Législatives : une démocratie fragilisée avec plus de 150 désistements à l’entre-deux-tours

Par Ludovic Genin
2 juillet 2024 10:21 Mis à jour: 2 juillet 2024 21:00

Alors que des centaines de désistements ont vu le jour après le soir du 1er tour des législatives anticipées pour faire barrage au RN arrivé en tête, le sénateur LR Stéphane Le Rudulier a déposé une proposition de loi le 28 juin voulant mettre fin aux « magouilles » des appareils politiques lors des élections afin de « protéger le choix des électeurs lors du second tour et sanctuariser la démocratie ».

« Les désistements fourvoient et fragilisent la démocratie » peut-on lire dans l’introduction de la proposition de loi. Le parlementaire veut y supprimer la formalité de dépôt de candidature avant le second tour. Selon lui, « de tels accords ne font que renforcer l’aversion des Français pour la vie politique ».

« Se faire battre à deux points près, à cause de magouilles, cela tue la démocratie, installe un malaise et provoque un écœurement », dénonce Stéphane Le Rudulier dans Le Figaro, car les désistements systématiques pour faire barrage à une partie des électeurs sont des « dangers » qui « biaisent les réelles intentions des Français ».

La stratégie du barrage entre Ensemble et le NFP

Dimanche, la vague « bleu marine » a déferlé avec plus de 10,6 millions de voix, soit 33,1 % des suffrages, un niveau historique. Lors du premier tour, le parti à la flamme, allié à Eric Ciotti, s’est qualifié dans 443 des 577 circonscriptions et est en tête dans 296 d’entre elles.

Le lendemain, Emmanuel Macron a affirmé à ses ministres réunis à l’Élysée que « pas une voix » ne devait « aller à l’extrême droite », rappelant que la gauche s’était mobilisée face au RN en 2017 et en 2022; permettant sa propre accession à l’Élysée, selon un participant. Une manière de répondre à ceux qui, dans sa majorité, renvoient dos-à-dos le RN et La France insoumise, accusée d’avoir flirté pendant la campagne européenne avec l’antisémitisme.

Tout plutôt que le « projet funeste » du RN, s’est également défendu le Premier ministre Gabriel Attal, qui, malgré ses mauvais scores, a appelé les Français à élire « une Assemblée nationale plurielle ».

Les dirigeants de gauche et d’extrême gauche ont, quant à eux, exprimé leur insatisfaction face aux hésitations ou aux réticences de certains dans le camp présidentiel. « Nous avons appliqué une règle claire […] : pas une voix pour le Rassemblement national […] et nous souhaitons que le camp macroniste fasse preuve d’une même clarté », a déclaré le coordinateur des Insoumis Manuel Bompard.

Plus de 150 désistements en deux jours

Après le score inédit du RN au premier tour des législatives, les désistements des candidats de gauche, d’extrême gauche et macronistes se sont multipliés pour empêcher Jordan Bardella d’obtenir la majorité absolue à l’Assemblée. Quelque 155 candidats engagés dans des triangulaires se sont déjà désistés le 12 juillet afin de contrer le RN, selon un décompte provisoire de l’AFP.

Parmi ceux-ci, figurent à ce stade une majorité de représentants de l’alliance de gauche Nouveau Front populaire, ou encore trois ministres macronistes (Sabrina Agresti-Roubache, Marie Guévenoux, Fadila Khattabi).

François Ruffin, en ballottage difficile dans la Somme, va bénéficier du désistement de la candidate macroniste et plusieurs candidats Renaissance, arrivés troisièmes, ont déjà annoncé leur retrait, comme Sylvie Casenave-Péré, arrivée troisième derrière Marie-Caroline Le Pen dans la Sarthe.

Le candidat LFI s’est également retiré dans le Calvados pour favoriser l’élection face au RN de l’ex-Première ministre Élisabeth Borne, que la gauche avait pourtant vigoureusement combattue sur les réformes des retraites et de l’immigration ou sur le recours à l’article 49.3 sur le budget.

Même démarche à Tourcoing, où la candidate investie par le Nouveau Front populaire (NFP) se retire pour ne pas prendre le risque de voir le RN battre le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin.

Des « alliances du déshonneur »

De son côté, Jordan Bardella dénonce des « alliances du déshonneur » pour lui faire barrage, et a appelé les électeurs à lui accorder une majorité absolue « face à la menace existentielle pour la nation française » que représente selon lui l’alliance avec le Nouveau Front populaire.

« C’est une alliance du déshonneur dans un sens comme dans l’autre », a-t-il déclaré sur TF1, face à cette esquisse de front républicain entre les macronistes, la gauche et l’extrême gauche.

« J’ai besoin que le peuple français reste mobilisé, qu’il m’accorde plus de 289 députés », a ajouté le candidat à Matignon, « pour bâtir le redressement du pays que je crois urgent et nécessaire ». Il a néanmoins expliqué que s’il devait manquer une poignée d’élus, il envisagerait de s’appuyer sur des députés de droite.

Avant cette vague de retraits, les instituts de sondage anticipaient une large majorité relative d’au moins 240 sièges pour les troupes de Jordan Bardella, voire une courte majorité absolue jusqu’à 295 sièges.

L’effet des désistements « jouera plutôt en défaveur du RN », selon le directeur général délégué d’Ipsos Brice Teinturier, qui envisage une majorité plus relative qu’absolue, remettant en question le choix prononcé des électeurs au premier tour.

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