Rassemblés à la hâte pour contrer le RN, les membres du Nouveau Front populaire devront aussi se compter lors des législatives des 30 juin et 7 juillet. Le résultat de chaque allié, notamment les insoumis et les socialistes, pèsera sur les choix politiques et, en cas de succès, sur celui d’un Premier ministre.
« L’hypothèse que tout le monde anticipe c’est soit le RN, soit une majorité relative. Et dans ce cas il y aura une pression pour que la gauche soit plus constructive. C’est là, à mon avis, que les choses se compliquent », analyse Rémi Lefebvre, professeur de sciences politiques à l’Université de Lille.
« Évidemment notre objectif est de gonfler les troupes du groupe socialiste puisque notre but est que le Nouveau Front populaire soit majoritaire à l’Assemblée nationale », commente Pierre Jouvet, eurodéputé et négociateur socialiste au sein de cette alliance.
Mais le deuxième enjeu pour le parti à la rose est de combler son retard sur la France insoumise (LFI) qui, avant la dissolution, comptait deux fois plus de députés (75 contre 31), en capitalisant sur son succès aux européennes (près de 14%).
Une clarification nécessaire à gauche
Hostile à la direction de La France insoumise, le député PS sortant Jérôme Guedj voit dans ces élections une « clarification à gauche qui viendra immanquablement » et qui est « indexée aux résultats ».
Les socialistes peuvent se targuer d’avoir obtenu une centaine d’investitures de plus qu’à l’époque de la Nouvelle union populaire écologique et sociale (Nupes) pour les législatives de 2022. Au total, ils représenteront la gauche dans 175 circonscriptions.
Et si, au PS, on a plaisir à se rappeler le bon taux de réussite de 2022 (28 élus sur 70 candidats), on garde aussi en tête le triomphe du RN aux européennes et les multiples inconnues du scrutin (participation, nombre de triangulaires, report de voix au second tour).
Avec « énormément de prudence », le secrétaire général du PS Pierre Jouvet estime que « 70 à 90 » circonscriptions sont prenables, dont « une vingtaine » qui avaient été perdues « de peu » face aux macronistes en 2022. Et « 5 à 10 circonscriptions » perdues de peu face au RN « dans le Gard notamment », avec un « mauvais report » de voix macronistes, dit-il.
Suffisant pour disputer à LFI le leadership à gauche ? Rien n’est certain car des socialistes sortants sont en danger face à la poussée de l’extrême droite, à l’instar de Philippe Brun (Eure) ou Gérard Leseul (Seine-Maritime). Et les Insoumis, auteurs d’un score non négligeable aux européennes (près de 10%), et qui misent sur la mobilisation, n’entendent pas reculer.
« On a des gens comme Claire Lejeune dans la 7e circonscription de l’Essonne qui peuvent gagner », estime un membre de la direction insoumise, en référence à cette candidate qui avait échoué de 200 voix à se faire élire en banlieue parisienne face à un macroniste en 2022.
« On risque de perdre des circonscriptions », reconnaît toutefois la même source, listant celles de Rachel Kéké et Louis Boyard en région parisienne, ou celles de Sébastien Rome et Élise Leboucher dans des régions plus rurales.
Reste à s’entendre
Le rapport de forces entre partis serait décisif en cas de majorité absolue à gauche. À moins d’une semaine du premier tour, la coalition se déchire déjà sur l’opportunité de proposer le fondateur de LFI Jean-Luc Mélenchon comme Premier ministre.
Repoussoir pour beaucoup de socialistes, écologistes et communistes, il refuse de s’exclure et estime que le poste doit revenir à un insoumis.
Mais même sans majorité absolue, le poids de chaque parti serait crucial en cas de coalition élargie face au RN.
« Cela veut dire qu’il n’y a pas d’autres d’options qu’un gouvernement du Nouveau Front populaire si on a la majorité, ou qui intègre une partie de la macronie. Je ne fais que des maths », souligne Olivier Bertrand, délégué aux élections pour les Écologistes.
« On ne peut pas exclure une recomposition au centre-gauche. D’autant plus probable avec un groupe socialiste plus important, mais il faudra aussi voir combien il restera de députés macronistes estampillés à gauche », prévient Rémi Lefebvre. « Dans ce cas-là le Front populaire sera très fragile ».
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