d’esprit, ce serait pas mal », a-t-il souhaité.

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